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Chapitre XI
Hiboux, pies et rossignols

Comme ce jour était le saint jour du dimanche, Benvenuto ne fit rien que jouer à la paume, se rafraîchir après avoir joué, et visiter sa nouvelle propriété ; mais dès le lendemain le déménagement commença, et grâce à l'aide de ses neuf compagnons, deux jours après il était opéré ; le troisième jour, Benvenuto s'était remis au travail aussi tranquillement que si rien ne s'était passé.
Quand le prévôt se vit définitivement battu, quand il apprit que l'atelier de Benvenuto, ouvriers et outils, était décidément installé au Grand-Nesle, sa rage le reprit, et il se mit à mâcher et à remâcher une vengeance. Il était au plus fort de ses dispositions rancunières quand le vicomte de Marmagne le surprit le matin même du troisième jour, c'est-à-dire le mercredi. Marmagne n'avait garde de se refuser le triomphe de vanité qu'on aime à remporter sur les douleurs et les défaites de ses amis quand on est un lâche et un sot.
- Eh bien ! dit-il en abordant d'Estourville, je vous l'avais bien dit, mon cher prévôt.
- Ah ! c'est vous, vicomte. Bonjour, répondit d'Estourville.
- Eh bien ! avais-je raison, maintenant ?
- Hélas ! oui. Vous allez bien ?
- Je n'ai rien à me reprocher du moins dans cette maudite affaire : je vous ai assez averti.
- Est-ce que le roi est de retour au Louvre ?
- Chanson ! disiez-vous : un ouvrier, un homme de rien, il ferait beau voir ! Vous avez vu, mon pauvre ami.
- Je vous demande si Sa Majesté est revenue de Fontainebleau.
- Oui, et elle a regretté vivement de n'avoir pas été arrivée à Paris dimanche, pour assister d'une de ses tours du Louvre à la victoire de son argentier sur son prévôt.
- Qu'est-ce qu'on dit à la cour ?
- Mais on dit que vous avez été complètement repoussé !
- Hum ! hum ! fit le prévôt, que ce dialogue à bâtons rompus commençait à impatienter fort.
- Comme cela, il vous a donc bien ignominieusement battu ? continua Marmagne.
- Mais...
- Il vous a tué deux hommes, n'est-ce pas ?
- Je le crois.
- Si vous voulez les remplacer, j'ai à votre service deux braves, deux Italiens, deux spadassins consommés ; ils se feront payer un peu cher, mais ce sont des hommes sûrs. Si vous les aviez eux, les choses se seraient peut être passées autrement.
- Nous verrons ; je ne dis pas non. Si ce n'est pour moi, ce sera du moins pour mon gendre le comte d'Orbec.
- Cependant, quoi qu'on en dît, je n'ai jamais pu croire que ce Benvenuto vous eût personnellement bâtonné.
- Qui a dit cela ?
- Tout le monde. Les uns s'indignent comme je fais, les autres rient comme a fait le roi.
- Assez ! on n'est pas à la fin.
- Aussi, vous aviez tort de vous commettre avec ce manant ; et pourquoi ! pour un vil intérêt.
- C'est pour l'honneur que je combattrai maintenant.
- S'il s'était agi d'une maîtresse, passe ; vous auriez pu à la rigueur tirer l'épée contre de pareils gens, mais pour un logement...
- L'hôtel de Nesle est un logement de prince.
- D'accord, mais pour un logement de prince s'exposer à un châtiment de goujat !
- Oh ! une idée, Marmagne, dit le prévôt poussé à bout. Parbleu ! vous m'êtes si dévoué que je veux à mon tour vous rendre un service d'ami, et je suis ravi d'en avoir justement l'occasion. Comme noble et comme secrétaire du roi, vous êtes vraiment bien mal situé rue de la Huchette, cher vicomte. Or, j'avais dernièrement demandé pour un ami à la duchesse d'Etampes, qui n'a rien à me refuser, vous le savez, un logement dans un des hôtels du roi, au choix de cet ami. J'avais, et non sans peine, obtenu la chose, mais il se trouve que mon protégé est, pour affaires, impérieusement appelé en Espagne. J'ai donc à ma disposition des lettres du roi qui donnent ce droit de logis. Je ne puis en user pour moi, en voulez-vous ? Je serai heureux de reconnaître ainsi vos bons services et votre franche amitié.
- Cher d'Estourville, quel service vous me rendez là ! Il est vrai que je suis bien mal logé, et que vingt fois je m'en suis plaint au roi.
- J'y mets une condition.
- Laquelle ?
- C'est que puisque le choix vous appartient entre les hôtels royaux, vous choisirez...
- Achevez, j'attends.
- L'hôtel de Nesle.
- Ah ! ah ! c'était un piège.
