Les Mariages du père Olifus Vous êtes ici : Accueil > Accueil > Bibliothèque
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Chapitre XXII
Conclusion

A cette vue, je ne conservai plus aucun doute. Vanly était bien coupable, et Schimindra était bien empoisonnée.
Je n'eus plus qu'un désir, celui de sauver la pauvre femme qui venait de se dévouer pour moi.
- Au secours ! au secours ! m'écriai-je. Un médecin ! Un médecin !
Puis, comme personne ne répondait attendu que Vanly avait pris ses précautions, et que la maison était parfaitement déserte, j'ouvris la fenêtre.
- Au secours ! répétai-je, au secours ! un médecin ! un médecin !
Heureusement, un portefaix passait en ce moment sur le quai. Il entendit mes cris, me reconnut et se mit à ma disposition.
- Un médecin ! lui criai-je en lui jetant une pièce d'or.
Il ramassa la pièce d'or, fit un signe de tête et se mit à courir à toutes jambes.
Cinq minutes après il revint avec une espèce de bonze qui faisait de la médecine gratis pour le peuple, et qui avait une grande réputation de science et de sainteté parmi les gens du port.
Mais, quoiqu'il se fût écoulé dix minutes à peine depuis que Schimindra avait avalé le poison, le mal avait déjà fait des progrès terribles. La respiration était bruyante et interrompue par des sanglots, les muscles de l'abdomen et du thorax commençaient à se contracter, la bouche devenait écumeuse, la tête se renversait en arrière, et les vomissements commençaient.
Je courus au médecin et l'amenai en présence de Schimindra.
- Oh ! oh ! s'écria-t-il, voilà une femme qui a le choléra, ou bien...
Il hésita.
- Ou bien ? répétai-je.
- Ou bien qui est empoisonnée.
- Avec quoi ?
- Avec l'upas de Java.
- C'est cela, m'écriai-je, oui, oui, elle a été empoisonnée avec l'upas de Java. Quel remède y a-t-il ?
- Il n'y a pas de remède, ou bien, s'il y en a un...
- Après ?
- Il est si rare.
- Enfin, ce remède ?
- Il faudrait du bézoard.
- Du bézoard ?
- Oui ; mais pas du bézoard de vache, pas du bézoard de chèvre...
- Du bézoard de singe.
- Sans doute, mais où s'en procurer.
Je jetai un cri de joie.
- Tenez, lui dis je, tenez.
Et je tirai ma pierre de bézoard de son sachet de cuir.
Schimindra souleva la tête.
- Ah, dit-elle, il m'aime donc encore un peu !
- Oh ! oh ! fit le bonze, du bézoard bleu, du véritable bézoard de singe.
- Oui, du véritable, je vous en réponds, attendu que je l'ai récolté moi- même. Mais ne perdez pas de temps ; vous voyez. Et je lui montrai Schimindra qui se tordait dans les convulsions de l'agonie.
- Oh ! maintenant, dit-il, soyez calme, nous avons le temps.
- Mais, m'écriai-je, dans cinq minutes elle sera morte.
- Oui, si dans trois minutes elle n'est pas sauvée..
Et en effet le bonze se mit à râper le bézoard dans un verre d'eau, avec la même tranquillité qu'il eût fait d'un morceau de sucre.
L'eau prit à l'instant même une belle teinte azurée, qui peu à peu se changea en opale et lança des reflets d'or.
C'était sans doute le point où devait en être arrivé l'antidote, car me faisant signe de soulever Schimindra, le bonze introduisit entre ses dents, déjà serrées par les convulsions, les bords du verre, qu'elle faillit briser.
Mais aux premières gouttes qui humectèrent le palais de la mourante, les muscles se détendirent, la tête se balança mollement sur les épaules, les bras raidis retombèrent à ses côtés, le râle cessa, et une légère moiteur perla sur son front aride.
Schimindra vida le verre.
Puis, lorsque le verre fut vidé :
- Oh ! mon Dieu ! dit-elle, c'est la vie que vous m'avez fait boire.
