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Chapitre XVII


Grenade, 27 octobre.

Cependant une chose nous inquiétait : nous avions appris en montant en voiture qu'une diligence se dirigeant sur Séville avait les devants sur nous. Comme nous, cette diligence devait souper à Val de Penas, et ce n'est point à l'Espagne que l'on peut appliquer ce proverbe pythagoricien : Quand il y en a pour un, il y en a pour deux. Ce n'était point une vaine rumeur, nous étions en effet distancés par une voiture rembourrée de voyageurs. Aussi, en arrivant à l'hôtellerie, trouvâmes-nous les tables garnies, sinon de victuailles, du moins de convives.
Nous nous répandîmes aussitôt dans l'hôtel, ce qui fit froncer le sourcil aux douze voyageurs. Nous devions explorer tout l'établissement. Après l'exploration, le rendez-vous général était dans la salle à manger. Dix minutes après, nous étions réunis, à l'exception d'Alexandre et de Desbarolles. J'avais découvert la cuisine, et je m'étais entendu avec le chef. Giraud avait découvert la chambrière, et s'était entendu avec elle pour les lits. Boulanger avait découvert des marrons et en apportait plein ses poches. Maquet avait découvert la poste, et avait appris qu'il n'y avait pas plus de lettres pour lui à Val de Penas qu'à Madrid et à Tolède.
Alexandre et Desbarolles arrivèrent. En ouvrant les portes au hasard, ils avaient découvert des choses bien autrement charmantes que tout ce que nous avions découvert, nous. Je ne vous dirai point ce qu'Alexandre et Desbarolles avaient découvert, madame ; qu'il vous suffise seulement de savoir que les deux imprudents seraient revenus changés en cerfs, comme Actéon... si le temps des métamorphoses n'était point passé. Il nous restait à découvrir une place à table.
Les premiers venus, enchantés de nous voir réunis, et rassurés par cette réunion à l'endroit des découvertes que nous pouvions faire, s'empressèrent de se serrer et de nous offrir l'espace que nous ambitionnions. Le souper commença. Il va sans dire que nous avions demandé du Val de Penas. Le premier qui goûta l'affreuse liqueur qu'on nous servit la cracha incontinent sous la table. « Eh bien ! » fis-je à Desbarolles.
Il faut vous dire, madame, que Desbarolles nous entretenait depuis quinze jours des délices que réservait à notre sensualité la province que nous traversions. Desbarolles fit un signe de la tête et appela le mosso. Le mosso accourut.
« N'avez-vous pas de meilleur vin que celui-ci ? demanda-t-il. – Si fait, répondit le mosso. – Alors, donnez-en. » Le mosso disparut, et cinq minutes après rentra, deux bouteilles à la main. « Est-ce ce que vous avez de meilleur ? demanda Desbarolles. – Oui, monsieur. »
Nous goûtâmes cette seconde édition. Elle était revue et corrigée, c'est-à- dire pire encore que la première. Les imprécations commencèrent à pleuvoir sur Giraud et sur Desbarolles, qui nous avaient promis du nectar, tandis qu'on ne nous donnait pas même de la piquette.
« Allons, allons, dit Giraud en se levant, il ne s'agit pas ici de faire les messieurs ; nous avons promis à la société du vrai Val de Penas... Allons le chercher où il est. – Allons », dit Desbarolles en se levant à son tour et en prenant sa carabine. Tous deux sortirent.
Dix minutes après ils reparurent, portant chacun par une anse un énorme pot de terre contenant cinq ou six litres : il était plein d'un vin noir et épais qu'il dégorgea immédiatement dans nos verres. Nous le goûtâmes celui-là : c'était bien du Val de Penas, avec son âpre et excitante saveur. Giraud et Desbarolles étaient allés le chercher au cabaret.