- Pas du tout, et en preuve, voici le brevet dûment signé de Sa Majesté, avec les blancs nécessaires pour les noms du postulant et la désignation de l'hôtel. Or, j'écris l'hôtel du GrandNesle et je vous laisse libre d'écrire les noms que vous voudrez.
- Mais ce damné Benvenuto ?
- N'est pas le moins du monde sur ses gardes, rassuré qu'il est par un traité signé entre nous. Celui qui voudra entrer trouvera les portes ouvertes, et s'il entre un dimanche, il trouvera les salles vides. D'ailleurs, il ne s'agit pas de chasser Benvenuto, mais de partager avec lui le Grand-Nesle, qui est assez grand pour contenir trois ou quatre familles. Benvenuto entendra raison. – Eh bien ! que faites-vous ?
- J'écris mes noms et titres au bout du brevet. Vous voyez ?
- Prenez garde pourtant, car le Benvenuto est peut-être plus redoutable que vous ne croyez.
- Bon ! je vais retenir mes deux spadassins et nous le surprendrons un dimanche.
- Quoi ! vous commettre avec un manant pour un vil intérêt !
- Un vainqueur a toujours raison, et puis je venge un ami.
- Alors, bonne chance ; je vous ai averti, Marmagne.
- Merci deux fois alors : une fois du cadeau et une fois de l'avis.
Et Marmagne, enchanté, mit son brevet dans sa poche et partit en toute hâte pour retenir les deux spadassins.
- C'est bien, dit en se frottant les mains et en le suivant des yeux messire d'Estourville. Va, vicomte, et de deux choses l'une, ou tu me vengeras de la victoire de Benvenuto, ou Benvenuto me vengera de tes sarcasmes ; dans tous les cas la chance est pour moi. Je fais ennemis mes ennemis, qu'ils se battent, qu'ils se tuent, j'applaudirai à tous les coups, car tous les coups me feront plaisir.
Tandis que la haine du prévôt menace les habitants du Grand-Nesle, traversons la Seine et voyons un peu dans quelles dispositions ceux-ci en attendent les effets. Benvenuto, dans la confiance et la tranquillité de la force, s'était remis paisiblement, comme nous l'avons dit, à l'oeuvre sans se douter ni se soucier de la rancune de messire d'Estourville. Voici quel était l'emploi de ses journées : il se levait avec le jour, se rendait à une petite chambre solitaire qu'il avait découverte dans le jardin, au-dessus de la fonderie, et dont une fenêtre donnait obliquement sur le parterre du Petit- Nesle. Là, il modelait une petite statue d'Hébé. Après le dîner, c'est-à-dire à une heure après midi, il faisait un tour à l'atelier, où il exécutait son Jupiter ; le soir, pour se délasser, il faisait une partie de paume ou un tour de promenade. Voici maintenant quel était l'emploi de la journée de Catherine : elle tournait, cousait, vivait, chantait, se trouvait bien plus à l'aise au Grand- Nesle qu'à l'hôtel du cardinal de Ferrare. Pour Ascanio, à qui sa blessure ne permettait pas de se remettre à l'ouvrage, malgré l'activité de son esprit, il ne s'ennuyait pas, il rêvait.
Si maintenant, profitant du privilège usurpé par les voleurs de passer par- dessus les murs, nous entrons dans le Petit-Nesle, voici ce que nous y voyons. D'abord, dans sa chambre, Colombe, rêveuse comme Ascanio ; qu'on nous permette pour le moment de nous en tenir là. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que les rêves d'Ascanio sont couleur de rose et ceux de la pauvre Colombe sombres comme la nuit. Et puis voici dame Perrine qui sort pour aller à la provision, et il nous faut, si vous voulez bien, la suivre un instant.
Depuis bien longtemps, ce nous semble, nous avons perdu de vue la bonne dame ; il faut dire aussi que la bravoure n'étant pas précisément sa vertu dominante, elle s'était, au milieu des périlleuses rencontres que nous avons narrées, volontairement effacée et tenue dans l'ombre : mais la paix recommençant à fleurir, les roses de ses joues avaient refleuri en même temps, et comme Benvenuto avait repris son oeuvre d'artiste, elle avait paisiblement repris, elle, sa joyeuse humeur, son bavardage, sa curiosité de commère, en un mot l'exercice de toutes les qualités domestiques.
Dame Perrine allant donc à la provision était obligée de traverser la cour commune aux deux propriétés, car la porte nouvelle du Petit-Nesle n'était pas percée encore. Or, et par le plus grand hasard du monde, il se trouva que Ruperta, la vieille servante de Benvenuto, sortait précisément à la même minute pour aller chercher le dîner de son maître. Ces deux estimables personnes étaient bien trop dignes l'une de l'autre pour entrer dans les inimitiés de leurs patrons. Elles firent donc route ensemble avec le plus touchant accord, et comme le chemin est moins long de moitié quand on cause, elles causèrent.
