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Chapitre IV
L'envoyé du Conseil-Suprême

Il était onze heures et demi, lorsque Samuel Gelb frappa à la porte d'une maison de la rue Servandoni, derrière Saint-Sulpice.
Le rendez-vous lui avait été indiqué pour onze heures précises ; mais Samuel s'était mis exprès un peu en retard, ne voulant pas attendre, ou, qui sait ? voulant être attendu. La maison où il frappait n'avait dans son extérieur rien de particulier qui la dénonçât à l'attention : c'était, comme toutes ses voisines, une maison silencieuse, retirée, indifférente à la rue et morte au bruit.
La porte s'entr'ouvrit. Samuel se glissa et la referma vite. Il murmurait à part lui :
- J'entre comme un voleur ; je puis sortir plus qu'un roi.
Le portier sortit de sa loge et l'arrêta.
- Qui demandez-vous ?
- Ceux qui ont monté quarante-deux marches, répondit Samuel.
Le portier rentra dans sa loge et parut satisfait de cette bizarre réponse. Ce ne devait pas être un portier !
Samuel traversa un couloir, prit un couloir à droite, et monta un premier étage de vingt et une marches.
Là, un homme s'approcha de lui.
- France ?... lui dit-il à l'oreille.
- Et Allemagne, répondit Samuel tout bas.
L'homme s'écarta, et Samuel monta encore vingt et une marches.
Il y avait devant lui une porte. Il l'ouvrit et entra dans une sorte d'antichambre où un autre homme vint à lui.
- Les peuples ?... dit l'homme à voix basse.
- Sont les rois, acheva Samuel.
Samuel fut alors introduit dans une salle très simplement meublée.
Il n'y avait profusion que de tapisseries. Murs, planchers, fenêtres, plafond, tout était tendu et couvert d'épaisses étoffes, destinées évidemment à éteindre le bruit et à emprisonner les voix. Il va sans dire que les portes étaient doubles et que les volets étaient clos.
Ni lampes ni bougies. La salle n'était éclairée que par le feu de la cheminée, dont les grands reflets vacillants semblaient, par moments, faire vivre et remuer les figures des tapisseries.
Six hommes étaient assis, attendant Samuel.
Cinq avaient le visage découvert, le sixième était masqué ; et, comme si son masque ne suffisait pas encore à le cacher, il se tenait, enveloppé d'un long manteau, dans un angle où la lueur du foyer ne pouvait l'atteindre.
Les fauteuils des assistants étaient tournés du côté de l'homme masqué, comme vers le président naturel de l'assemblée.
à l'entrée de Samuel, tous se levèrent, excepté l'homme masqué.
Quand Samuel eut salué, son regard alla droit à l'étranger.
C'est à lui qu'il allait avoir affaire. C'était avec lui qu'il allait lutter.
- Vous êtes, lui dit-il, le membre du Conseil-Suprême qui nous fait l'honneur d'assister à notre séance ?
L'homme masqué fit signe que oui. Samuel eut une expression de joie et d'amertume. Il prit place à côté des autres, et reprit :
- Notre hôte a sans doute ses lettres de crédit.
Sans prononcer un mot, l'homme masqué lui tendit d'une main gantée de noir une lettre cachetée.
Samuel s'approcha de la flamme et examina le cachet.
- Oui, dit-il, c'est bien le sceau du conseil.
Il rompit l'enveloppe et déploya la lettre.
- Ce sont bien les signes et signatures.
Il lut alors tout haut :


Nos frères de Paris admettront à toutes leurs réunions le porteur du présent écrit auquel nous confions pleinement tous nos pouvoirs. Il aura voix prépondérante dans les délibérations. Il gardera toujours son masque et ne parlera jamais. Il répondra aux questions par signes affirmatifs ou négatifs ou par le silence. Car nous voulons que son individualité disparaisse ou s'absorbe dans notre pensée collective ; ce ne sera pas un homme, mais le conseil invisible et muet ; il cessera d'être lui pour ne plus être que nous.