Ce n'est pas pour vous que je donne ces détails, madame ; vous vous contentez, vous, – tous ceux qui vous connaissent savent cela, – de tremper vos lèvres dans un verre d'eau, moyennant quoi vous êtres rafraîchie et désaltérée. Mais les lettres que j'ai l'honneur de vous écrire sont destinées à une certaine publicité, et il est bon que de moins immatériels que vous sachent, madame, où se trouve ce fameux Val de Penas inconnu dans les posadas et posadores.
Ce vin épais et âpre, qui, pour les véritables buveurs, a l'avantage de ne point désaltérer, nous conduisit tout naturellement au désir de trouver les meilleurs lits possibles, afin de leur confier pendant quatre ou cinq heures nos personnes tout endolories par les soubresauts auxquels notre diligence s'était livrée tout le long de la route, et dont nous avions naturellement notre part. Ceci rentrait dans la spécialité de Giraud, qui avait découvert la chambrière.
Cette chambrière était une enfant de quatorze ans, grande comme l'est en France une petite fille de dix. Elle avait natté avec une si négligente élégance ses immenses cheveux noirs, elle lançait de ses yeux bruns un feu si savamment combiné avec celui des interlocuteurs, qu'à la première vue elle s'attirait l'attention. En effet, cette enfant nous força de la regarder plus curieusement que jamais femme belle ou laide ne l'aurait pu faire. Tout en elle, accent, sourire, poses, signifiait : je suis femme, admirez-moi ou aimez-moi, mais surtout regardez-moi.
Cette singulière créature, que nous nous contentâmes de regarder, nous indiqua nos chambres en nous demandant ce que nous désirions. Alors chacun ouvrit son nécessaire, fit sa demande d'eau chaude ou froide, et commença sa toilette nocturne. Soit naïveté, soit impudence, rien n'inquiéta notre muchacha. Elle continua son service, se cambrant et se glissant entre nous comme une couleuvre, comprenant et exécutant nos moindres demandes, soit verbales, soit mimiques, avec une agilité, une ponctualité et une intelligence prodigieuses. Persuadés que nous ne la verrions pas le lendemain, nous lui donnâmes deux piécettes et la renvoyâmes.
A minuit, comme nous l'avions prévu, le mosso nous réveilla. Nous vîmes alors que c'est une tactique familière à tous les mossos du midi de l'Espagne ; mais nous ne tînmes aucun compte de l'appel, et nous nous contentâmes de répondre à l'instar des garçons de restaurant : « C'est bien ! on y va ! » Il est bien compris qu'à l'instar encore des garçons de restaurant, nous n'y allâmes point. Nous savions que la voiture c'était nous, comme Louis XIV savait que l'Etat c'était lui.
A trois heures, le mayoral vint nous réveiller en personne. Sur les talons du mayoral marchait notre petite servante.
« O senores ! dit-elle du ton le plus larmoyant qu'elle put trouver, la padrona m'a vue recevoir les deux piécettes que vous m'avez données, elle me les a prises, et je n'ai plus rien. » Et tout en parlant, les prunelles de jouer, les petites mains d'implorer, les cheveux de rouler sur ses épaules brunes. Nous ne crûmes pas un mot de l'histoire, et cependant nous lui donnâmes la piécette qu'elle demandait.
Pauvre petite ! si pour une piécette d'or tu prodigues autant de sourires, d'adorables clins d'yeux et de frôlements de tes mains mignonnes, auras-tu beaucoup de piécettes, ou plutôt ne perdras-tu pas, avant le temps, tes sourires caressants et tes regards humides et magnétiques ?
Nous partîmes ; au bout de deux heures le jour parut, et en paraissant nous envoya, avec son premier souffle, les plus douces émanations que nous eussions encore respirées. Tout cela nous arrivait de la Sierra Morena, dans laquelle nous allions entrer. C'était un composé des arômes que jettent à la brise les lauriers-roses, les arbousiers aux fruits de pourpre, et les arbustes résineux, qui sont à cette magnifique chaîne de montagnes ce que le gazon est à la prairie.
