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Scène 4

                              SCENE IV
Les mêmes, Ebba, puis Steinberg, Monaldeschi et Paula.

                              Christine, à Ebba.
Te voilà seule, Ebba ?

                              Ebba.
                    Seule.

                              Christine.
                              Tant mieux ! Ecoute.
Sur certain serviteur j'ai conçu quelque doute ;
En vous accusant tous, je veux sonder sa foi ;
De ce que je dirai, ne prends donc rien pour toi.

                              Ebba.
Sur un doute, un instant, – Dieu vous garde, madame,
A d'injustes soupçons d'abandonner votre âme !
Les bienfaits dont nous a comblés votre bonté
Doivent vous garantir notre fidélité.
                              Monaldeschi, entrant avec Steinberg et Paula.
Notre fidélité... Sans doute que la reine
Ne la soupçonne pas ?...

                              Christine.
                              Non ; mais je suis en peine
De comprendre comment des pensers, des secrets,
Que je n'ai confiés qu'à des amis discrets,
Qui devaient en sentir le poids et l'importance,
D'un vol aussi léger franchissant la distance,
Peuvent, d'un bout du monde à l'autre parvenus,
Dans leurs moindres détails être sitôt connus.

                              Monaldeschi. regardant Paula.
Ah !...

                              Christine.
          D'une trahison que pourtant je soupçonnes
J'ignore encore l'auteur et n'accuse personne.

                              Monaldeschi, à Paula.
La Gardie a parlé.

                              
Christine, continuant.
                    Mais il m'est bien permis
De croire qu'elle part de l'un de mes amis.
Vous êtes mes amis.

                              Steinberg, montrant Ebba.
                    Vous n'avez pu, je pense,
De ma femme un instant soupçonner l'innocence ;
Pour moi, ce crime affreux me fût-il imputé,
Je me crois trop connu de Votre Majesté...

                              Monaldeschi.
Avec cet accent vrai l'innocence s'exprime.
Non, l'on ne vous croit pas capable d'un tel crime ;
Et peut-être pourrais-je, en ce doute pressant,
Guider la reine... Mais accuser un absent...

                              Christine.
Un absent, dites-vous, marquis ? C'est un prodige
Comme le dévouement à coup sûr nous dirige !
Sur le coupable aussi j'ai bien quelque soupçon ;
Pourtant j'hésite encore à prononcer son nom.

                              Monaldeschi, vivement.
Madame, cependant, il faut trouver le traître ;
Je m'en remets au temps de le faire connaître ;
Mais, une fois connu, que Majesté,
Loin repoussant tout conseil de bonté,
Ne pardonne jamais cette sanglante injure,
C'est ce dont à ses pieds ici je la conjure.

                              Christine.
Que vous partagez bien l'outrage qu'on me fait,
Marquis ! – Qu'a mérité l'auteur d'un tel forfait ?

                              Monaldeschi, hésitant.
Il mérite...
                              Christine.
          Parlez plus haut.

                              Monaldeschi.
                              Le misérable,
De haute trahison envers son roi coupable,
Quoiqu'un jeu du hasard ait trompé son effort,
Sans pitié ni pardon a mérité la mort.

                              Christine.
La mort !... Mais en ces lieux votre reine outragée,
Sans juge et sans bourreau, peut-elle être vengée ?
Et, servant mon pouvoir en vain évanoui,
Si je le condamnais, le frapperiez-vous ?...

                              Monaldeschi.
                                                  Oui.
Si par quelqu'un de nous la mort est méritée,
J'offre d'exécuter la sentence portée.
Si je suis criminel, par un juste retour,
Pour juge et pour bourreau je l'accepte à mon tour.

                              Christine.
Eh bien, puisque vous-même avez porté la peine,
Je vous engage ici ma parole de reine
Que le coupable, atteint de haute trahison,
Doit n'attendre de moi ni pitié ni pardon.
Laissez-moi.

                              Paula, bas, à Monaldeschi.
                    Partons-nous ?

                              Monaldeschi, bas, à Paula.
                              Oui ; mais pars la première.
Prends un cheval, et va m'attendre à la clairière.
Je vais seller le mien moi-même, et je reviens
Prendre quelques papiers, de l'or. – Tu te souviens ?
A la clairière, au bout du parc.
Il sort. - Sentinelli paraît.

                              Christine.
                              Je vous le livre !...
Que, dans une heure au plus, il ait cessé de vivre...
Elle sort.

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