Ruperta commença par s'informer auprès de dame Perrine du prix des denrées et du nom des marchands du quartier, puis elles passèrent à des sujets de conversation plus intimes et plus intéressants.
- Votre maître est donc un bien terrible homme ? demanda dame Perrine.
- Lui ! quand vous ne l'offensez pas, il est doux comme un Jésus ; pourtant, dame ! quand on ne fait pas ce qu'il désire, je dois convenir qu'il n'est pas facile ; il aime beaucoup, mais beaucoup à ce qu'on fasse ce qu'il veut. C'est sa manie, et du moment qu'il s'est mis quelque chose dans la tête, les cinq cent mille diables de l'enfer ne le lui ôteraient pas ; d'ailleurs on le mène comme un enfant si on fait semblant de lui obéir, et il est même très agréable de paroles. Il faut l'entendre me dire : « Dame Ruperta il m'appelle Ruperte, dans sa prononciation étrangère, quoique de mon vrai nom je m'appelle Ruperta, pour vous servir dame Ruperta, voilà un excellent gigot rôti à point ; dame Ruperta, vos fèves sont assaisonnées d'une triomphante façon ; dame Ruperta, je vous regarde comme la reine des gouvernantes », et tout cela avec tant d'aménité que j'en suis pénétrée.
- A la bonne heure ! Mais il tue les gens, à ce qu'on dit.
- Oh ! oui, quand on le contrarie, il tue très bien. C'est un usage de son pays ; mais ce n'est jamais que lorsqu'on l'attaque et uniquement pour se défendre. Du reste, il est très gai et très avenant.
- Je ne l'ai jamais vu, moi. Il a des cheveux rouges, n'est-il pas vrai ?
- Non pas, vraiment. Il les a noirs comme vous et moi, c'est-à-dire comme je les avais. Ah ! vous ne l'avez jamais vu ? eh bien ! venez m'emprunter quelque chose sans faire semblant de rien, et je vous le montrerai. C'est un bel homme, et qui ferait un superbe archer.
- A propos de bel homme, et ce gentil cavalier comment va-t-il aujourd'hui ? Vous savez, notre blessé, ce jeune apprenti de bonne mine qui a reçu un si terrible coup pour sauver la vie à M. le prévôt ?
- Ascanio ? Vous le connaissez donc, lui ?
- Si je le connais ! Il a promis à ma maîtresse Colombe et à moi de nous faire voir de ses bijoux. Rappelez-le-lui, s'il vous plaît, ma chère dame. Mais tout cela ne me donne pas de ses nouvelles, et Colombe sera si contente de savoir que le sauveur de son père est hors de danger.
- Oh ! vous pouvez lui dire qu'il va très bien. Il s'est même levé tout à l'heure. Seulement, le chirurgien lui a défendu de sortir de sa chambre, et cependant cela lui ferait grand bien de prendre un peu l'air. Mais par ce soleil ardent c'est impossible. Votre jardin du Grand-Nesle est un véritable désert. Pas un coin d'ombre ; des orties et des ronces pour tout légume, et quatre ou cinq arbres sans feuilles pour toute verdure. C'est vaste, mais de bien peu d'agrément pour la promenade. Notre maître s'en console avec le jeu de paume ; mais mon pauvre Ascanio n'est guère en état de renvoyer une balle, et doit s'ennuyer à périr. Il est si vif, ce cher garçon, j'en parle comme ça parce que c'est mon favori, vu qu'il est toujours poli avec les gens d'âge. Ce n'est pas comme cet ours de Pagolo ou cette étourdie de Catherine.
- Et vous dites donc que ce pauvre jeune homme...
- Doit se manger l'âme d'être cloué des journées entières dans sa chambre sur un fauteuil.
- Mais, mon Dieu ! reprit la charitable dame Perrine, dites-lui donc à ce pauvre jeune homme, de venir au Petit-Nesle, où il y a de si beaux ombrages. Je lui ouvrirai bien volontiers la porte, moi, quoique messire le prévôt l'ait expressément défendu. Mais bah ! pour faire du bien à son sauveur c'est vertu que de lui désobéir ; et puis vous parlez d'ennui ! c'est nous qui en desséchons. Le gentil apprenti nous distraira, il nous dira des histoires de son pays d'Italie, il nous montrera des colliers et des bracelets, il jasera avec Colombe. Les jeunes gens ça aime à se voir, à bavarder ensemble, et ça périt dans la solitude. Ainsi, c'est convenu, dites-lui, à votre Benjamin, qu'il est libre de venir se promener tant qu'il voudra, pourvu qu'il vienne seul ou, bien entendu, avec vous, dame Ruperte, qui lui donnerez le bras. Frappez quatre coups, les trois premiers doucement et le dernier plus fort : je saurai ce que cela signifie et je viendrai vous ouvrir.
- Merci pour Ascanio et pour moi ; je ne manquerai pas de lui faire part de votre offre complaisante, et il ne manquera pas d'en profiter.