La limite de l'Andalousie est marquée par une colonne qu'on appelle la pierre de Sainte-Véronique, probablement parce que sur cette pierre est gravée la face du Christ. Dans une rencontre entre les carlistes et les christinos, la colonne a été criblée de balles, et miraculeusement aucune de ces balles n'a touché la face de Notre-Seigneur. Nous mîmes pied à terre à Despena Perros. Rien de plus suave et de plus désolé en même temps, madame, que ce chemin que nous suivions.
Partout, comme je vous l’ai dit, des myrtes, des lentisques, des arbousiers, c'est-à-dire des fleurs, des fruits, des parfums. Puis, au milieu de cette immense oasis, de temps en temps, une malheureuse maison abandonnée depuis les guerres de 1809, et qui regarde passer les voyageurs avec ses fenêtres sans châssis, comme ferait un mort avec des orbites sans prunelles. Alors on approche avec curiosité de cette carcasse vide et silencieuse, et l'on reconnaît qu'en l'absence de l'homme elle est devenue la propriété des ramiers et des renards, hôtes incompatibles en apparence, mais qui s'accommodent à merveille, les uns du pignon, les autres de la cave.
Je ne puis trop vous dire, madame, le temps que nous mîmes à traverser cette admirable chaîne de montagnes, si redoutée autrefois à l'endroit de ses voleurs. Je sais seulement que nous arrivâmes avec une grande faim à La Carolina, petite ville colonisée par Charles III, où nous devions trouver, nous assurait notre Guide en Espagne, le langage, les moeurs, et la rigide propreté de l'Allemagne, à laquelle Charles III avait emprunté ses premiers colons.
Nous n'y trouvâmes, nous, que des maisons à porte si basse, qu'en franchissant le seuil de celle qu'on nous indiquait comme une auberge, Maquet faillit s'y tuer. Malheureusement, derrière ces portes fatales, nous ne trouvâmes que quelques tasses de chocolat qu'on nous fit payer six fois leur valeur. Après La Carolina vint, comme ville importante, Baylen, tristement célèbre par la capitulation du général Dupont. Là, 17 000 Français se rendirent à 40 000 Espagnols. Nous laisserons aux historiens à résoudre ce problème de honte, première atteinte portée à la virginité de notre gloire napoléonienne.
Il faut vous dire, madame, qu'avec un goût parfait, je ne sais plus quel journal espagnol a, pendant le séjour des princes français à Madrid, ouvert dans ses colonnes une souscription pour ériger un monument au vainqueur de Baylen. Or, comme le vainqueur de Baylen est déjà grand cordon de la Légion d'honneur, vous voyez qu'il sera tout à la fois comblé par les Espagnols et par les Français.
Le soir, aux rayons du soleil couchant, nous nous sommes approchés de Jaen, ancienne capitale du royaume du même nom. Tout en nous approchant, nous trouvâmes pour la première fois le Guadalquivir, Oued-el- Kebir, c'est-à-dire la grande rivière. Les Maures, étonnés de voir tant d'eau à la fois, saluèrent le fleuve de cette exclamation dont leurs successeurs ont fait, eux, Guadalquivir.
Jaen est une immense montagne, fauve comme la peau d'un lion. Le soleil en la dévorant lui a donné cette teinte bistrée, sur laquelle d'anciennes murailles mauresques détachent leurs capricieux zigzags. La ville africaine, bâtie sur la hauteur, est descendue peu à peu jusqu'à la plaine. Les rues commencent au premier contrefort, et vont en montant du moment où l'on dépasse la porte de Baylen.
Nous fîmes halte dans une auberge d'où nous ne devions partir qu'à minuit. Mes compagnons profitèrent de ce repos pour grimper au plus haut de la montagne. Quant à moi, je suis resté à l'hôtel. J'avais quelque chose de mieux à faire, j'avais à vous écrire. Ils sont revenus avec cet enthousiasme acharné de gens qui veulent absolument inspirer aux autres le regret de n'avoir pas vu ce qu'ils ont vu. Ils ont vu, éclairé par les derniers rayons du soleil, le paysage magnifique que nous venions de parcourir, et, éclairée par des torches, la gigantesque cathédrale qui semble vouloir lutter de masse et de hauteur avec la montagne à laquelle elle est adossée. Cette cathédrale possède dans son trésor, – les chanoines du moins l'ont assuré à nos compagnons, madame, – le mouchoir authentique sur lequel sainte Véronique recueillit, avec la sueur de sa passion, l'empreinte du visage de Notre-Seigneur.
