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Chapitre LVIII
La bague de Maria et le poignard d'Aïssa.

Le pied de Mothril avait effleuré bien légèrement la terre lorsque dona Maria crut entendre remuer dans la chambre. Mothril avait ôté ses sandales pour venir jusqu'à la tapisserie écouter ce qui se tramait contre lui.
La révélation du secret d'Aïssa l'avait pénétré de crainte et d'horreur. Que dona Maria eût pour lui de la haine, il n'en doutait pas ; qu'elle cherchât à le perdre en dénigrant sa politique, en dévoilant son ambition, le More en était certain ; mais ce qu'il ne pouvait supporter, c'était l'idée que don Pedro devînt indifférent pour Aïssa.
Aïssa, fiancée à Mauléon, Aïssa, déchue de sa pureté précieuse, devenait pour don Pedro un objet sans charme et sans valeur : et ne plus tenir don Pedro par l'amour d'Aïssa, c'était perdre le lien qui retient un coursier indompté.
Encore quelques moments et tout cet échafaudage si péniblement élevé s'écroulait. – Aïssa, sûre d'être protégée, venait avec sa compagne révéler à don Pedro le secret tout entier...Alors dona Maria reprenait tous ses droits, alors Aïssa perdait les siens, alors Mothril, honteux, honni, chassé, maltraité comme un misérable faussaire, prenait, avec ses compatriotes, le funèbre chemin de l'exil ; en admettant qu'il ne fût pas poussé tout d'abord dans la tombe par cet ouragan de la colère royale. Voilà donc ce qui se déroula aux yeux du More pendant que Maria parlait à don Pedro, et que ces paroles tombaient une à une comme des gouttes de plomb fondu sur la plaie vive de cet ambitieux.
Haletant, éperdu, tantôt froid comme le marbre, tantôt brûlant comme le souffre en ébullition, Mothril se demandait pourquoi, la main sur un poignard fidèle, il ne tuait pas d'un seul coup le maître qui écoutait et la révélatrice qui parlait ; c'est-à-dire pourquoi il ne sauvait pas sa vie et sa cause.
Si don Pedro eût eu près de lui un autre ange gardien que Maria, cet ange n'eût pas manqué de l'avertir en ce moment qu'il courait un danger terrible.
Tout à coup le front de Mothril s'éclaircit, la sueur en tomba moins abondante, moins glacée. Deux mots de Maria lui avaient ouvert la voie du salut en même temps que l'idée du crime.
Il la laissa donc achever tranquillement ; elle put dire toute sa pensée à don Pedro, et ce n'est qu'aux derniers mots de l'entretien, alors qu'il n'avait plus rien à apprendre, qu'il sortit de sa cachette, et que la tapisserie trembla derrière lui, comme le remarquèrent don Pedro et dona Maria.
Mothril une fois dehors s'arrêta l'espace de deux secondes, et dit :
- Elle mettra, par le couloir secret, trois fois le temps que je vais mettre à entrer dans sa chambre par le patio.
- Hafiz, dit-il en frappant sur l'épaule du jeune tigre qui épiait chacun de ses ordres, cours au passage de la galerie, arrête dona Maria quand elle se présentera, demande lui pardon comme si le repentir t'égarait, accuse-moi si tu veux, avoue, révèle... fais tout ce que tu voudras, mais retiens-la cinq minutes avant qu'elle n'entre dans la galerie.
- Bien, maître, dit Hafiz ; et, grimpant comme un lézard sur la colonne de bois du patio, il entra dans le passage où déjà se faisait entendre le pas de dona Maria qui s'approchait.
Mothril pendant ce temps fit le tour du jardin, monta l'escalier de la galerie, et pénétra chez dona Maria.
D'une main il tenait son poignard, de l'autre un petit flacon d'or qu'il venait de prendre dans un des plis de sa large ceinture.
Lorsqu'il entra, la cire à demi consumée coulait en larges nappes sur le flambeau, Aïssa, les yeux fermés, dormait doucement sur les coussins. De ses lèvres entrouvertes s'exhalait un nom cher avec le parfum de son haleine.
