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Crevettes


Tout le monde connaît ce petit crustacé qu'on voit sur toutes les tables bien servies mais qui semble y être plutôt pour l'ornement que pour l'utilité. En effet à peine vit-il deux heures hors de son élément sans mourir et il a besoin d'être cuit vivant encore.
Rien n'est plus joli que de voir nager des crevettes dans un bocal ; l'animal est transparent lui-même comme le cristal dans lequel il est enfermé ; on voit tout son organisme intérieur et jusqu'aux battements de son coeur ; vivante, sa chair semble être visqueuse, cuite elle est compacte et du plus beau blanc.
Les crevettes des bords de la Manche sont renommées et celles surtout des environs du Havre qu'on appelle bouquet. Nous inviterons les touristes qui habitent le Havre ou Etretat à aller manger des crevettes, à Saint-Jourt, chez la belle Ernestine, et en effet, Ernestine est une belle et sage personne de vingt-huit ans, tenant un hôtel et ayant réputation faite sur toute la côte.
Là, on mange le plus beau bouquet qui se pêche à dix lieues à la ronde ; c'est le rendez-vous des gourmands du Havre, des peintres et des poètes de Paris qui ont laissé les uns des dessins les autres des vers à sa louange sur son album. Ce sont en général les femmes qui pèchent les crevettes en poussant devant elles un filet qui ratisse le fond de la mer et ramasse tout ce qui s'y trouve.
Quand elle doit être mangée séance tenante, la crevette se jette tout simplement vivante dans une casserole pleine d'eau de mer bouillante, à laquelle on joint un filet de vinaigre ; quand elle doit être transportée à Paris, on plonge la crevette vivante dans un chaudron d'eau douce avec un kilogramme de sel par quatre kilogrammes de crevettes, on la laisse bouillir cinq minutes et on la retire, on la mouille avec de l'eau froide et non salée qui lui donne pour le regard, une valeur égale à celle qu'elle conserve pour le goût.
Outre la crevette servie comme on sert les écrevisses, on fait encore une foule de choses à la crevette que nous allons indiquer ici.
On fait du potage à la crevette.

Potage à la crevette.
Prenez 6 belles tomates, 6 oignons blancs, faites une purée, moitié tomate, moitié oignons, faites cuire vos crevettes dans du vin blanc avec sel, poivre, un peu de poivre de Cayenne. Vous épluchez vos queues de crevettes que vous posez sur une assiette à part, 100 à peu près. Vous gardez le corps que vous faites bouillir avec l'assaisonnement de vos crevettes, vous le pilez, lui faites prendre un bouillon et le passez au tamis. Vous faites trois parties égales de très bon bouillon de votre bisque aux crevettes et de vos tomates et oignons ; vous mêlez le tout dans trois ou quatre bouillons qui lient bien les trois substances, vous goûtez et si le mélange est bien fait et ne laisse rien à désirer, vous y jetez vos queues de crevettes et vous servez bouillant.

Omelette aux queues de crevettes.
Vous faites cuire de la même façon vos crevettes, vous les nettoyez de même et vous les pilez également ; vos oeufs battus, salés, poivrés, vous y mêlez votre bisque de crevettes, et vous faites l'omelette selon la coutume.
Il en sera de même pour les oeufs brouillés aux queues de crevettes. Si vous avez du bouillon de poulet vous le mêlerez avec votre bisque ; puis bisque, crevettes, vous jetterez tout dans vos oeufs battus dont vous aurez retiré un blanc sur trois, vous tournerez et brouillerez vos oeufs comme vous le feriez avec des pointes d'asperges.
Vous pouvez aussi éplucher deux ou trois cents crevettes, pilez les corps dans l'huile et le vinaigre, passez au tamis et cette bisque froide, l'étendre sur une salade salée et poivrée.

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