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Chapitre IX
Etat civil du Comte de Monte-Cristo

Puisque nous causons, chers lecteurs, je puis bien vous dire ici quelques mots pro domo meâ.
Oh ! il s'agit de fort peu de chose, d'une simple calomnie qui se débite à mon endroit depuis quelque vingt-cinq ans.
Vous voyez qu'il y aura bientôt prescription.
Mais où prendrai-je le temps de répondre à mes détracteurs, quand je trouve à peine le temps de répondre à mes amis ! On s'est toujours fort inquiété de savoir comment s'étaient fait mes livres, et surtout qui les avait faits.
Il était si simple de croire que c'était moi, que l'on n'en a pas eu l'idée.
Et, naturellement, ce sont ceux de mes ouvrages qui ont obtenu le plus de succès, dont on me conteste le plus obstinément la paternité.
Ainsi, pour ne parler aujourd'hui que d'un seul, en Italie, on croit généralement que c'est Fiorentino qui a fait le Comte de Monte-Cristo.
Pourquoi ne croit-on pas que c'est moi qui ai fait la Divine Comédie ? J'y ai exactement autant de droits.
Fiorentino a lu Monte-Cristo comme tout le monde, mais il ne l'a pas même lu avant tout le monde, – si toutefois il l'a lu.
Les Italiens auront donc beau réclamer Monte-Cristo, il faudra qu'ils se contentent de l'Assedio di Firenza, de M. Azeglio, et dei Promessi Sposi, de Manzoni.
Disons la façon dont se fit le Comte de Monte-Cristo, que l'on réimprime justement à cette heure.
En 1841, j'habitais Florence.
L'esprit des autres peuples est si peu en harmonie avec l'esprit français, que, partout où les Français se trouvent à l'étranger, ils se réunissent et font colonie.
Or, en 1841, la colonie française à Florence avait pour centre la charmante villa de Quarto, habitée par le prince Jérôme Bonaparte et par la princesse Mathilde, sa fille.
C'était chez eux que tout Français arrivant dans la ville des Médicis demandait à être présenté d'abord.
Cette formalité était remplie pour moi dès 1834, de sorte que, à mon second voyage à Florence, en 184O, je me trouvais déjà être, pour la famille exilée, une ancienne connaissance.
Le roi Jérôme me voua, dès cette époque, une amitié qu'il m'a conservée, j'espère, mais dont il peut dire que je n'abuse pas.
J'allais tous les jours chez lui à Quarto. Je ne crois pas avoir été deux fois chez lui depuis qu'il est au Palais-Royal.
Un jour, il me dit, – c'était au commencement de 1842, au moment où, à propos des affaires d'Egypte, on menaçait la France d'une coalition, – un jour, il me dit :
- Napoléon quitte le service de Wurtemberg et revient à Florence. Il ne veut pas, comme tu le comprends bien, être exposé à servir contre la France. Une fois qu'il sera ici, je te le recommande.
- Vous me le recommandez, à moi, sire ! Et à quoi puis-je lui être bon ?
- A lui apprendre la France, qu'il ne connaît pas, et à faire avec lui quelques courses en Italie, si tu en as le temps.
- A-t-il vu l'île d'Elbe ?
- Non.
- Eh bien, je le conduirai à l'île d'Elbe, si cela peut vous être agréable. Il est bon que le neveu de l'empereur termine son éducation par ce pèlerinage historique.
- Cela m'est agréable, et je retiens ta parole.
- Pardon, sire, mais comment voyagerons-nous ?
- Je ne te comprends pas.
- Je ne suis pas assez riche pour voyager en prince, et suis trop fier pour voyager à la suite d'un prince.
- Oh ! quant à cela, que ta susceptibilité ne s'effarouche pas. Napoléon mettra mille francs de sa bourse, tu mettras mille francs de la tienne ; je vous donnerai un valet de chambre avec cinq cents francs pour les frais de poste et de passage, et vous ne reviendrez que lorsqu'il n'y aura plus rien dans la bourse.
- Alors, comme cela, tout va bien.
Lorsque le prince Napoléon arriva, il trouva donc l'affaire tout arrangée entre son père et moi, et comme il ne changea rien à ces arrangements, les premiers instants donnés à sa famille et à ses amis, il fut décidé que le moment était venu de mettre notre projet de voyage à exécution.
J'avais alors trente-neuf ans et le prince n'en avait que dix-neuf.
Je ne dis pas le bien que je pense de lui ; on le sait, je ne loue guère que les morts ou les exilés.
Nous partîmes pour Livourne dans la calèche de voyage du prince, notre valet de chambre partageant le siège avec le postillon.
Six ou huit heures après, nous étions à Livourne.