- Elle d'abord, dit le More avec un sombre regard... morte, elle n'avouera pas ce que dona Maria veut lui faire dire...
- Oh !... frapper mon enfant, murmura-t-il... mon enfant qui dort... elle à qui peut-être, si je ne me presse pas d'avoir peur, le Très-Haut réserve une couronne, attendons !... qu'elle meure seulement la dernière, que je me réserve encore un moment d'espoir.
Il s'avança aussitôt vers la table, prit la coupe d'argent à demi pleine encore de la boisson préparée par Maria elle-même, et y versa tout entier le contenu du flacon d'or.
- Maria, dit-il tout bas, avec un affreux sourire, ce poison que je te verse ne vaut peut-être pas celui que tu caches dans ta bague, mais nous autres pauvres Mores, nous sommes des barbares, excuse-moi : si mon breuvage ne te plaît pas, je t'offrirai mon poignard.
Il achevait à peine quand la voix suppliante d'Hafiz arriva jusqu'à son oreille avec la voix plus animée de dona Maria retenue dans le couloir secret...
- Par pitié ! disait le monstre enfant, pardonnez à ma jeunesse, j'ignorais ce que mon maître me faisait faire.
- Je verrai plus tard, répondit Maria, laisse-moi ! Je saurai m'enquérir et démêler dans les témoignages qu'on portera sur toi la vérité que tu me caches.
Mothril s'alla blottir aussitôt derrière la tapisserie qui masquait la fenêtre. Placé là, il pouvait tout voir, tout entendre, il pouvait s'élancer sur Maria lorsqu'elle voudrait sortir.
Hafiz congédié par elle disparut lentement sous la sombre galerie, Alors on eût pu voir Maria dans son appartement, et contempler avec une indéfinissable émotion Aïssa plongée dans le sommeil.
- J'ai profané aux yeux d'un homme, dit-elle, ton doux secret d'amour, j'ai noirci ta beauté de colombe, mais le tort que je t'ai fait sera bien réparé, pauvre enfant ! tu dors sous ma protection... dors ! cette minute encore je la laisse à tes doux rêves !
Elle fit un pas vers Aïssa. Mothril serra des doigts son large poignard.
Mais le mouvement que venait de faire dona Maria la rapprocha de la table, où elle vit sa coupe d'argent et la liqueur vermeille qui appelait ses lèvres arides.
Elle prit cette coupe et but à longs traits.
La dernière gorgée touchait encore à son palais que déjà le froid dévorant de la mort avait touché son coeur.
Elle vacilla, ses yeux devinrent fixes, elle appuya ses deux mains sur sa poitrine, et devinant dans cette inconcevable douleur une nouvelle calamité, une nouvelle trahison peut-être, elle regarda autour d'elle avec anxiété, avec effroi, comme pour interroger la solitude et le sommeil, ces deux témoins muets de sa souffrance.
La douleur éclata dans son sein comme un incendie, Maria rougit, ses mains se crispèrent, il lui sembla que son coeur remontait à sa gorge, et elle ouvrit la bouche pour pousser un cri.
Prompt comme l'éclair, Mothril prévint ce cri par une étreinte mortelle.
Maria se débattit en vain dans ses bras, elle mordit en vain les doigts du Sarrasin qui lui fermaient la bouche.
Mothril, tandis qu'il retenait ainsi les bras et la voix de l'infortunée, éteignit la bougie, et Maria tomba en même temps dans les ténèbres et dans la mort.
Ses pieds battirent quelques secondes le sol, avec un bruit qui réveilla la jeune Moresque sa compagne.
Aïssa se leva, et voulant marcher dans ces ténèbres trébucha sur le cadavre.
Elle tomba dans les bras de Mothril, qui lui saisit les mains et la renversa près de Maria en lui déchirant l'épaule d'un coup de poignard.
Inondée de sang, Aïssa s'évanouit. Alors, Mothril arracha du doigt de Maria l'anneau dans lequel était renfermé le poison.