- Allons, je m'en réjouis, dame Ruperte.
- Au revoir, dame Perrine ! Ravie d'avoir fait connaissance avec une aussi aimable personne.
- Je vous en offre autant, dame Ruperte.
Les deux commères se firent une profonde révérence et se séparèrent enchantées l'une de l'autre.
Les jardins du Séjour de Nesle étaient en effet, comme elle l'avait dit, arides et brûlés comme une bruyère d'un côté, frais et ombreux comme une forêt de l'autre. L'avarice du prévôt avait laissé inculte le jardin du Grand-Nesle, qui eût trop coûté à entretenir, et il n'était pas assez sûr de ses titres de propriétaire pour renouveler au profit de son successeur peut-être les arbres qu'il s'était hâté de couper à son entrée en jouissance. La présence de sa fille au Petit-Nesle l'avait engagé à y laisser les ombrages et les bosquets, seule récréation qui dût rester à la pauvre enfant. Raimbault et ses deux aides suffisaient à entretenir et même à embellir le jardin de Colombe.
Il était fort bien planté et divisé. Au fond le potager, royaume de dame Perrine ; puis, le long des murs du Grand-Nesle, le parterre où Colombe cultivait des fleurs, et que dame Perrine nommait l'allée du Matin, parce que les rayons du soleil levant y donnaient, et que c'était au soleil levant d'ordinaire que Colombe arrosait ses marguerites et ses roses. Notons en passant, que de la chambre située au-dessus de la fonderie, dans le Grand- Nesle, on pouvait sans être vu ne pas perdre un seul mouvement de la jolie jardinière. Il y avait encore, toujours suivant les divisions géographiques de dame Perrine, l'allée du Midi, terminée par un bosquet où Colombe aimait à aller lire ou broder pendant la chaleur du jour. A l'autre extrémité du jardin, l'allée du Soir, plantée d'une triple rangée de tilleuls qui y entretenaient une fraîcheur charmante, et choisie par Colombe pour ses promenades d'après souper.
C'était cette allée que dame Perrine avait jugée très propre à favoriser le rétablissement et à hâter la convalescence d'Ascanio blessé. Néanmoins elle s'était bien gardée d'instruire Colombe de ses intentions charitables. Celle- ci, trop docile aux ordres de son père, eût peut-être refusé de prêter les mains à la désobéissance de sa gouvernante. Et que penserait alors dame Ruperte de l'autorité et du crédit de sa voisine ? Non, puisqu'elle s'était avancée, peut-être un peu à la légère, il fallait aller jusqu'au bout. Et la bonne dame était vraiment bien excusable quand on pense qu'elle n'avait, depuis le matin jusqu'au soir que Colombe à qui elle pût adresser la parole ; encore le plus souvent Colombe, absorbée dans ses réflexions, ne lui répondait pas.
On comprend quels furent les transports d'Ascanio quand il apprit que son paradis lui était ouvert et de quelles bénédictions il combla Ruperte. Il voulut sur-le-champ profiter de son bonheur, et Ruperte eut toutes les peines du monde à lui persuader qu'il devait au moins attendre jusqu'au soir. Tout lui disait, d'ailleurs, de croire que Colombe avait autorisé l'offre de dame Perrine, et cette pensée le rendait fou de joie. Aussi, avec quelle impatience, mêlée je ne sais de quel effroi, il compta les heures trop lentes. Enfin, enfin, cinq heures sonnent. Les ouvriers partirent ; Benvenuto était depuis midi hors de l'atelier : on croyait qu'il était allé au Louvre.
Alors Ruperte dit solennellement à l'apprenti, qui la regardait comme elle ne s'était pas vu regarder depuis longtemps :
- Et maintenant que l'heure est sonnée, suivez-moi, jeune homme. Et traversant la cour avec Ascanio, elle alla frapper quatre coups à la porte du Petit-Nesle.
- Ne rapportez rien de ceci au maître, ma bonne Ruperte, dit Ascanio, qui savait Cellini assez railleur et fort peu croyant à l'endroit de l'amour, et qui ne voulait pas voir profaner par des quolibets sa chaste passion.
Ruperte allait s'informer du motif d'une discrétion qui lui coûtait toujours quand la porte s'ouvrit et dame Perrine parut.
- Entrez, beau jouvenceau, dit-elle. Comment vous trouvez-vous ? La pâleur lui sied, voyez donc, c'est un plaisir. Venez aussi, dame Ruperte ; prenez l'allée à gauche, jeune homme. Colombe va descendre au jardin, c'est l'heure de sa promenade, et tâchez que je ne sois pas trop grondée pour vous avoir introduit ici.
- Comment ! s'écria Ascanio, mademoiselle Colombe ne sait donc pas...