A minuit, nous sommes partis. Il parait que l'heure des voleurs change selon les Espagnes. Vous vous le rappelez, madame, dans la Manche, c'était de minuit à trois heures qu'ils veillaient ; en Andalousie, c'est de minuit à trois heures qu'ils dorment. Au reste, on nous en promet de féroces entre Grenade et Cordoue. On ne peut pas bien précisément nous dire juste l'endroit ; mais quand nous nous approcherons de cet endroit, nous serons fixés. Quant à ceux-là, j'ai promis au monde qu'aucune considération ne nous empêcherait de les voler. Nous partîmes à minuit, sans avoir besoin cette fois d'être éveillés ni par un mosso à culotte jaune, ni par une sémillante chambrière ; car nous ne nous couchâmes point. Le mayoral nous promettait Grenade pour le lendemain sept heures du matin.
Le lendemain, en ouvrant les yeux, nous réclamâmes cette Grenade tant promise ; on ne l'apercevait point encore : mais nous voyions se dessiner à l'horizon les pittoresques dentelures de la Sierra Nevada, à laquelle Grenade est adossée. Les neiges qui couvraient ces dentelures étaient teintes d'une admirable couleur rosée.
Nous avancions de plus en plus au sein d'une végétation africaine ; aux deux côtés de la route nous laissions de gigantesques aloès et de monstrueux cactus. Au loin et de place en place, un palmier aux aigrettes immobiles semblait jaillir du milieu de la plaine, comme un enfant d'une autre terre oublié par les anciens conquérants de l'Andalousie. Enfin Grenade apparut.
Tout au contraire des autres villes d'Espagne, Grenade envoie quelques-unes de ses maisons au-devant des voyageurs. Une lieue avant d'aborder la cité reine, on rencontre sur la route, comme des pages et des dames d'honneur précédant leur maîtresse, une foule de bâtisses qui semblent prendre la plaine elle-même pour jardins ; enfin, ces maisons se pressent, se serrent, forment une masse compacte ; on franchit une ceinture de murailles, on est à Grenade.
Avec ce joli nom de Grenade, madame, vous avez déjà bâti dans votre imagination une ville du Moyen Age, moitié gothique, moitié mauresque. Elle élance ses minarets jusqu'au ciel, elle ouvre ses portes en ogives orientales et ses croisées en trèfle sur des rues ombragées par des dais de brocart. Hélas ! madame, soufflez sur ce charmant mirage, et contentez-vous de la pure et simple vérité, la pure et simple vérité est déjà assez belle.
Grenade est une ville à maisons assez basses, à rues étroites et tortueuses ; ses fenêtres, ouvertes carrément et presque toujours sans ornementation, sont fermées par des balcons de fer aux grillages entrecroisés, et quelquefois entrecroisés de telle façon, qu'on aurait peine à passer le poing à travers les interstices de ces grillages. C'est sous ces balcons que vont soupirer le soir les amoureux Grenadins. C'est du haut de ces balcons que les belles Andalouses écoutent les sérénades ; car, ne vous y trompez point, madame, nous sommes ici en pleine Andalousie, la patrie des Almaviva et des Rosine, et tout y est encore comme au temps de Figaro et de Suzanne.
Giraud et Desbarolles ont pris la responsabilité de notre logement. Ni l'un ni l'autre ne croyait revoir Grenade, aussi ont-ils salué chaque maison avec des cris de joie. Le fait est, madame, que je commence à croire qu'il y a un plus grand bonheur que celui de voir Grenade, c'est celui de la revoir. En conséquence, Giraud et Desbarolles nous ont conduits chez leur ancien hôte, le sieur Pepino. Ce sont eux qui l'ont baptisé ainsi. Ne me demandez pas pourquoi, madame, je l'ignore. Ce brave homme demeure calle del Silencio. Avec des compagnons aussi bruyants que nous, la rue du Silence risque fort de changer de nom.
