Scène 4
SCENE IV
Christine, seule.
Une heure !... une heure encore et tout s'achèvera !
Vienne donc le moment ;... mon âme quittera
Ce monde... où devant moi tour à tour j'ai vu naître
Tous ces plaisirs d'un jour que l'homme peut connaître
Pouvoir, amour, science ; et, sans les regretter,
Moi qui les épuisai, je pourrai les quitter ;
Car j'ai trouvé toujours au fond de chaque joie
Quelque chose d'amer qui vers le ciel renvoie...
Pour guider tout un peuple en ses rudes chemins,
Le Seigneur avait mis un flambeau dans mes mains.
Je vis que ce flambeau, de sa flamme trop forte,
Brûle toujours la main de l'élu qui le porte,
Et j'approchai bientôt, voyant mes voeux déçus,
Le flambeau de ma bouche, et je soufflai dessus !
J'avais une âme jeune et pleine d'espérance ;
Elle appelait l'amour, qu'il fût joie ou souffrance ;
Mais l'amour, que mon exigeait, les surprit,
Et mon coeur se ferma sans que nul le comprit.
De la science alors poursuivant le mystère,
Je voulus me mêler aux sages de la terre !
Lever un coin du voile où mes yeux indiscrets
Croyaient du Créateur surprendre les secrets ;
Je vis que, dans la nuit où notre esprit se plonge,
Tout était vanité, déception, mensonge !
Que sur l'éternité Dieu seul était debout,
Et qu'excepté de lui... l'on doit douter de tout.
Vienne donc le moment, je l'attends sans alarmes ;
Mais, je le sens, mon Dieu ! mon coeur est plein de larmes,
Car, parmi tous mes jours, un jour qui fut affreux
Y laisse un souvenir sanglant et douloureux !
Vous saviez cependant, vous, quel était son crime,
Et si c'était à moi d'épargner la victime...
D'ailleurs, une autre main...
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