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Chapitre LXVIII
Une dernière ascension

Arona est une des plus charmantes petites villes parmi celles qui dominent le lac Majeur, et on s'y arrêterait rien que pour la vue qu'on découvre des fenêtres de l'hôtel, si on n'y était plus impérieusement appelé encore par la curiosité qu'inspire le colosse de saint Charles.
Car c'est à Arona que naquit, en 1538, le fameux archevêque de Milan, le cardinal Borromée, qui, par l'emploi qu'il fit de ses richesses, dont il fonda des établissements de charité, et par le dévouement avec lequel il exposa ses jours dans la peste de 1576, mérita de son vivant le titre de saint, qui fut ratifié après sa mort.
Aussi s'est-il emparé de tous les souvenirs de la ville. Je visitai d'abord le dôme où est son tombeau : ce monument est déjà une de ces églises d'Italie coquettement décorées dont Notre-Dame de Lorette essaye de nous donner une copie, et qui nous paraissent si étrangement pimpantes au premier coup d'œil, à nous autres hommes du Nord, habitués aux pierres grises de nos sombres cathédrales. J'entrai dans celle-ci au moment où une messe des morts venait de finir. J'appelai un long et mince sacristain qui éteignait avec sa calotte une douzaine de cierges qui brûlaient autour d'une bière vide ; il me fit signe qu'aussitôt cette besogne terminée, il serait à moi. Pour ne pas perdre mon temps, je me mis à regarder quelques tableaux de Ferrari et d'Appiani qui garnissent les chapelles latérales ; ni les uns ni les autres, quoique fort vantés aux étrangers, ne me parurent remarquables.
Le sacristain avait éteint ses cierges. Il revint à moi et me conduisit dans la chapelle souterraine : c'est là que repose le corps de saint Charles Borromée. Son squelette est couché dans une châsse, revêtu de ses habits épiscopaux, les mains couvertes de gants violets, la mître au front, et un masque de vermeil sur la figure ; toute la chapelle est de marbre noir avec des ornements d'argent massif. Dans une petite armoire, à côté de la châsse, sont renfermés, à titre de reliques, les draps ensanglantés sur lesquels on fit l'autopsie du saint, mort à quarante-six ans d'une phtisie pulmonaire.
L'archevêque de Milan est un des derniers saints canonisés par la cour de Rome. Ce fut en 1610, vingt-six ans seulement après sa mort, que Paul V, ratifiant le culte général qui était rendu à son tombeau, le convertit en autel ; aussi, autour de cette existence presque contemporaine, ne retrouve-t-on aucune des vieilles légendes du martyrologe ; ce fut la propre vie de saint Charles qui fut un long miracle : né au milieu des désordres civils et religieux, vivant au milieu de la corruption de la prélature italienne, il fut le restaurateur obstiné de la discipline ecclésiastique, dont lui-même il donna l'exemple par son austérité. Durant ses études à Milan et à Pavie, il ne connut, comme autrefois saint Basile et saint Grégoire de Naziance à Athènes, que les deux rues qui conduisaient, l'une à l'église, l'autre aux écoles publiques. à douze ans, il fut pourvu d'une des plus riches abbayes de l'Italie : c'était un fief de sa famille ; à quatorze ans, d'un prieuré que lui résigna le cardinal de Médicis, son oncle, en montant sur le saint-siège sous le nom de Pie IV. Enfin, à vingt-trois ans, il était cardinal.
Ce fut alors que, pourvu des plus riches bénéfices de la Lombardie, revêtu de l'un des premiers rangs dans la hiérarchie ecclésiastique, entouré de ces séductions mondaines auxquelles cédaient à cette époque jusqu'aux souverains pontifes eux-mêmes, il fit trois parts de son bien : l'une pour les pauvres, la seconde pour l'église, et la troisième pour sa maison. Un si grand abandon, une vie si chrétienne, lui avaient déjà acquis l'amour de tous, lorsqu'un événement ajouta à ce sentiment celui du respect : un jour que le saint prélat faisait sa prière dans la chapelle archiépiscopale, un assassin entra dans l'église ; c'était un moine de l'ordre des Humiliés, ordre dont saint Charles avait attaqué les débordements.