Alors, jetant un dernier regard sur moi, me remerciant d'un dernier sourire, essayant de me toucher par un dernier geste, elle poussa un soupir, ferma les yeux et tomba dans une léthargie qui n'avait rien d'inquiétant, car on sentait sourdre la vie sous cette apparence de mort.
Je ne pouvais plus la laisser chez Vanly-Tching, je ne voulais pas y rester moi-même ; ma maison n'était qu'à cinquante pas de celle où nous nous trouvions. Je pris Schimindra dans mes bras. Je sortis avec le bonze, je fermai la porte à clef, je remis cette clef au bonze en le priant de la porter à l'instant même chez le juge civil, successeur de l'avant-dernier mari de Vanly-Tching, et de lui raconter tout ce qu'il avait vu, tandis que j'emportais chez moi Schimindra, qui n'avait plus, au dire du docteur, besoin que d'un sommeil tranquille !
Puis, Schimindra déposée sur son lit, j'allai me coucher à mon tour.
Vous dire ce qui se passa dans mon esprit une fois que la lumière fut éteinte, et que, vaincu par la fatigue, je me trouvai dans cet état de rêverie qui n'est pas encore le sommeil et qui n'est déjà plus la veille, serait chose impossible. Mes quatre femmes semblaient s'être donné rendez-vous au pied de mon lit. C'était Nahi-Nava-Nahina, c'était doa Inès, c'était Amarou, c'était Vanly-Tching ; tout cela me réclamant, me tirant, me disputant bien plutôt à la façon des Furies qu'avec les manières de tendres épouses, tandis que la pauvre Schimindra, à qui la mort sans doute avait donné des ailes, planait au-dessus de moi, me défendait de son mieux, les écartant, les chassant ; mais, mise dehors par la porte, cette série interminable d'épouses rentrait par les fenêtres, se rejetait sur mon lit, s'acharnait sur moi, si bien que je me sentais m’en aller par morceaux, et que je pressentais le moment où l'une m'enlèverait un bras, l'autre une jambe, celle-ci un membre, celle-là un autre.
Tout à coup la porte s'ouvrit, et je vis apparaître comme un fantôme voilé, devant lequel mes quatre femmes indiennes s'évanouirent et qui vint, éloignant Schimindra elle-même d'un seul geste, se coucher tranquillement près de moi.
Ah, ! ma foi !la dernière venue me rendait un si grand service, que je me réfugiai dans ses bras, où, après une agitation qui dura encore quelques instants, je m'endormis.
Le lendemain, le premier rayon du jour, en frappant droit sur mon visage, me réveilla ; j'ouvris les yeux et poussai un cri de surprise.
J'étais couché côte à côte avec la Buchold.
Mais, près de la Buchold si pâle, si changée, que je n'eus pas le courage de lui reprocher sa visite, tant elle me faisait l'effet d'avoir peu de temps à vivre.
D'ailleurs, je me rappelais le service qu'elle m'avait rendu dans la nuit.
- Comment ! c'est vous ? lui dis-je.
- Oui, c'est moi, qui, toute souffrante que je suis, n'ai point hésité à vous apporter moi-même une bonne nouvelle.
- Ah ! oui vous êtes accouchée ? lui dis-je.
- D'une fille, d'une charmante petite fille ; comme je vous l'ai promis, je l'ai appelée Marguerite.
- Et quel est le parrain de celle-ci ?
- Oh ! vous en serez fier, mon ami, c'est un des plus illustres professeurs de l'Université de Leyde, le docteur Van Holstentius.
- Oui, je le connais.
- Eh bien il m'a promis d'aimer la chère enfant comme s'il était son père, mais...
- Mais, quoi ?
- J'ai bien peur, quand je ne serai plus là...
- Comment ! quand vous ne serez plus là ? avez-vous quitté Monnikendam pour n'y plus retourner ?
.- Si fait, au contraire, mon ami, et je vais repartir sans retard ; soyez tranquille. Mais nous ne sommes pas immortels, et si par hasard je mourais, nos pauvres enfants...