- C'est bien, dit Samuel en refermant la lettre, qu'il mit dans sa poche. Messieurs, la séance est ouverte.
Tout le monde se rassit.
- Puisque le Conseil-Suprême nous entend cette fois, dit Samuel Gelb, il sera utile, je crois, de commencer par exposer où nous en sommes en France, et de récapituler nos espérances et nos progrès.
L'homme masqué fit un signe d'approbation. Samuel reprit :
- Depuis quatorze ans, depuis la chute de l'empereur Napoléon, l'Union de Vertu a changé, non d'idées mais de but. Le despote est tombé, elle combat le despotisme. Les rois n'avaient promis la liberté à l'Allemagne que pour la soulever contre Napoléon : Napoléon mort, ils ont imité ce qu'ils lui reprochaient, et ils se sont faits la monnaie de sa tyrannie. Notre chère nation, maintenue autrefois par un géant, a-t-elle gagné beaucoup à être garrottée par les trames subtiles de ces royautés de Lilliput ? L'oppression n'en est que plus humiliante. L'union de la force nous a délivrés de la domination étrangère ; c'est à l'Union de Vertu à briser le joug intérieur. Après l'indépendance, nous voulons la liberté.
- Nous l'aurons ! s'écria un des cinq.
- Voici du moins ce que nous avons déjà fait pour cela, reprit Samuel. Le cœur de la démocratie bat à Paris. Il fallait donc que l'Union fût en rapport direct et incessant avec Paris. Il fallait qu'un groupe intelligent et sûr se tînt entre les deux pays, tendant une main au Conseil-Suprême d'Allemagne, et l'autre aux ventes du Carbonarisme de France. C'est le rôle qu'on accepté les cinq amis qui, à mon retour de l'Inde, il y a deux ans, ont bien voulu m'associer à eux. Et jamais, je l'affirme, propagande ne fut plus vaillante et plus dévouée que la leur.
- Nous avons fait notre devoir, dit un des assistants.
- Maintenant, monsieur, reprit Samuel, s'adressant plus directement à son auditeur muet, vous qui peut-être arrivez du dehors, voulez-vous savoir où en est ici la situation ? Eh bien ! le dénouement approche. Le ministère à demi libéral qui gouverne la France va tomber tout à l'heure. En voulant réconcilier deux idées, il s'est brouillé avec toutes deux. Le roi et les chambres vont l'attaquer à l'envi parce qu'il les empêche de se battre. M. de Polignac vient d'arriver de Londres, et est en train de machiner un ministère. M. de Polignac, vous le savez, est un de ces amis terribles des monarchies qui décident l'explosion par l'excès de la compression. Son avènement sera la déclaration de guerre du passé à l'avenir.
- Oui ! mais qui empochera la victoire ? dit un des assistants en secouant la tête.
- Qui ? nous ! reprit Samuel avec force. Je sais bien que les hommes qui représentent dans la politique actuelle l'avenir et la liberté sont, la plupart, sinon tous, des ambitieux médiocres dont tout l'orgueil tient à l'aise dans le maroquin d'un portefeuille. Je sais bien qu'ils veulent tout simplement la révolution de 1688, et remplacer Charles X par le duc d'Orléans. Oui, c'est pour cela seulement que ces grands politiques soulèveraient les peuples et mettraient l'Europe sens dessus dessous : pour substituer à un principe pur un principe bâtard ! Mais que leur importe ? Ils seraient peut-être ministres, et alors le sang versé dans les rues leur semblerait payé.
- Eh bien ! reprit celui qui avait interrompu.
- Eh bien ! fit en ricanant Samuel, l'idée supérieure qui est en nous, en moi, doit nous le dire : ces immenses calculateurs auront compté sans leur hôte. Les ambitions seront débordées par les idées. Pour passionner le peuple, ils seront obligés d'invoquer la liberté et la démocratie. Le peuple les prendra au mot. Il est plus facile de lancer un mouvement que de l'arrêter. Une fois la barre du droit divin ôtée de dessous les roues de la France, il faudra rouler la pente jusqu'à la république. Ou l'autorité absolue ou la liberté absolue. Cette noble nation ne se résignera jamais au petit ni au médiocre : elle est faite pour le grand. On ira tout de suite et tout d'une haleine jusqu'au bout, jusqu'au but. Ah ! ah ! ah ! les honorables taupes politiques qui creusent leurs mines sous leurs trônes, et ne se doutent pas du prodigieux éboulement qu'elles préparent ; le trône s'engloutira tout entier, et qu'elles prennent garde qu'il ne les entraîne dans le trou !