Il s'approcha de l'officiant, et, au moment où l'on chantait cette antienne : « Non turbetur cor vestrum neque formidet, » il lui tira à bout portant un coup d'arquebuse. Saint Charles, jeté sur ses mains par la commotion, se releva, et, quoique se croyant blessé à mort, il ordonna de continuer l'office divin, s'offrant pour cette fois en sacrifice aux fidèles à la place du fils de Dieu. La prière finie, saint Charles se releva, et la balle, arrêté dans ses ornements épiscopaux, tomba à ses pieds : cet événement fut considéré comme un miracle.
Quelque temps après, la peste éclata à Milan. Saint Charles, aussitôt, et malgré les représentations de son conseil, s'y transporta avec toute sa maison. Pendant six mois, il resta au centre de la contagion, portant au chevet de tous les mourants abandonnés par l'art le secours de la parole ; c'est alors qu'il vendit cette troisième part de biens qu'il s'était réservée pour lui-même : vaisselle d'or et d'argent, vêtements et meubles, statues et tableaux ; puis, lorsqu'il n'eut plus rien à donner aux pauvres et aux mourants, il pensa à s'offrir lui-même à Dieu comme une victime expiatoire : partout où le fléau était le plus cruel et le plus acharné, il alla pieds nus, la corde au cou, la bouche collée aux pieds d'un crucifix, priant le Seigneur avec des larmes de prendre sa vie en échange de celle de ce peuple qu'il frappait ainsi. Enfin, soit que le terme du fléau fût arrivé, soit que les prières du saint fussent entendues, la colère de Dieu remonta au ciel.
à peine sorti de cette longue épreuve, Charles reprit le cours de sa vie pastorale ; mais Dieu avait accepté le sacrifice offert : ses forces étant épuisées, une phtisie pulmonaire se déclara, et, dans la nuit du 3 au 4 novembre 1584, le saint envoyé termina sa laborieuse carrière.
Cent ans après, les habitants des rives du lac, réunis à la famille de saint Charles, lui votèrent une statue colossale dont l'exécution fut confiée aux soins de Cerani ; on tailla une esplanade dans le coteau voisin de la ville, on éleva un piédestal de trente-quatre pieds sur cette esplanade, et, sur ce piédestal, on dressa la statue du saint : cette statue est haute de quatre-vingt-seize pieds.
Le sacristain avait garde de ne point me conduire à cette merveille, et moi, de mon côté, je n'avais garde de passer sans la visiter. Nous nous mîmes en route, et, de loin, nous aperçûmes le saint évêque dominant le lac, portant un livre sous un bras et donnant de l'autre main la bénédiction épiscopale à la ville où il est né.
Les proportions de cette statue sont si bien en harmonie avec les montagnes gigantesques sur lesquelles elle se détache, qu'elle semble, au premier aspect et à une certaine distance, être de taille naturelle : ce n'est qu'en approchant, qu'elle grandit démesurément et que toutes ses parties prennent des proportions réelles et arrêtées. Pendant que j'étais occupé d'examiner le colosse, sur l'un des doigts duquel venait de se poser un corbeau qui semblait à peine gros comme un moineau franc, le sacristain dressa une immense échelle contre le piédestal, et, montant les trois ou quatre premiers échelons, il m'invita à le suivre.
Le lecteur sait mon peu de prédilection pour les ascensions aériennes ; il ne s'étonnera donc point qu'avant de me hasarder à sa suite, je lui aie demandé où il allait ; il allait dans la tête de saint Charles.