Maître Pepino tient una casa de pupillos, ce qui correspond à certains hôtels des environs de la Sorbonne, lesquels donnent à manger et à coucher à nos étudiants. Je ne sais pas encore ce que les pupillos de maître Pepino étaient. Si je l'apprends un jour, madame, j'aurai l'honneur de vous en faire part. A peine entrés dans la maison, nous avons demandé des bains. Maître Pepino nous a regardés avec étonnement, et a répété : Banos ! banos ! en homme qui ne sait absolument pas ce qu'on veut lui dire. Nous n'avons pas poussé plus loin l'indiscrétion.
Nous avons procédé, en conséquence, à l'installation, ne pouvant procéder à autre chose. Maître Pepino a fait déménager trois ou quatre pupillos, et nous a livré leurs cuartos. Il résulte de cette évolution que j'ai à moi seul une jolie petite chambre de laquelle je vous écris. Nos compagnons, du moins à ce que j'ai entendu dire, sont aussi à peu près casés. Il faut vous dire, madame, que notre arrivée était connue. Monsieur Monnier, je crois, avait écrit à l'avance. Il en résulta qu'une heure après mon arrivée, et comme j'étais en train de vous écrire, j'ai reçu une députation des rédacteurs du journal El Capricho, lesquels m'ont apporté de charmants vers imprimés en or sur du papier de couleur. J'ai pris une simple feuille de papier blanc, n'en ayant pas d'autre, et j'ai répondu à leur politesse par ce dizain, qui aura du moins eu à leurs yeux le mérite de l'impromptu, s'il n'en a pas d'autre.

A Messieurs les rédacteurs du Caprice

          Pourquoi quand le Seigneur eut d'amour et de miel
          Fait Grenade, la soeur des deux fières Castilles,
          A-t-il voulu semer sous ses noires mantilles
          La moitié des rayons qu'il gardait pour son ciel ?
          Pourquoi, donnant jadis la douce sérénade
          Aux anciens troubadours chantant les anciens preux,
          Donne-t-il aujourd'hui les poètes heureux
          Qui parfument encor les jardins de Grenade ?
          C'est que Dieu n'a créé Grenade et l'Alhambra
          Que pour le jour où Dieu du ciel se lassera.

Il faut vous dire, madame, que je n'ai encore vu que bien peu de Grenade, et pas du tout l'Alhambra. Mais je parle de confiance, certain que je suis d'avance de trouver tout cela merveilleux. Avec nos poètes se trouvait monsieur le comte de Ahumeda, grand chasseur, que j'ai mis aux prises avec tout notre arsenal, qu'il examine et admire tandis que je vous écris.
Monsieur de Ahumeda me paraît un fort charmant hidalgo, et je suis d'avance convaincu que c'est un de ces hommes que je serai désespéré de n'avoir vu qu'en passant.
Derrière nos poètes et derrière monsieur le comte de Ahumeda s'est présenté un de nos compatriotes, tellement espagnolisé, que je l'ai tout bon, tout franc, pris pour un Espagnol ; c'est un voyageur enragé qui, passant à Grenade avec un daguerréotype, s'y est arrêté en passant. Voici deux ans qu'il habite Grenade, madame, et qu'il ne peut point se décider à la quitter. Circé retenait par la force de ses enchantements, Grenade retient par le seul charme de son sourire. Couturier, c'est le nom de notre compatriote, madame, s'est mis à notre disposition comme cicérone. Nous avons accepté, et le premier service que je réclame de lui est de me conduire à la poste, où, dans cinq minutes, j'aurai déposé cette lettre, que je charge de vous porter tous les respects de mon coeur. Ensuite, madame, nous visiterons le Généralife et l'Alhambra.

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