Samuel s'arrêta dans son accès d'ironique gaieté, et conclut gravement :
- Voilà où nous en sommes, voilà ce que nous espérons, voilà ce que nous avons fait. Qu'il nous soit permis de demander au mystérieux témoin qui nous écoute si l'Union de Vertu sera contente.
- Oui, répondit l'homme masqué d'un signe de tête.
- Ainsi, nous avons bien rempli les intentions du Conseil-Suprême ?
- Oui.
Un sourire de satisfaction effleura les lèvres minces de Samuel. Il pensait aux promesses qu'il avait faites à Frédérique. Il allait pouvoir les tenir. Il fit une pause, comme pour prendre haleine, et ajouta :
- Cela étant, Daniel, l'un de nous peut-il adresser à l'envoyé du Conseil quelques respectueuses questions ?
L'envoyé fit un mouvement de tête qui voulait dire : « Parlez. »
- Parle, Daniel, dit Samuel Gelb.
Daniel prit en effet la parole.
- Ce que nous avons fait en France pour l'Union, dit-il, le résultat et le progrès de la révolution peuvent le dire. Samuel Gelb pense que si chacun de nous a le devoir d'être humble pour soi, il n'a pas le droit d'être modeste pour ses frères. Or, ceux-ci ont rendu, rendent et rendront assez de services pour espérer quelque reconnaissance. Cependant, sont-ils récompensés ? Bien qu'ils aient tous, dans l'Union, des degrés élevés, aucun n'y a le premier degré, aucun n'est du Conseil supérieur, aucun n'y participe à la direction de l'ensemble, aucun n'y voit clair dans l'œuvre qu'il fait. Est-ce juste ? est-ce prudent ? Dans un temps comme celui-ci, où le feu peut prendre à la politique d'un moment à l'autre, et où toute la vieille société peut sauter brusquement, est-ce une bonne organisation de n'avoir pas sur le lieu même, dans la poudrière, à Paris, quelqu'un qui puisse agir en un moment donné sans avoir à en référer à deux cents lieues ? La situation fiévreuse et haletante comporte-t-elle ces lenteurs ? Pendant qu'on irait chercher le mot d'ordre à Berlin, on perdrait le temps de faire quatre révolutions européennes. L'Union dispose de légions et de sommes considérables. Où pourrait-on mieux les employer qu'à Paris ? Dans l'intérêt même de la cause, nous devons le demander à l'hôte tout-puissant qui nous écoute : ne serait-il pas de toute nécessité qu'au moins un de nous fût du Conseil-Suprême !
L'homme masqué ne bougea pas.
Samuel Gelb retint un mouvement de dépit.
- Il me semblait pourtant, dit-il après un instant d'attente, que notre demande était assez modérée et assez légitime pour mériter au moins l'honneur d'un refus.
Un des cinq intervint.
- C'est que nos chefs, dit-il, croient peut-être avoir précisément réalisé d'avance le vœu de Samuel Gelb et le nôtre, en envoyant à Paris le membre du Conseil-Suprême ici présent pour répondre à cette nécessité qu'on vient de signaler ?
Cette fois, l'homme masqué fit un signe affirmatif.
Samuel se mordit les lèvres.