- N'auraient-ils pas chacun son parrain, qui l'aime comme s'il était son père ; n'auraient-ils pas le bourguemestre Van Clief, l'ingénieur Van Brock, le révérend Van Cabel, le docteur Van Holstentius, etc., etc., etc. ?
- Hélas ! répondit la Buchold, je sais, par ce qui m'est arrivé avec vous- même, quel fonds on peut faire sur les promesses des hommes, il y avait plus de promesses vaines que de réalité dans ces engagements pris par nos illustres protecteurs ; de sorte qu'aujourd'hui, mon cher ami, sans votre compère Simon Van Groot, le gardien du port de Monnikendam, je ne sais pas ce que nous deviendrions, moi, les enfants que j'ai et ceux que je puis avoir encore.
- Comment, que vous pouvez avoir ? Quel quantième du mois sommes nous ?
- Le 28 octobre.
- Oui, mais quelle sainte ou quel saint préside à ce jour ?
- Deux grands saints, mon ami : saint Simon et saint Jude.
- Ah ! c'est trop fort, m'écriai-je, cette fois je n'en serai pas quitte à moins de deux jumeaux.
- En tout cas, dit la Buchold, ce seront les derniers.
- Comment cela ?
- Oui, ne voyez-vous pas comme je suis changée ?
En effet, je l'ai déjà dit, ce changement m'avait frappé à la première vue.
- C'est vrai, lui dis-je, qu'avez-vous ?
Elle sourit tristement.
- Croyez-vous, dit-elle, que des voyages pareils à ceux que je fais ne fatiguent pas ? Je suis venue vous voir quatre fois, sans reproche ; aller et retour, c'est quelque chose comme trente-deux mille lieues : quatre fois le tour du monde. Trouvez donc beaucoup de femmes qui en fassent autant pour... pour un scélérat d'homme qui ne songe qu'à la tromper ? Ah !
Et la Buchold versa quelques larmes.
Ce qu'elle me disait là était si vrai que j'en fus touché.
- Eh bien ! pourquoi venez-vous ? lui demandai-je.
- Mais parce que je vous aime, au bout du compte. Ah ! si vous étiez resté à Monnikendam, nous eussions pu être si heureux !
- Avec votre charmant caractère ! allons donc.
- Que voulez-vous ? Ce qui m'a gâté le caractère, c'est la jalousie. Et d'où venait cette jalousie ? De l'excès de mon amour. Voyons, aujourd'hui que cinq ans sont passés, direz-vous qu'ils étaient innocents vos voyages à Amsterdam, à Edam, à Stavorin.
Je me grattai l'oreille.
- Dame ! répondis-je, pour ne pas mentir...
- Vous voyez bien que vous étiez dans votre tort. Qu'avez-vous de pareil à me reprocher, à moi ?
- Rien, je le sais bien, tant que j'ai été là-bas.
- Mais il me semble que depuis...
- Depuis, cela s'embrouille un peu. Mais enfin, il n'y a encore rien à dire, puisque, pour moi du moins, les apparences y sont, et que les dates se rapportent, n'est-ce pas ?
- Jour pour jour.
Je poussai un soupir.
Ah ! le fait est, dis-je, avec un retour de philosophie, que l'on court bien loin pour trouver le bonheur...
- Oui, et que l'on trouve des femmes, n'est-ce pas ? Passons-les un peu en revue, vos femmes.
- Non, ce n'est pas la peine, je les connais ; aussi, j'en suis guéri du mariage, ou plutôt des mariages.
- Hélas ! mon pauvre ami, il n'y a que la maison, que le foyer, que les enfants, revenez, revenez, et vous trouverez tout cela, moins moi peut-être.
- Allons donc !
- Je sais ce que je dis, fit-elle en secouant la tête et en poussant un soupir. Mais je mourrais tranquille si j'avais l'espérance qu'à défaut de mère, mes pauvres enfants...
- C'est bon, c'est bon... ne nous attendrissons pas ; on verra à tout cela ; retournez là-bas.
- Il le faut bien.
- Et annoncez-moi.
- Oh ! vraiment ?
- Un instant, je ne m'engage pas. Je ferai ce que je pourrai, voilà tout.