Il vida cet anneau dans la coupe d'argent, et le remit au doigt de sa victime.
Puis, teignant dans le sang le poignard que la jeune Moresque portait à sa ceinture, il le déposa près de Maria, en sorte que ses doigts y touchaient.
Ce mystère d'horreur s'accomplit en moins de temps qu'il n'en faut au serpent des Indes pour étouffer deux gazelles qu'il guettait jouant au soleil dans les herbes d'une savane. Mothril, pour que sa tâche fût accomplie en entier, n'avait plus qu'à se mettre à l'abri du soupçon.
Rien n'était plus facile. Il rentra dans le patio voisin comme s'il fût revenu d'une excursion de surveillance.
Il demanda aux serviteurs du roi si le roi était couché. On lui répondit qu'on voyait le roi se promener avec une sorte d'impatience dans sa galerie.
Mothril demanda ses coussins, ordonna qu'un serviteur lui fît lecture de quelques versets du Coran, et parut s'abandonner à un profond sommeil.
Hafiz, sans avoir pu consulter son maître, l'avait compris, grâce à son instinct. Il s'était mêlé aux gardes de don Pedro avec sa gravité accoutumée. Une demi-heure passa ainsi. Le plus grand silence régnait dans le palais.
Tout à coup un cri déchirant retentit au fond de la galerie royale, et la voix du roi fit entendre ces mots effrayants :
- Au secours ! au secours !
Chacun se précipita vers la galerie, les gardes avec leurs épées nues, les serviteurs avec la première arme qui leur tomba sous la main.
Mothril, se frottant les yeux et se redressant comme s'il eût encore été alourdi par le sommeil, demanda :
- Qu'y a-t-il ?
- Le roi ! le roi ! répondit la foule empressée.
Mothril se leva et marcha derrière les autres. Il vit s'avancer dans la même direction Hafiz qui, lui aussi, se frottait les yeux et semblait effaré de surprise.
On vit alors don Pedro, un flambeau à la main, sur le seuil de l'appartement de dona Maria. Il poussait de grands cris, il était pâle, et de temps en temps, se retournant vers la chambre, il redoublait ses gémissements et ses imprécations.
Mothril fendit la foule qui entourait, muette et tremblante, le prince à demi fou.
Dix flambeaux jetaient sur la galerie leur sanglante lueur.
- Voyez ! voyez ! cria don Pedro... Mortes ! mortes toutes deux !
- Mortes ! répéta la foule sourdement.
- Mortes ! dit Mothril ; qui, mortes, seigneur ?...
- Regarde, Sarrasin effronté ! dit le roi dont les cheveux se hérissaient sur sa tête.
Le More prit une torche des mains d'un soldat, il entra lentement dans la chambre, et recula ou feignit de reculer à l'aspect des deux cadavres et du sang qui teignait les dalles.
- Dona Maria ! dit-il... dona Aïssa ! s'écria-t-il... Allah !
La foule répéta en frissonnant : dona Maria ! dona Aïssa ! mortes !
Mothril s'agenouilla et considéra les deux victimes avec une attention douloureuse.
- Seigneur, dit-il à don Pedro qui chancelait et appuyait sa tête sur ses deux mains baignées de sueur... il y a eu ici un crime commis, veuillez faire retirer tout le monde.
Le roi ne répondit pas... Mothril fit un signe, tout le monde se retira lentement.
- Seigneur, répéta le More avec le même ton d'affectueuse insistance, il y a eu un crime commis.
- Scélérat ! s'écria don Pedro revenant à lui, je te revois ici, toi qui m'as trahi !...
- Mon seigneur souffre bien puisqu'il maltraite ainsi ses meilleurs amis, dit Mothril avec une inaltérable douceur.
- Maria !... Aïssa !.. répétait don Pedro en délire... mortes !
- Seigneur, je ne me plains pas, moi, dit Mothril.
- Toi ! te plaindre ! infâme ! Et de quoi te plaindrais-tu ?...