- Soit, dit-il. Nous avons avec nous quelqu'un qui aura le droit d'agir, et, en cas d'alerte, nous n'aurons plus à aller chercher le mot d'ordre en Allemagne. La question d'utilité est résolue, reste la question de reconnaissance. Je demande pardon à notre glorieux hôte si j'insiste, mais il ne s'agit pas de moi. Il s'agit de ceux qui m'ont choisi pour conseiller et dont je ne puis sacrifier l'importance. Nous tous qui sommes placés aux avant-gardes de l'action, et qui tenons la mèche allumée auprès du baril de poudre, nous comptera-t-on enfin pour quelque chose ? Le jour où il y aura une place vacante dans le Conseil, la donnera-t-on à l'un de nous ?
Le silence de l'homme masqué ne répondit que : « Peut-être. »
- Ne croyez pas que je parle pour moi ! reprit vivement Samuel. La preuve en est que je désigne Daniel comme le plus capable et le plus méritant.
- Et moi, dit Daniel, je désigne Samuel Gelb.
- Et nous aussi ! s'écrièrent les quatre autres d'une seule voix.
- Merci, frères, dit Samuel Gelb. Maintenant, je puis parler pour moi, car ce n'est plus pour moi que je parlerai, mais pour votre élu, pour notre cause, pour votre volonté personnifiée en moi. Eh bien ! je le demande à celui qui nous écoute et qui se tait : y aurait-il un obstacle à ce que, le cas échéant, je fusse appelé à faire partie du Conseil ?
- Oui, répondit le geste de l'homme masqué.
- Oui ? répondit Samuel, dont la bouche eut une contraction aussitôt réprimée. Et nous est-il même interdit de demander pourquoi ?
- Non.
- Je le demanderai donc, reprit Samuel. C'est sans doute parce que je n'ai pas la vue assez haute, le cœur assez fort, la volonté assez hardie ?
- Non, répondit le geste impassible de l'homme masqué.
- Est-ce alors parce qu'on croit qu'il me manque ce mérite vulgaire appelé la conscience, la probité, la vertu, que sais-je ?
- Non.
- Je vous prie de remarquer, objecta Samuel avec un peu d'impatience et de dépit, que nous ne causons pas à armes égales. Le silence vous donne l'avantage de la position. Je suis obligé, avec un interlocuteur muet, de chercher, de trouver des raisons contre moi-même. Pour peu que cela continue, nous risquons de répéter la scène de Molière où le maître laisse le valet s'accuser de toutes les fautes et de tous les défauts avant de lui dire le grief qu'il a contre lui. Je continue donc la litanie de mes crimes. Voyons : celui qui me rend incapable d'être membre du Conseil, est-ce de n'avoir pas ce qui éblouit toujours la foule et parfois même les hommes supérieurs, ce qui, je l'avoue à ma honte, m'a produit quelquefois de l'effet, à moi qui parle, à moi, athée de tous les droits divins... Ce qui me manque, est-ce un nom illustre, une naissance souveraine ? Suis-je réprouvé pour n'appartenir à aucune maison régnante, ni même à aucune maison particulière ?
L'inconnu garda le silence.
- Vous ne dites ni oui ni non. C'est me dire qu'en effet, si j'étais prince, j'aurais de meilleures chances, mais qu'il est des avantages qui pourraient suppléer celui-là ?
- Oui.
- Lesquels ? demanda Samuel. En fait de privilèges sociaux, je n'en vois guère qu'un qui puisse entrer en balance avec la naissance : l'argent. Faudrait-il qu'étant bâtard, je fusse au moins riche ?
- Oui, dit le hochement de tête de l'homme masqué.
- Ah ! voilà donc, repartit Samuel d'un ton de sarcasme amer, le fond de la pensée de ceux qui prétendent former la liberté ! Ils n'estiment que l'aristocratie, celle du nom ou celle de la richesse ! Pour eux, tout se traduit en une syllabe ou en un écu !
L'homme masqué secoua la tête, comme s'il n'était pas compris.