- Adieu ! je pars dans cette espérance.
- Partez, chère amie. Qui vivra verra.
- Oui, qui vivra... Adieu.
Et la Buchold m'embrassa une dernière fois, poussa un soupir et sortit.
Cette apparition de la Buchold m'avait laissé une toute autre impression que les apparitions précédentes. D'ailleurs, comme je le lui avais dit : la comparaison avec les femmes hollandaises des femmes chingulaises, espagnoles, malabares et chinoises, n'était pas à l'avantage de ces dernières ; il n'y avait donc que la pauvre Schimindra qui pouvait contrebalancer l'influence européenne ; mais, vous comprenez, elle avait contre elle l'histoire de ce misérable singe !..
Enfin, tant il y a que je ne pensai plus qu'à une chose, ce fut de mettre ordre à mes affaires et de retourner en Europe.
Mais, avant de partir, mon premier soin fut d'assurer le sort de Schimindra.
Je lui laissai mon exploitation de cigares, qui était en plein rapport, et le reste de mon bézoard, qui était écorné, c'est vrai, mais qui, tout écorné qu'il était, valait bien deux ou trois mille roupies, et cela d'autant plus incontestablement qu'il avait été éprouvé.
Quant à Vanly-Tching, elle avait disparu emportant sa cassette et, pendant les cinq mois que je demeurai encore à Bidondo, nul n'en entendit parler.
Enfin, le 15 février 1829, six ans environ après mon arrivée dans l'Inde, je quittai Bidondo après avoir réalisé une somme de quarante-cinq mille francs, que mon correspondant chinois encaissa, me donnant en échange d'excellentes valeurs sur les premières maisons d'Amsterdam.
La traversée fut longue à cause des calmes que nous trouvâmes sous l'équateur. Six mois après mon départ de Manille, on signala le cap Finistère, puis nous doublâmes Cherbourg, puis nous entrâmes dans la Manche, puis enfin, le 18 août 1829, nous jetâmes l'ancre dans le port de Rotterdam.
Je n'avais aucun mobile pour faire séjour ; je pris donc le même jour la voiture d'Amsterdam, puis, arrivé à Amsterdam, un bateau qui devait me conduire à Monnikendam.
C'était justement celui de mon ami le pêcheur qui, six ans et demi auparavant, m'avait conduit à bord du Jean de Witt, à qui je n'avais pas pu payer mon passage, et qui n'avait pas moins promis de boire à ma santé, promesse qu'il avait religieusement tenue.
Cette fois, au lieu d'un sac de cailloux, j'avais dans ma poche un portefeuille renfermant quarante-cinq bonnes mille livres.
De sorte qu'en débarquant à Monnikendam, comme je lui devais non seulement le dernier passage, mais encore le premier, avec les intérêts et les intérêts des intérêts pendant six ans, je lui donnai vingt-cinq florins, ce qui était un denier comme il n'en avait pas touché depuis longtemps.
Puis je m'acheminai vers ma maison.
A la porte, je vis de loin une nourrice en deuil, qui allaitait deux nourrissons.
Je compris tout.
J'entrai dans la salle basse, où se trouvaient mes trois fils et ma fille.
Les trois garçons s'enfuirent en me voyant.
Quant à la fille, comme elle ne marchait pas encore toute seule, elle fut bien obligée de rester.
Je compris que je n'étais pour ces pauvres innocents qu'un étranger ; je pris dans mes bras ma petite Marguerite, qui jetait les hauts cris, et je revins vers la porte afin de me faire reconnaître à quelque voisin.
Justement Simon Van Groot ayant appris qu'un étranger était arrivé et s'était dirigé vers la maison de la Buchold, était accouru, se doutant de la vérité, et il arrivait, ayant rallié les trois enfants qui fuyaient, plus la nourrice et les deux nourrissons.
En un instant tout fut éclairci.
- Et la pauvre Buchold ! demandai-je.
- Tu arrives deux mois trop tard, mon cher Olifus, répondit Simon Van Groot, la Buchold est morte en donnant le jour à tes deux jumeaux.