- Ah bien oui ! Est-ce qu'elle aurait consenti à désobéir à son père ? Je l'ai élevée dans des principes ! J'ai désobéi pour deux, moi. Ma foi ! tant pis ; on ne peut pas toujours vivre comme des recluses non plus. Raimbault ne verra rien, ou s'il voit, j'ai les moyens de le faire taire, et au pis, j'ai tenu tête plus d'une fois à messire le prévôt, da !
Sur le compte de son maître, dame Perrine était fort verbeuse, mais Ruperte la suivit seule dans ses confidences. Ascanio était debout et n'écoutait que les battements de son coeur.
Pourtant il entendit ces mots que dame Perrine lui jetait en s'éloignant : – Voici l'allée où Colombe se promène tous les soirs, et elle va venir sans doute. Vous voyez que le soleil ne vous y atteindra pas, mon gentil malade.
Ascanio fit un signe de remerciement, s'avança de quelques pas, pour retomber dans ses rêveries et dans les molles pensées d'une attente pleine d'anxiété et d'impatience.
Cependant il entendit encore ces paroles que dame Perrine disait en passant à dame Ruperte :
- Voici le banc favori de Colombe.
Et laissant les deux commères continuer leur promenade et leur causerie, il s'assit doucement sans rien dire sur ce banc sacré.
Que voulait-il ? où tendait-il ? Il l'ignorait lui-même. Il cherchait Colombe parce qu'elle était jeune et belle, et qu'il était jeune et beau. De pensée ambitieuse, il n'en concevait pas. Se rapprocher d'elle, c'était la seule idée qu'il eût dans la tête ; le reste, à la grâce de Dieu ! ou plutôt il ne prévoyait pas de si loin. Il n'y a pas de demain en amour.
Colombe, de son côté, avait plus d'une fois songé malgré elle au jeune étranger qui lui était apparu dans sa solitude comme Gabriel à Marie. Le revoir avait été dès le premier jour le secret désir de cette enfant jusque-là sans désir. Mais, livrée par un père à la tutelle de sa propre sagesse, elle était trop généreuse pour ne pas exercer sur elle-même cette sévérité dont les âmes nobles ne se croient dispensées que lorsqu'on enchaîne leur libre arbitre. Elle écartait donc courageusement sa pensée d'Ascanio, mais cette pensée obstinée franchissait le triple rempart élevé par Colombe autour de son coeur plus aisément qu'Ascanio lui-même n'avait franchi les murailles du Grand-Nesle. Aussi les trois ou quatre jours qui venaient de s'écouler, Colombe les avait-elle passés dans des alternatives étranges : c'était la crainte de ne pas revoir Ascanio, c'était l'effroi de se retrouver en face de lui. Sa seule consolation, c'était de rêver pendant son travail ou ses promenades. La journée elle s'enfermait, au grand désespoir de dame Perrine, réduite dès lors à un monologue éternel dans l'abîme de sa pensée. Et puis dès que la grande chaleur du jour était passée, elle venait dans cette fraîche et sombre allée baptisée par dame Perrine du nom poétique d'allée du Soir ; et là, assise sur le banc où s'était assis Ascanio, elle laissait tomber la nuit, se lever les étoiles, écoutant et répondant à ses propres pensées, jusqu'à ce que dame Perrine vînt la prévenir qu'il était temps de se retirer.
Aussi, à l'heure habituelle, le jeune homme vit tout à coup apparaître, au détour de l'allée dans laquelle il était assis, Colombe, un livre à la main. Elle lisait la Vie des Saints, dangereux roman de foi et d'amour, qui prépare peut- être aux cruelles souffrances de la vie, mais non, à coup sûr, aux froides réalités du monde. Colombe ne vit pas d'abord Ascanio, mais en apercevant une femme étrangère auprès de dame Perrine, elle fit un mouvement de surprise. En ce moment décisif, dame Perrine, comme un général déterminé, se jeta hardiment au coeur de la question.
- Chère Colombe, dit-elle, je vous sais si bonne que je n'ai pas cru avoir besoin de votre autorisation pour permettre de venir prendre l'air sous ces ombrages à un pauvre blessé qui a été frappé pour votre père. Vous savez qu'il n'y a pas d'ombre au Grand-Nesle, et le chirurgien ne répondait de la vie de ce jeune homme que s'il pouvait se promener une heure tous les Jours.
Pendant qu'elle débitait ce pieux mais gros mensonge, Colombe avait de loin jeté les yeux sur Ascanio, et une vive rougeur avait subitement coloré ses joues. Pour l'apprenti, en présence de Colombe qui s'avançait, il n'avait trouvé la force que de se lever.
- Ce n'est pas mon autorisation, dame Perrine, qui était nécessaire, dit enfin la jeune fille, c'était celle de mon père.