Quelque curieuse que me parût cette visite intérieure, j'éprouvais fort peu d'entrain à l'accomplir : cette échelle longue et pliante, qui devait me conduire d'abord sur un piédestal sans parapet, me paraissait un chemin assez hasardeux pour un voyageur aussi sujet aux vertiges que je le suis ; d'ailleurs, arrivé sur le piédestal, je n'étais qu'au quart de mon ascension, et je ne voyais nullement à l'aide de quelle machine je parviendrais au terme indiqué ; j'en fis l'observation à mon sacristain, qui me montra, sous un pli de la robe de la statue, une espèce de couloir qui conduisait à l'intérieur. Là, me dit-il, je trouverais un escalier parfaitement commode ; tout l'embarras était donc de gravir jusqu'à la plate-forme du piédestal ; je fis encore quelques observations sur les accidents du chemin, mais mon guide, sentant que je faiblissais, insista avec une nouvelle force ; alors la honte me prit de reculer là où un sacristain marchait si ferme ; je lui fis signe de continuer sa route, et je me mis à le suivre de si près, que j'arrivai presque aussitôt que lui sur le piédestal. Il était temps : les montagnes, la ville et le lac commençaient à tourner d'une manière désordonnée ; si bien que je n'eus que le temps de fermer les yeux, de me cramponner à un pan de la robe du saint, et de m'asseoir sur le petit doigt de son pied gauche. Grâce à cette assiette plus tranquille, je sentis bientôt se calmer le bourdonnement de mes oreilles, j'acquis la conviction de l'immobilité de la base sur laquelle je reposais, et, sentant que j'avais repris mon centre de gravité, je me hasardai à rouvrir les yeux : je retrouvai les montagnes, le lac et la ville à leur place ; il n'y avait que mon sacristain d'absent. Je tournai mes regards de tous côtés, il était complètement disparu ; je l'appelai, il ne me répondit pas : décidément, cet homme avait été créé et mis au monde pour me faire damner.
Je me mis à sa recherche, présumant qu'il jouait à la cache-cache et que je le retrouverais dans quelque pli de ce bronze colossal ; je commençai en conséquence à faire le tour de la statue ; c'était chose assez facile sur les côtés ; mais, en tournant, je trouvai sur mon chemin la queue de la robe du saint archevêque, et il fallut m'aventurer dans les flots de ce vêtement qui pendait au bord du piédestal ; enfin, tantôt en me cramponnant, tantôt marchant sur mes deux pieds, tantôt rampant à quatre pattes, je parvins à passer sans accident cette mer de bronze et à mettre le pied sur sa rive de granit. Je ne m'étais pas trompé : mon farceur m'attendait à moitié chemin d'une échelle de corde qui s'introduisait sous un pan de la robe du saint et conduisait dans l'intérieur de la statue. Il se mit à rire en m'apercevant, enchanté de l'espièglerie qu'il m'avait faite et que je le soupçonne de renouveler chaque fois qu'un voyageur innocent a l'imprudence de le suivre. En effet, il aurait aussi bien pu placer toute de suite l'échelle de bois en face de l'échelle de corde ; mais il tenait, à ce qu'il paraît, à me faire dans les plus grands détails les honneurs de son archevêque ; je n'ai jamais vu d'homme d'église si frétillant et si peu préoccupé de la dignité de son costume.
Au reste, je ne fis pas mine de lui garder rancune de sa gentillesse ; je m'approchai de lui d'un air dégagé, et, prenant mon temps, je l'empoignai par le bas de la jambe.
Alors commença notre seconde ascension qui, quoique de huit ou dix pieds seulement, n'était pas la plus commode ; cependant, je m'en tirai à mon honneur, grâce au point d'appui que je m'étais créé, et, au bout de quelques instants, je me trouvai dans l'intérieur du saint.
Mon premier soin fut de chercher de tous côtés, à la lueur de la lumière qui venait du haut, l'escalier promis ; mais ce fut là que je reconnus dans quel guet-apens j'avais été attiré : le seul et unique moyen d'ascension qui existât était une espèce d'échelle formée par une multitude de barres de fer posées en travers comme les bâtons d'une cage et destinées à soutenir cette masse énorme. Mon étonnement me fit lâcher prise : à peine eus-je commis cette imprudence, que mon sacristain sauta sur la première traverse et grimpa de barre en barre comme un écureuil aux branches d'un arbre. Alors une rage me prit d'avoir été joué ainsi par une espèce de rat d'église ; j'oubliai tournoiements et vertiges, et je me mis à sa poursuite avec moins d'adresse, mais avec plus de force. J'allais l'atteindre, lorsqu'il disparut une seconde fois dans une espèce de caverne qui ouvrait sur notre route une gueule sombre de vingt pieds de hauteur sur cinq ou six de large. Comme je ne savais pas où elle conduisait, je m'arrêtai court, et me mis à cheval sur ma barre de fer pour en garder l'entrée, décidé à le rattraper à sa sortie et à ne plus le lâcher.