- Tu as tort, Samuel, interrompit celui des assistants qui avait déjà défendu les intentions du Conseil. Il est dans l'intérêt de la cause que les chefs aient de quoi agir largement sur les hommes. Les hommes sont encore sujets des hautes naissances ; les syllabes et les chiffres agissent toujours sur ces vieux enfants ; le Conseil n'a pas fait cet état de choses, mais il est obligé de s'en servir, fût-ce pour le détruire. Ce n'est pas le Conseil qui aime l'or, c'est l'humanité. Si nous voulons la diriger, prenons-la par ses goûts. Si nous voulons soulever le vase, prenons-le par l'anse. Toi qui t'appelles Samuel Gelb, tu vaux assurément mille fois plus que bien des sots chargés de leurs vieux noms comme de reliques ; est-ce la faute du Conseil si le vulgaire court plutôt à l'éclat extérieur qu'au génie secret, à l'habit qu'à l'esprit ? N'as-tu pas convenu toit-même que tu avais été par moments ému en songeant au rang suprême de ceux auxquels tu obéissais ? Reconnais donc un penchant dont tu n'as pu te défendre, toi qui te dis fort. Il faut tenir les hommes par les moyens humains. Outre l'utilité matérielle, l'argent a une influence morale. Nos ennemis en ont et en répandent. Employons contre eux leurs propres armes. La bataille gagnée, qu'importe comment nous l'aurons gagnée ?
- Je pense comme toi, Auguste, ajouta Daniel, et dans l'état présent des choses, je ne trouve pas l'Union diminuée, je la trouve agrandie, au contraire, parce qu'elle s'efforce d'attirer en elle et de concentrer le plus de noblesse et de richesse possible. L'Union, comme je la comprends, c'est l'absorption du passé dans l'avenir, c'est la conquête de tout ce qui est force de vie par la propagande libérale. Eh bien ! puisque le rang et la richesse, à tort ou à raison, sont encore des forces, usons-en et usons-les à notre profit. Soyons comme l'Océan qui absorbera toutes les puissances humaines. L'Union, supérieure par l'idée à toutes les fortunes et à toutes les noblesses du monde, doit pourtant avoir de grands noms et de grands biens pour dominer les riches par l'illustration et les pauvres par l'assistance. Elle doit être le clergé de la liberté.
Le personnage masqué secoua plusieurs fois la tête en signe d'approbation.
Samuel fut-il piqué de voir que le témoin taciturne s'entendait mieux avec ses amis qu'avec lui ? Le fait est qu'il répliqua plus brusquement qu'avant :
- L'or ! Vous parlez tous de l'or comme si l'or était une chose bien précieuse et bien difficile à approcher ! Mais si j'en voulais, de l'or, est-ce que vous croyez que je n'en aurais pas autant que je voudrais ? Belle malice de s'enrichir, et comme c'est bien là un but digne d'un homme ! Croyez-vous, par exemple, qu'on me marchanderait si j'allais vendre les secrets de l'Union ?
Un mouvement de surprise et de répulsion se fit parmi les assistants. Samuel s'en aperçut et reprit avec fierté :
- Rassurez-vous, et ne vous croyez pas déjà livrés. On me connaît trop, je pense, pour me soupçonner d'une telle pensée. D'ailleurs, ceux qui font cela ne le disent pas. Mais je voulais vous montrer qu'à la rigueur la richesse n'est pas une chose si impossible qu'il n'existe diverses manières de l'acquérir. Et puis, je voulais prouver à ceux qui semblent se défier de nous qu'ils sont pourtant forcés de se fier à nous, et qu'en ne nous disant pas assez de leurs secrets, il nous en ont dit trop. Maintenant, résumons-nous. Voilà donc qui est entendu, et, bien que cela me retarde un peu, je suis aise de le savoir : Tel que je suis désigné par les cinq ici présents, après les services que j'ai rendus à la cause, quelque service que je lui rende encore, tel que je suis, je ne peux pas prétendre à être de ceux qui dirigent ?
- Non, répondit énergiquement le signe de l'homme masqué.
- Mais ne pouvant avoir un grand nom, puisque je n'ai pas même de nom, si je mettais au service de l'Union et de la patrie des hommes libres une grande richesse, je pourrais aspirer à ce droit, à ce devoir ?
- Oui.
- Eh bien ! s'écria Samuel d'un accent profond, c'est vous qui le voulez, je serai riche.

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1998-2010
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