En disant cela avec tristesse mais avec fermeté, Colombe était arrivée jusqu'au banc de pierre où était assis Ascanio. Celui-ci l'entendit et joignant les mains :
- Pardon, madame, dit-il, je croyais... j'espérais... que votre bonne grâce avait ratifié l'offre obligeante de dame Perrine ; mais du moment qu'il n'en est pas ainsi, continua-t-il avec une douceur mêlée de fierté, je vous supplie d'excuser ma hardiesse involontaire et je me retire.
- Mais ce n'est pas moi, reprit vivement Colombe émue. Je ne suis pas maîtresse. Restez pour aujourd'hui du moins, quand même la défense de mon père s'étendrait à celui qui l'a sauvé ; restez, monsieur, ne fût-ce que pour accepter mes remerciements.
- Oh ! madame, murmura Ascanio, c'est moi qui vous remercie du fond de mon coeur. Mais en restant ne vais-je pas troubler votre promenade ? D'ailleurs la place que j'ai prise est mal choisie.
- Nullement, reprit Colombe en s'asseyant machinalement et sans y faire attention, tant elle était troublée, à l'autre extrémité du banc de pierre.
En ce moment dame Perrine, qui était là debout et n'avait pas bougé depuis la mortifiante semonce de Colombe, embarrassée à la fin de son attitude immobile et du silence de sa jeune maîtresse, prit le bras de dame Ruperte, et s'éloigna doucement.
Les deux jeunes gens restèrent seuls.
Colombe, qui avait les yeux fixés sur son livre, ne s'aperçut pas d'abord du départ de sa gouvernante, et pourtant elle ne lisait pas, car elle avait un nuage devant les yeux. Elle était encore exaltée, étourdie. Tout ce qu'elle pouvait faire comme d'instinct, c'était de dissimuler son agitation et de comprimer les battements précipités de son coeur. Ascanio, lui aussi, était éperdu, et avait éprouvé une douleur si vive en voyant que Colombe voulait le renvoyer, puis une joie si folle quand il avait cru s'apercevoir du trouble de sa bien-aimée, que toutes ces subites émotions, dans l'état de faiblesse où il se trouvait, l'avaient à la fois transporté et anéanti. Il était comme évanoui, et pourtant ses pensées couraient et se succédaient avec une puissance et une rapidité singulières. – Elle me méprise ! Elle m'aime ! se disait-il tour à tour. Il regardait Colombe muette et immobile, et des larmes coulaient sans qu'il les sentît sur ses joues. Cependant, au-dessus de leurs têtes, un oiseau chantait dans les branches. Le vent agitait à peine les feuilles. A l'église des Augustins, l'angélus du soir tintait doucement dans l'air paisible. Jamais soirée de juillet ne fut plus calme et plus silencieuse. C'était un de ces moments solennels où l'âme entre dans une nouvelle sphère, qui renferment vingt ans dans une minute, et dont on se souvient toute la vie. Ces deux beaux enfants, si bien faits l'un pour l'autre et qui s'appartenaient si bien d'avance, n'avaient qu'à étendre leurs mains pour les unir, et il semblait qu'il y eût entre eux un abîme.
Au bout de quelques instants Colombe releva la tête.
- Vous pleurez ! s'écria-t-elle avec un élan plus fort que sa volonté.
- Je ne pleure pas, répondit Ascanio en se laissant tomber sur le banc ; mais portant les mains à sa figure, il les retira mouillées de larmes. C'est vrai, dit-il, je pleure.
- Pourquoi ? qu'avez-vous ? Je vais appeler quelqu'un. Souffrez-vous ?
- Je souffre d'une pensée.
- Et laquelle ?
- Je me dis qu'il eût peut-être mieux valu pour moi de mourir l'autre jour.
- Mourir ! Quel âge avez-vous donc pour parler ainsi de mourir ?
- Dix-neuf ans ; mais l'âge du malheur devrait être l'âge de la mort !
- Et vos parents qui pleureraient à leur tour ! continua Colombe avide à son insu de pénétrer dans le passé de cette vie dont elle sentait confusément que tout l'avenir serait à elle.
- Je suis sans mère et sans père, et nul ne me pleurerait, si ce n'est mon maître Benvenuto.
- Pauvre orphelin !
- Oui, bien orphelin, allez ! Mon père ne m'a jamais aimé, et j'ai perdu ma mère à dix ans, quand j'allais comprendre son amour et le lui rendre. Mon père !... Mais de quoi vais-je vous parler, et qu'est-ce que cela vous fait mon père et ma mère, à vous ?
- Oh ! si. Continuez, Ascanio.
- Saints du ciel ! vous vous rappelez mon nom.
- Continuez, continuez, murmura Colombe en cachant à son tour la rougeur de son front dans ses deux mains.