à force de regarder dans ce gouffre, mes yeux s'habituèrent à son obscurité. Alors j'aperçus mon guide, auquel je ne savais plus quel nom donner, et que j'étais parfois tenté de croire quelqu'un de ces êtres fantastiques comme en a connu Hoffmann, se promenant tranquillement dans une espèce de corridor en pente, et s'éventant voluptueusement avec son mouchoir. Dès qu'il vit que je l'avais découvert :
- Eh bien, me dit-il, ne venez-vous pas vous reposer un instant ? Nous sommes à moitié chemin.
Il m'offrait à la fois une bonne chose, et m'apprenait un excellente nouvelle ; aussi je sentis ma colère s'évanouir pour faire place à la curiosité. Notre voyage, à part ses difficultés qui commençaient à me paraître moins insurmontables, ne manquait pas d'une certaine originalité. Je pris donc le parti de le considérer sous son point de vue instructif et pittoresque. En conséquence, je m'accrochai à la barre de fer supérieure, je mis le pied gauche sur celle qui me servait de cheval, et je sautai du pied droit dans l'enfoncement où m'attendait mon compagnon de gymnastique.
- Où diable sommes-nous donc ? lui dis-je après avoir cherché vainement à me rendre compte des localités.
- Où nous sommes ?
- Oui.
- Nous sommes dans le livre de saint Charles.
- Tiens, tiens, tiens !
En effet, ce missel, qui d'en bas m'avait paru un in-folio ordinaire, avait vingt pieds de haut, dix pieds de long et cinq pieds de large.
Je repris un instant haleine, appuyé contre sa reliure de bronze ; puis, poussé par la curiosité, ce fut moi qui, à mon tour, demandai à mon guide de continuer le voyage.
Comme je l'ai dit, je commençais à me faire aux difficultés de la route ; aussi arrivai-je bientôt à l'ouverture pratiquée dans le dos du saint, et qui offre la dimension d'une fenêtre ordinaire. Elle s'ouvrait sur le chemin que j'avais parcouru le matin même en venant de Baveno ; je ne m'arrêtai donc qu'un instant à considérer le paysage, puis je me remis en chemin. Quant à mon sacristain, il était arrivé depuis longtemps, et, comme les ramoneurs au haut des cheminées, je l'entendais sans le voir chanter son cantique d'action de grâces ; ce qui m'empêchait de le découvrir, c'était le rétrécissement de la route ; il était produit par le cou de la statue. Ce détroit franchi, je me trouvai, au sortir du larynx, dans une immense coupole éclairée par deux lucarnes ; au milieu de ces deux lucarnes, qui sont les trous des oreilles, mon sacristain, les jambes pendantes, était irréligieusement assis dans le nez de saint Charles.
Au reste, je dois lui rendre cette justice, c'est qu'aussitôt que je parus, il m'offrit sa place ; mais, comme je suis plus respectueux des choses saintes que beaucoup de ceux qui en vivent, je refusai sans lui dire la cause de mon refus, qu'il n'aurait certes pas comprise.
Alors il me raconta je ne sais quel dîner de douze couverts qui avait été donné dans la tête de l'archevêque : les cuisiniers étaient dans le livre, et l'office dans le bras droit ; cela ressemblait beaucoup à l'histoire de Gulliver dans le pays des géants.
Voyant que je refusais obstinément de m'asseoir dans le nez de saint Charles, il m'invita à regarder par son oreille gauche : c'était une autre affaire, et qui ne flairait aucunement le sacrilège ; aussi ne fis-je aucune difficulté de passer ma tête par le vas ist das.