- De ce que je vois dans la main de dona Maria l'arme qui a versé le sang illustre de mes rois, tué la fille de mon maître si vénéré, du grand calife.
- C'est vrai, murmura don Pedro... le poignard est dans la main de dona Maria... mais elle-même... elle, dont les traits offrent un aspect si effrayant, dont l'oeil menace, dont les lèvres écument, elle, dona Maria, qui l'a tuée ?...
- Comment le saurai-je, seigneur, moi qui dormais, et qui entre ici après vous.
Et le Sarrasin, après avoir contemplé le visage livide de Maria, secoua la tête sans rien dire, seulement il examina curieusement la coupe encore à demi pleine.
- Du poison ! murmura-t-il.
Le roi se baissa sur le cadavre dont il saisit la main raidie avec une sombre terreur.
- Ah ! s'écria don Pedro, la bague est vide !
- La bague ? répéta Mothril en jouant la surprise ; quelle bague ?
- Oui, continua le roi, la bague au poison mortel... Ah ! regardez ! Maria s'est donné la mort ! fit le roi.. Maria que j'attendais, Maria qui pouvait encore espérer mon amour.
- Non, seigneur, je crois que vous vous trompez, dona Maria était jalouse, et savait depuis longtemps que votre coeur s'occupait d'une autre femme. Dona Maria, songez-y bien, seigneur, a dû être frappée d'épouvante et mortellement blessée dans son orgueil en voyant venir chez vous Aïssa que vous y appeliez. Sa colère passée, elle aura préféré la mort à l'abandon... d'ailleurs, elle ne mourait pas sans vengeance, et pour une Espagnole, se venger est un plaisir bien préférable à la vie.
Ce discours était d'une habile perfidie ; le ton de naïve confiance avec lequel il fut prononcé imposa un moment à don Pedro. Mais tout à coup il fut emporté par la douleur, par le ressentiment, et s'écria en saisissant le More à la gorge :
- Mothril, tu mens ! Mothril, tu te joues de moi. Tu attribues la mort de dona Maria au regret de mon abandon, tu ne sais donc pas, ou tu feins de ne pas savoir que je préférais à tout dona Maria, ma noble amie.
- Seigneur, vous ne me disiez pas cela l'autre jour, quand vous accusiez dona Maria de vous fatiguer.
- Ne me dis pas cela, maudit, en présence de ce cadavre !
- Seigneur, j'enchaînerai ma langue, je m'ôterai la vie avant de déplaire à mon roi, mais je voudrais calmer sa douleur, et j'y tâche en ami fidèle.
- Maria ! Aïssa ! dit don Pedro éperdu. Mon royaume pour racheter une heure de votre vie !
- Dieu fait bien ce qu'il fait, psalmodia lugubrement le More. Il m'a ôté la joie de mes vieux jours, la fleur de ma vie, la perle d'innocence qui enrichissait ma maison.
- Mécréant, s'écria don Pedro dont ces paroles, lancées à dessein, réveillaient l'égoïsme, et par conséquent la fureur, tu parles encore de la candeur et de l'innocence d'Aïssa, toi qui savais son amour pour le chevalier franc, toi qui savais son déshonneur.
- Moi, répliqua le More d'une voix étranglée... moi, je savais le déshonneur de dona Aïssa, Aïssa était déshonorée !.. Ah ! fit-il avec un rugissement de colère, qui pour être affecté n'était pas moins terrible, qui a dit cela ?
- Celle à qui ta haine ne portera plus préjudice, celle qui ne mentait pas, celle que la mort vient de m'enlever.
- Dona Maria ! fit le Sarrasin avec mépris, elle avait intérêt à le dire.. elle pouvait bien dire cela par amour, puisqu'elle est morte par amour, elle pouvait bien calomnier par vengeance puisqu'elle a tué par vengeance.
Don Pedro demeura silencieux, réfléchi, devant cette accusation si logique et si hardie.
- Si dona Aïssa n'était pas percée d'un coup de poignard, ajouta Mothril, on viendrait peut-être nous dire qu'elle a voulu assassiner dona Maria.