- Mon père donc était orfèvre, et ma bonne mère était elle-même la fille d'un orfèvre de Florence appelé Raphal del Moro, d'une noble famille italienne ; car en Italie, dans nos républiques, le travail ne déshonore pas, et vous verriez plus d'un ancien et illustre nom sur l'enseigne d'une boutique. Ainsi, mon maître Cellini par exemple, est noble comme le roi de France, si ce n'est encore davantage. Raphal del Moro, qui était pauvre, maria sa fille Stephana malgré elle à un confrère presque du même âge que lui, mais qui était riche. Hélas ! ma mère et Benvenuto Cellini s'étaient aimés, mais tous deux étaient sans fortune. Benvenuto courait le monde pour se faire un nom et gagner de l'or. Il était loin : il ne put s'opposer à cette union. Gismondo Gaddi, c'était le nom de mon père, quoiqu'il n'eût jamais su qu'elle en aimait un autre, se mit hélas à haïr sa femme parce que sa femme ne l'aimait pas. C'était un homme violent et jaloux, mon père. Qu'il me pardonne si je l'accuse, mais la justice des enfants a une mémoire implacable. Bien souvent ma mère chercha contre ses brutalités près de mon berceau un asile qu'il ne respectait pas toujours. Parfois il la frappait, pardonnez-lui, mon Dieu ! tandis qu'elle me tenait dans ses bras, et à chaque coup, pour, le moins sentir, ma mère me donnait un baiser. Oh ! je me souviens à la fois, par un double retentissement de mon coeur, des coups que recevait ma mère et des baisers qu'elle me donnait.
Le Seigneur, qui est juste, atteignit mon père dans ce qu'il avait de plus cher au monde, dans sa richesse. Plusieurs banqueroutes l'accablèrent coup sur coup. Il mourut de douleur parce qu'il n'avait plus d'argent, et ma mère, quelques jours après, mourut parce qu'elle croyait n'être plus aimée.
Je restai seul au monde. Les créanciers de mon père vinrent saisir tout ce qu'il laissait, et en furetant partout pour voir s'ils n'oubliaient rien, ils ne virent pas un petit enfant qui pleurait. Une ancienne servante qui m'aimait me nourrit deux jours par charité, mais la vieille femme vivait de charité elle-même, et n'avait pas trop de pain pour elle.
Elle ne savait que faire de moi, quand un homme couvert de poussière entra dans la chambre, me prit dans ses bras, m'embrassa en pleurant, et après avoir donné quelque argent à la bonne vieille, m'emmena avec lui. C'était Benvenuto Cellini, qui était venu de Rome à Florence exprès pour me chercher. Il m'aima, m'instruisit dans son art, me garda toujours auprès de lui, et je vous le dis, lui seul pleurerait ma mort.
Colombe avait écouté, la tête baissée et le coeur serré, l'histoire de cet orphelin qui, pour l'isolement, était son histoire, et la vie de cette pauvre mère qui serait peut-être un jour sa vie ; car elle aussi elle devait épouser par contrainte un homme qui la haïrait parce qu'elle ne l'aimerait pas.
- Vous êtes injuste envers Dieu, dit-elle à Ascanio ; quelqu'un du moins, votre bon maître, vous aime, et vous avez connu votre mère, vous ; je ne puis me souvenir des caresses de la mienne ; elle est morte en me donnant le jour. J'ai été élevée par une soeur de mon père, acariâtre et revêche, que j'ai pourtant bien pleurée quand je l'ai perdue, il y a deux ans, car, faute d'autre affection, ma tendresse s'était attachée à cette femme comme un lierre au rocher. Depuis deux ans j'habite cet hôtel avec dame Perrine, et malgré ma solitude, quoique mon père vienne m'y voir rarement, ces deux années ont été et seront le plus heureux temps de ma vie.
- Vous avez bien souffert, c'est vrai, dit Ascanio, mais si le passé a été douloureux, pourquoi doutez-vous de l'avenir ? Le vôtre, hélas ! est magnifique. Vous êtes noble, vous êtes riche, vous êtes belle, et l'ombre de vos jeunes années ne fera que mieux ressortir l'éclat du reste de votre vie.
Colombe secoua tristement la tête.
- Oh ! ma mère, ma mère ! murmurait-elle.
Lorsque, s'élevant par la pensée au-dessus du temps, on perd de vue ces mesquines nécessités du moment dans ces éclairs qui illuminent et résument toute une vie, avenir et passé, l'âme a parfois de dangereux vertiges et de redoutables délires, et quand c'est de mille douleurs qu'on se souvient, quand ce sont mille angoisses que l'on pressent, le coeur attendri a souvent des émotions terribles et de mortelles défaillances. Il faut être bien fort pour ne pas tomber quand le poids des destinées vous pèse tout entier sur le coeur. Ces deux enfants, qui avaient déjà tant souffert, qui étaient restés toujours seuls, n'avaient qu'à prononcer une parole peut-être pour faire un même avenir de ce double passé ; mais pour prononcer cette parole, l'une était trop sainte et l'autre trop respectueux.