Mon sacristain avait raison, car de là on découvrait une vue magnifique : au premier plan, le lac bleu comme le ciel et uni comme un miroir ; au second plan, les collines couvertes de vignes et le petit château crénelé d'Angera ; puis, au delà, se prolongeant entre les Appenins et les Alpes, les riches plaines de la Lombardie, qui s'étendent jusqu'à Venise et vont mourir sur les sables du Lido. Je restai véritablement émerveillé et comme en extase.
Je redescendis au bout d'une heure sans penser au danger du chemin. Arrivé au bas du piédestal, le sacristain me demanda si je lui en voulais encore ; je lui répondis en lui mettant une piastre dans la main.
Moyennant cette rétribution, il se chargea de me procurer un bateau ; de sorte que, le même soir, j'arrivai à Sesto-Calende, qui est, je crois, le premier bourg du royaume lombard-vénitien.
Je trouvai toute l'auberge sens dessus dessous : il y avait huit jours qu'un voyageur français était arrivé en poste avec une jeune dame si souffrante, qu'elle n'avait pu aller jusqu'à Milan : force leur avait donc été de s'arrêter à Sesto. Aussitôt, le jeune homme avait envoyé un courrier à Pavie avec ordre de ramener, à quelque prix que ce fût, le docteur Scarpa. Malheureusement, le docteur Scarpa était mourant lui-même ; en conséquence, il avait délégué un de ses confrères. Le médecin était arrivé, mais avait trouvé la malade sans espoir. Deux jours après, elle était morte d'une affection chronique dans l'estomac, et, le matin même, elle avait été enterrée. Quant au jeune homme, après lui avoir rendu les derniers devoirs, il était reparti à l'instant même pour la France.
Une circonstance bizarre s'était présentée. En Italie, on enterre les cadavres dans les églises et dans une fosse commune dont on descelle la pierre à chaque nouveau voyageur que la mort envoie à son hôtellerie. Cette coutume avait répugné au mari, au frère ou à l'amant de la trépassée, car on ne savait pas à quel titre il lui appartenait. En conséquence, il avait acheté une maison et le jardin qui en dépendait ; il avait fait bénir ce jardin et y avait enseveli, au milieu des fleurs et à l'ombre des orangers et des lauriers-roses, sa mystérieuse compagne. Quant à son tombeau, c'était une simple pierre de marbre avec un nom dessus.
La soirée était charmante. Je demandai si l'on ne pouvait pas me conduire à ce jardin ; l'aubergiste me donna un guide, il marcha devant moi, et je le suivis.
La maison achetée par mon compatriote était située hors du village, sur une petite colline d'où l'on découvrait une partie du lac. Les anciens propriétaires, qui s'étaient réservé trois mois pour faire leur déménagement, m'introduisirent sans difficulté dans ce jardin qui était devenu un cimetière. Je fis signe de la main que je désirais qu'on me laissât seul ; je n'avais pas l'air d'un profanateur de tombes, on y consentit.
J'allai d'abord au hasard dans ce petit enclos tout embaumé, puis j'aperçus un massif de citronniers et me dirigeai de son côté. à mesure que j'avançais, je voyais sous son ombre blanchir une pierre ; bientôt je reconnus que la forme de cette pierre était celle d'une tombe. Je m'en approchai, et, m'inclinant vers elle, à la lueur d'un rayon de lune qui glissait à travers le massif qui l'ombrageait, je lus ce seul mot : Pauline .
Le lendemain, le garçon de l'hôtel, que j'avais envoyé à la poste avec mon passe-port, me rapporta une lettre qui me força de partir à l'instant pour la France.
Cinq jour après, j'étais à Paris.
Comme je ne connaissais de l'Italie que ce que j'en avais vu par l'oreille de saint Charles Borromée, je fis en la quittant le vœu d'y retourner : c'est ce vœu que je viens d'accomplir. Cela soit dit en passant pour ceux de mes lecteurs qui auront le courage de me suivre dans un nouveau pèlerinage.

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