- Oui, Simon et Jude.
- Tu l'as dit. En ton absence, j'ai eu soin de la famille. Les créanciers avaient vendu la maison et je l'ai rachetée ; ils avaient vendu les meubles, je les ai rachetés. Je savais bien que tu reviendrais un jour, et je voulais, plus les enfants, que tu retrouvasses les choses dans l'état où tu les avais laissées.
- Merci, Van Groot.
- Il n'y a que notre pauvre Buchold !...
- Que veux-tu ? Simon, nous sommes tous mortels.
- Hélas ! tu n'en retrouveras jamais une pareille, Olifus.
- C'est probable.
Nous nous embrassâmes en pleurant, Van Groot et moi, puis nous réglâmes nos comptes.
Je lui remboursai le prix de la maison et des meubles, que je gardai pour la part de Marguerite.
Puis je plaçai six mille francs sur la tête de chaque garçon, me réservant les intérêts jusqu'à leur majorité.
Enfin je conservai neuf mille francs pour moi, afin de n’être jamais à charge à personne et de n'avoir qu'à fouiller à ma poche pour en tirer mon carafon de tafia, de rhum et de rack.
- Et vous n'avez jamais revu la Buchold ? lui demandai-je.
- Si fait, une fois. Elle est venue me raconter que j'étais débarrassé d'elle pour toujours, attendu qu'elle venait de se remarier avec Simon Van Groot, qu'on avait enterré la veille, et qui avait demandé, le vieux coquin, à être inhumé près d'elle. De sorte, ajouta le père Olifus en vidant son dernier carafon de rack, que j'en suis débarrassé pour ce monde et pour l'autre. Je l'espère, du moins.
Sur quoi, le père Olifus éclata d'un rire qui lui était tout particulier, et se laissa couler sous la table, d'où presque aussitôt sortit un ronflement qui ne nous laissa aucun doute sur la sérénité du sommeil auquel ce coeur pur et sans remords venait de se livrer.
Au même moment, la porte s'ouvrit ; je tournai la tête, et une voix douce et harmonieuse se fit entendre.
Cette voix, c'était celle de Marguerite, qui apparaissait sur le seuil de la chambre, une lampe à la main.
- Il est temps, messieurs, que vous alliez vous reposer, dit-elle. Je vais vous conduire à votre chambre. Mon pauvre père vous a bien fatigués, n'est- ce pas, avec ses histoires ? mais il faut avoir quelque indulgence pour lui. Il est resté six ans dans la maison des aliénés de Horn, du vivant de notre pauvre mère. Il n'en est pas sorti entièrement guéri. Ce sont des lubies et des contes bleus qui lui travaillent le cerveau, surtout lorsqu'il fait abus de liqueurs fortes, ce qui lui arrive souvent. Mais, comme toujours, sa raison reviendra en s'éveillant, et il oubliera ses voyages aux Indes orientales, voyages qui n'ont jamais existé que dans son imagination.
Nous allâmes nous coucher sur cette explication, qui nous parut infiniment plus probable que tout ce que nous avait raconté le père Jérôme-François Olifus.
Le lendemain, nous demandâmes à le voir pour lui faire nos adieux. Mais on nous dit qu'au point du jour il était parti pour conduire un voyageur à Stavorin.
De sorte que nous quittâmes Monnikendam sans savoir laquelle nous avait menti, de la vieille bouche édentée du père Olifus ou de la fraîche et jolie bouche de sa fille Marguerite.
Cependant une chose nous prévint contre la belle hôtesse du Bonhomme Tropique, c'est que la veille elle ne nous avait parlé que par signes, et que tout à coup, le lendemain, elle s'était trouvé parler français pour nous donner l'explication que nous venons de consigner ci-dessus.
C'est aux personnes qui ont été dans l'Inde à juger si le père Olifus a réellement vu les pays qu'il a décrits, et que d'après lui nous avons décrits à notre tour, ou s'il a tout simplement vu Madagascar, Ceylan, Négombo, Goa, Calicut, Manille et Bidondo, de la maison des aliénés de Horn.

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1998-2010
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