Cependant, Ascanio regardait Colombe avec une tendresse infinie, et Colombe se laissait regarder avec une confiance divine ; ce fut les mains jointes et de l'accent dont il devait prier Dieu que l'apprenti dit à la jeune fille :
- Ecoutez, Colombe, si vous souhaitez quelque chose, s'il y a sur vous quelque malheur, qu'on puisse accomplir ce désir en donnant tout son sang, et que pour détourner ce malheur il ne faille qu'une vie, dites un mot, Colombe, comme vous le diriez à un frère, et je serai bien heureux.
- Merci, merci, dit Colombe ; sur une parole de moi vous vous êtes déjà exposé généreusement, je le sais ; mais Dieu seul peut me sauver cette fois.
Elle n'eut pas le temps d'en dire davantage, dame Ruperte et dame Perrine s'arrêtaient à ce moment devant eux.
Les deux commères avaient mis le temps à profit aussi bien que les deux amoureux, et s'étaient déjà liées d'une amitié intime fondée sur une sympathie réciproque. Dame Perrine avait enseigné à dame Ruperte un remède contre les engelures, et dame Ruperte de son côté, pour ne pas demeurer en reste, avait indiqué à dame Perrine un secret pour conserver les prunes. On conçoit aisément que c'était désormais entre elles à la vie à la mort, et elles s'étaient bien promis de se revoir, coûte que coûte.
- Eh bien ! Colombe, dit dame Perrine en s'approchant du banc, m'en voulez-vous toujours ? n'aurait-ce pas été une honte, voyons, de refuser l'entrée de la maison à celui sans l'aide duquel la maison n'aurait plus de maître ? Ne s'agit-il pas de guérir ce jeune homme d'une blessure qu'il a reçue pour nous, enfin ? Et voyez-vous, dame Ruperte, s'il n'a pas déjà meilleure mine et s'il n'est pas moins pâle qu'en venant ici ?
- C'est vrai, affirma dame Ruperte, il n'a jamais eu en bonne santé de plus vives couleurs.
- Réfléchissez, Colombe, continua Perrine, que ce serait un meurtre d'empêcher une convalescence si bien commencée. Allons, la fin sauve les moyens. Vous me laissez, n'est-ce pas, lui permettre de venir demain à la brune ? Pour vous-même ce sera une distraction, mon enfant ; distraction bien innocente, Dieu merci ! puis nous sommes là, dame Ruperte et moi. En vérité, je vous déclare que vous avez besoin de distraction, Colombe. Et qui est-ce qui ira dire à messire le prévôt qu'on a un peu adouci la rigueur de ses ordres ? D'ailleurs, avant sa défense, vous aviez autorisé Ascanio à venir vous montrer des bijoux, et il les a oubliés aujourd'hui, il faut bien qu'il les apporte demain.
Colombe regarda Ascanio ; il était devenu pâle et attendait sa réponse avec angoisse.
Pour une pauvre jeune fille tyrannisée et captive, cette humilité contenait une immense flatterie. Il y avait donc au monde quelqu'un qui dépendait d'elle et dont elle faisait le bonheur et la tristesse avec un mot ! Chacun aime son pouvoir. Les airs impudents du comte d'Orbec avaient récemment humilié Colombe. La pauvre prisonnière, pardonnez-lui ! ne résista pas à l'envie de voir un éclair de joie briller dans les yeux d'Ascanio, et elle dit en rougissant et en souriant :
- Dame Perrine, que me faites-vous faire là ?
Ascanio voulut parler, mais il ne put que joindre les mains avec effusion ; ses genoux fléchissaient sous lui.
- Merci, ma belle dame, dit Ruperte avec une profonde révérence. Allons, Ascanio, vous êtes faible encore, il est temps de rentrer. Donnez-moi le bras et partons.
L'apprenti trouva à peine la force de dire adieu et merci, mais il suppléa aux paroles par un regard où il mit toute son âme, et suivit docilement la servante, le coeur inondé de joie.
Colombe retomba toute pensive sur le banc, et pénétrée d'une ivresse qu'elle se reprochait et à laquelle elle n'était pas habituée.
- A demain ! dit d'un air de triomphe, en quittant ses hôtes, dame Perrine qui les avait reconduits ; et vous pourrez bien, si vous voulez, jeune homme, revenir comme cela tous les jours pendant trois mois.
- Et pourquoi pendant trois mois seulement ? demanda Ascanio qui avait rêvé d'y revenir toujours.
- Dame ! répondit Perrine, parce que dans trois mois Colombe se marie avec le comte d'Orbec.
Ascanio eut besoin de toute l'énergie de sa volonté pour ne pas tomber.
- Colombe se marie avec le comte d'Orbec ! murmura Ascanio. Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! je m'étais donc trompé ! Colombe ne m'aime pas !
Mais comme en ce moment dame Perrine refermait la porte derrière lui, et que dame Ruperte marchait devant, ni l'une ni l'autre ne l'entendirent.

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