Comme Livourne est une des villes les plus ennuyeuses qu'il y ait au monde, à peine fûmes-nous à Livourne, que nous éprouvâmes le besoin de la quitter. En conséquence, nous courûmes au port pour voir s'il y avait quelque bâtiment en partance pour Porto-Ferrajo.
Il n'y en avait aucun, et ce qui était bien pis, c'est que l'on ne pouvait pas nous dire quand il y en aurait.
Nous nous promenions donc à peu près désespérés sur le port de Livourne, lorsque, en passant en revue les petites barques à deux rameurs qui vont chercher les passagers à bord des paquebots, le prince s'écria :
- Voyez donc cette barque, Dumas.
- Qu'a-t-elle de particulier ?
- Son nom.
- Comment s'appelle-t-elle ?
- Le Duc de Reichstadt.
- Ah ! c'est bizarre.
- Oui, n'est-ce pas ?
- Par ma foi, monseigneur, si le roi ne m'avait pas constitué votre mentor, je vous proposerais une fière folie.
- Laquelle ?
- De nous en aller à Porto-Ferrajo dans cette barque.
- Parlez-vous sérieusement ?
- On ne peut plus sérieusement ; j'ai confiance dans la fortune de César.
Le prince était déjà dans la barque.
- Je vous laisse la responsabilité de la proposition et j'en risque les conséquences, dit-il.
- Cependant, lui dis-je avec une certaine hésitation.
- Vous reculez ?
- Soixante milles dans un bateau plat !
- Vous reculez ?
- Et le canal de Piombino à traverser !
- Vous reculez ?
- Ma foi, non ! puisque j'y risque ma vie avec la vôtre, je suis bien tranquille. Si vous vous noyez, on ne me fera pas de reproches. Allons, va pour le Duc de Reichstadt.
Et je sautai à mon tour dans la barque.
Pendant que nous débattions le prix avec un des deux rameurs, l'autre allait chercher à l'hôtel nos malles et notre valet de chambre.
Je crois que le prix fut de huit paoli par jour : neuf francs, à peu près.
On ne pouvait pas aller au diable à meilleur marché.
Au reste, les matelots livournais ne doutent de rien ; lorsque nous leur demandâmes s'ils pouvaient nous conduire à l'île d'Elbe dans leur coquille de noix :
- En Afrique, si c'est le bon plaisir de Leurs Excellences, répondirent-ils.
Il n'en fut pas de même du valet de chambre, bon et honnête Allemand ; tant que nous fûmes dans le port, il ne fit aucune objection : il croyait que nous allions rejoindre quelque bâtiment à l'ancre.
Mais une fois que nous eûmes dépassé le port, qu'il n'aperçut plus rien à l'horizon, qu'il vit nos deux matelots abattre leur tente en toile à matelas pour dresser un petit mat et à ce petit mât hisser une voile, le brave Teuton commença de s'inquiéter.
Cependant, comme il ne pouvait croire à leur témérité, il attendit encore quelques instants ; mais, au bout d'un quart d'heure, quand il n'y eut plus de doute pour lui, quand il reconnut que notre équipage mettait le cap sur l'île d'Elbe, il commença, en langue germanique, avec le prince, un dialogue dont je n'entendis pas une parole, mais que, grâce à l'éloquence de la pantomime, j'eusse pu traduire mot à mot.
Il était évident qu'il faisait à son maître de respectueux reproches sur son imprudence, et que le prince essayait de le rassurer.
Pendant ce temps-là, je tirais des oiseaux de mer.
Le prince Napoléon, qui trouvait cela plus amusant que de rassurer son valet de chambre, se mit de la partie.
Notre embarcation avait cela de commode que, lorsque nous avions tué une mouette ou un goland, nous n'avions qu'à diriger la barque vers l'oiseau mort, étendre la main et le prendre.
Nous trouvâmes tant de plaisir à cette chasse, que nous ne fîmes aucune attention à un gros nuage venant de la Corse, lequel, furieux sans doute de notre distraction, signala tout à coup sa présence par des éclairs magnifiques et par un majestueux roulement de tonnerre.
- Mon cher Dumas, dit le prince, je crois qu'il ne manquera rien à la barque de César, pas même la tempête.
- Et nous aurons sur lui un avantage, monseigneur, c'est que nous sommes sur la mer, et que lui n'était que sur un fleuve.
Dix minutes après, notre voile était abattue, notre mât couché au fond de la barque, et nous dansions comme un bouchon de liège sur des vagues de quinze pieds de hauteur.
Le prince avait un grand avantage sur moi : il fumait et avait le mal de mer ; deux préoccupations secondaires qui le distrayaient de la principale.
Moi qui n'ai point le mal de mer et qui ne fume pas, j'étais tout entier à la situation.
Nous fûmes en danger pendant près de trois heures.
Au bout de trois heures, le ciel s'éclaircit, le vent tomba, la mer fut calmée.