Ce dernier argument dépassait toutes les limites de l'audace. Don Pedro le prit pour s'en servir.
- Pourquoi non, dit-il... Dona Maria m'avait révélé le secret de ta moresque, celle-ci ne peut-elle pas s'être vengée sur la révélatrice.
- Fais attention, répondit Mothril, que la bague de dona Maria est vide... Or, qui l'a vidée sinon elle-même... Roi, tu es bien aveugle puisque tu ne vois pas, par la mort de ces deux femmes, que Maria t'avait trompé.
- Comment cela ? Elle devait m'apporter la preuve, m'amener Aïssa pour me répéter les paroles de Maria.
- Est-elle venue ?
- Elle est morte.
- Parce qu'il fallait prouver pour revenir, et qu'elle ne pouvait prouver.
Don Pedro, cette fois encore, baissa la tête, égaré dans cette obscurité terrible.
- La vérité ! murmura-t-il, qui me dira la vérité ?
- Je te la dis.
- Toi, s'écria le roi avec un redoublement de haine ! tu es un monstre qui persécutas dona Maria, qui voulus me la faire abandonner, c'est toi qui as causé sa mort... Eh bien ! tu disparaîtras de mes Etats, tu prendras la route de l'exil, voilà la seule grâce que je te puisse faire.
- Silence, seigneur ! un prodige, répliqua Mothril, sans répondre à cette véhémente sortie de don Pedro, le coeur de dona Aïssa bat sous ma main, elle vit, elle vit !
- Elle vit, s'écria don Pedro, tu en es sûr ?
- Je sens le battement du coeur.
- La blessure n'est pas mortelle, peut-être... un médecin !...
- Nul parmi les chrétiens, dit Mothril avec une sombre autorité, ne portera la main sur une noble fille de ma nation ; Aïssa ne sera peut-être pas sauvée, mais si elle l'est, ce sera par moi seul.
- Sauve-la ! Mothril, sauve-la !... pour qu'elle parle...
Mothril attacha sur le roi un profond regard.
- Pour qu'elle parle, dit-il, mon seigneur, elle parlera.
- Eh bien ! Mothril, nous verrons alors.
- Oui, seigneur, nous verrons si je suis un calomniateur, et si Aïssa est déshonorée.
Don Pedro, qui était à genoux devant les deux cadavres, regarda alors le sinistre visage de Maria, contracté par une mort hideuse ; puis le calme et doux visage d'Aïssa, endormie dans son évanouissement.
- Au fait, dit-il en lui-même, dona Maria était bien jalouse, et je me rappelle toujours qu'elle n'a pas défendu autrefois Blanche de Bourbon, que j'ai fait tuer pour elle.
Il se releva, ne voulant plus considérer que la jeune fille.
- Sauve-la, Mothril, dit-il au Sarrasin.
- Ne craignez rien, seigneur, je veux qu'elle vive, elle vivra.
Don Pedro se retira frappé d'une sorte de superstitieuse terreur, et il lui sembla que le spectre de dona Maria se relevait du sol et le suivait dans la galerie.
- Si la jeune fille était en état de parler, dit-il, amène la moi, ou fais-moi prévenir, je veux l'interroger.
Ce fut sa dernière parole. Il rentra chez lui sans regrets, sans amour, sans espoir.
Mothril ordonna que les portes fussent fermées, il fit cueillir, par Hafiz, différents baumes dont il exprima le suc sur la blessure d'Aïssa, blessure que son poignard si habile avait faite avec la dextérité d'un couteau de chirurgien.
Aïssa revint à elle aussitôt que Mothril lui eût fait respirer quelques puissants aromates. Elle était affaiblie ; mais sa mémoire lui revenant avec les forces, le premier usage qu'elle fit de la vie fut de pousser un cri d'effroi.
Elle venait d'apercevoir le corps inanimé de Maria Padilla, gisant à ses pieds, l'oeil encore chargé de menace et de désespoir.

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