Nous étions trempés jusqu'aux os : des pieds aux genoux, par l'eau de la mer que nous avions embarquée ; de la pointe des cheveux aux genoux, par l'eau du ciel que l'orage avait versée sur nous avec une prodigalité qui prouve que, lorsque le ciel donne, il donne de tout coeur.
La tempête nous avait rapprochés de la terre ; rien ne nous était plus facile que d'y aborder, mais cette terre, c'étaient les Maremmes.
Il ne s'agissait point, après avoir failli mourir comme Léandre, d'aller mourir comme Pia de Tolomei.
Nos matelots demandèrent nos ordres.
- Cela regarde Son Altesse, répondis-je.
- A Porto-Ferrajo, dit le prince, comme il aurait dit à un cocher de place : « Aux Cascines. »
Le lendemain, à cinq heures, nous abordions à Porto-Ferrajo.
- Mais, me direz-vous, chers lecteurs, jusqu'à présent, le Comte de Monte Cristo n'a pas grand-chose à faire avec ce que vous nous racontez.
Patience, nous y arrivons.
Après avoir parcouru l'île d'Elbe en tout sens, nous résolûmes d'aller faire une partie de chasse à la Pianosa.
La Pianosa est une île plate, s'élevant à peine de dix pieds au-dessus du niveau de la mer. Elle abonde en lapins et en perdrix rouges.
Malheureusement, nous avions oublié d'emmener un chien !
Il est vrai que tout chien, un caniche excepté, se fût refusé à nous suivre sur un pareil bateau.
Un bonhomme, heureux possesseur d'un roquet blanc et noir, s'offrit à porter notre carnier, moyennant deux paoli, et à nous prêter son chien par-dessus le marché.
Le chien nous fit tuer une douzaine de perdrix que le maître porta consciencieusement.
A chaque perdrix que le bonhomme fourrait dans sa sacoche, il disait, en poussant un soupir et en jetant un coup d'oeil sur un magnifique rocher en pain de sucre qui s'élevait à deux ou trois cents mètres au-dessus du niveau de la mer :
- Oh ! Excellences, c'est si vous alliez là-bas, que vous feriez une belle chasse !
- Qu'y a-t-il donc là-bas ? lui demandai-je enfin.
- Des chèvres sauvages par bandes ; l'île en est pleine.
- Et comment s'appelle cette île bienheureuse ?
- Elle s'appelle l'île de Monte-Cristo.
Ce fut la première fois et dans cette circonstance que le nom de Monte Cristo résonna à mon oreille.
- Eh bien, dis-je au prince, si nous allions à l'île de Monte-Cristo, monseigneur ?
- Va pour l'île de Monte-Cristo, dit le prince.
Le lendemain, nous partîmes pour l'île de Monte-Cristo.
Le temps était magnifique cette fois ; nous avions juste ce qu'il fallait de vent pour aller à la voile, et cette voile, secondée par les rames de nos deux matelots, nous faisait faire trois lieues à l'heure.
A mesure que nous avancions, Monte-Cristo semblait sortir du sein de la mer et grandissait comme le géant Adamastor.
Je n'ai jamais vu plus beau manteau d'azur que celui que le soleil levant lui jeta sur les épaules.
A onze heures du matin, nous n'avions plus que trois ou quatre coups de rames à donner pour aborder au centre d'un petit port.
Noue tenions déjà nos fusils à la main, prêts à sauter à terre, quand un des deux rameurs nous dit :
- Leurs Excellences savent que l'île de Monte-Cristo est en contumace.
- En contumace ! demandai-je ; qu'est-ce que cela veut dire ?
- Cela veut dire que, comme l'île est déserte et que tous les bâtiments y abordent sans patente, à quelque port que nous rentrions après avoir abordé à Monte-Cristo, nous serons forcés de faire cinq ou six jours de quarantaine.
- Eh ! monseigneur, que dites-vous de cela ?
- Je dis que ce garçon a bien fait de nous prévenir avant que nous abordions, mais qu'il eût mieux fait encore de nous prévenir avant que nous partions.
- Monseigneur ne pense pas que cinq ou six chèvres, que nous ne tuerons peut-être pas, vaillent cinq ou six jours de quarantaine que noue ferons sûrement.
- Et vous ?
- Moi, je n'aime pas les chèvres de passion, et j'ai la quarantaine en horreur ; de sorte que, si monseigneur veut...
- Quoi ?
Nous ferons tout simplement le tour de l'île.
- Dans quel but ?
- Pour relever sa position géographique ; après quoi, nous retournerons à la Pianosa.
- Relevons la position géographique de l'île de Monte-Cristo, soit ; mais à quoi cela nous servira-t-il ?
- A donner, en mémoire de ce voyage que j'ai l'honneur d'accomplir avec vous, le titre de l'île de Monte-Cristo à quelque roman que j'écrirai plus tard.
- Faisons le tour de l'île de Monte-Cristo, dit le prince, et envoyez-moi le premier exemplaire de votre roman.
Le lendemain, nous étions de retour à la Pianosa ; huit jours après, à Florence.
Vers 1843, rentré en France, je passai un traité avec MM. Béthune et Plon pour leur faire huit volumes intitulés : Impressions de voyage dans Paris.
J'avais d'abord cru faire la chose tout simplement en commençant par la barrière du Trône et en finissant par la barrière de l'Etoile, en touchant de la main droite la barrière Clichy et de la main gauche la barrière du Maine, lorsqu'un matin Béthune vint me dire, en son nom et au nom de son associé, qu'il entendait avoir toute autre chose qu'une promenade historique et archéologique à travers la Lutèce de César et le Paris de Philippe-Auguste ; qu'il entendait avoir un roman dont le fond serait ce que je voudrais, pourvu que ce fond fût intéressant, et dont les Impressions de voyage dans Paris ne seraient que les détails.
Il avait la tête montée par le succès d'Eugène Sue.
Comme il m'était aussi égal de faire un roman que des impressions de voyage, je me mis à chercher une espèce d'intrigue pour le livre de MM. Béthune et Plon.
J'avais depuis longtemps fait une corne, dans la Police dévoilée de Peuchet, à une anecdote d'une vingtaine de pages, intitulée : le Diamant et la Vengeance.
Tel que cela était, c'était tout simplement idiot ; si l'on en doute, on peut le lire.
Il n'en est pas moins vrai qu'au fond de cette huître il y avait une perle ; perle informe, perle brute, perle sans valeur aucune, et qui attendait son lapidaire.
Je résolus d'appliquer aux Impressions de voyage dans Paris l'intrigue que je tirerais de cette anecdote.
Je me mis, en conséquence, à ce travail de tête qui précède toujours chez moi le travail matériel et définitif.
La première intrigue était celle-ci :
Un seigneur très riche, habitant Rome et se nommant le comte de Monte- Cristo, rendrait un grand service à un jeune voyageur français, et, en échange de ce service, le prierait de lui servir de guide quand, à son tour, il visiterait Paris.
Cette visite à Paris, ou plutôt dans Paris, aurait pour apparence la curiosité ; pour réalité, la vengeance.
Dans ses courses à travers Paris, le comte de Monte-Cristo devait découvrir ses ennemis cachés, qui l'avaient condamné dans sa jeunesse à une captivité de dix ans.
Sa fortune devait lui fournir ses moyens de vengeance.
Je commençai l'ouvrage sur cette base, et j'en fis ainsi un volume et demi, à peu près.
Dans ce volume et demi étaient comprises toutes les aventures à Rome d'Albert de Morcerf et de Frantz d'Epinay, jusqu'à l'arrivée du comte de Monte-Cristo à Paris.
J'en étais là de mon travail, lorsque j'en parlai à Maquet, avec lequel j'avais déjà travaillé en collaboration.
Je lui racontai ce qu'il y avait déjà de fait et ce qui restait à faire.
- Je crois, me dit-il, que vous passez par-dessus la période la plus intéressante de la vie de votre héros, c'est-à-dire par-dessus ses amours avec la Catalane, par-dessus la trahison de Danglars et de Fernand, et par-dessus les dix années de prison avec l'abbé Faria.
- Je raconterai tout cela, lui dis-je.
- Vous ne pourrez pas raconter quatre ou cinq volumes, et il y a quatre ou cinq volumes là dedans.
Vous avez peut-être raison ; revenez donc dîner avec moi demain, nous causerons de cela.
Pendant la soirée, la nuit et la matinée, j'avais pensé à son observation, et elle m'avait paru tellement juste, qu'elle avait prévalu sur mon idée première.
Aussi, lorsque Maquet vint le lendemain, trouva-t-il l'ouvrage coupé en trois parties bien distinctes : Marseille, Rome, Paris.
Le même soir, nous fîmes ensemble le plan des cinq premiers volumes ; de ces cinq volumes, un devait être consacré à l'exposition, trois à la captivité et les deux derniers à l'évasion et à la récompense de la famille Morel.
Le reste, sans être fini complètement était à peu près débrouillé.
Maquet croyait m'avoir rendu simplement un service d'ami. Je tins à ce qu'il eût fait oeuvre de collaborateur.
Voilà comment le Comte de Monte-Cristo, commencé par moi en impressions de voyage, tourna peu à peu au roman et se trouva fini en collaboration par Maquet et moi.
Et maintenant, libre à chacun de chercher au Comte de Monte-Cristo une autre source que celle que j'indique ici ; mais bien malin celui qui la trouvera.

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1998-2010
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