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Glace


L'usage de la glace dans les pays méridionaux remonte à la plus haute antiquité ; Sénèque reproche aux Romains les soins qu'ils prenaient pour avoir des boissons glacées, et Hippocrate parle de ses inconvénients ainsi que de ceux de la neige. Les habitants des pays chauds, du reste, ont de tous temps recherché les boissons fraîches et l'eau à la glace fait les délices des orientaux, des Italiens et des Espagnols qui se servent de cruches en terre poreuse et non vernies qu'ils appellent alcarazas pour s'en procurer. Au XVIe siècle, on ne connaissait pas encore en France l'usage de la glace, et lorsque François Ier eut à Nice des conférences avec le pape Paul III et l'empereur Charles-Quint, son médecin fut très étonné de voir qu'on glaçait le vin avec de la glace tirée des montagnes qui avoisinent cette ville.
Mais les glaces proprement dites ne furent connues en France que vers l660, où un Florentin nommé Procope fit goûter le premier aux sujets de Louis XIV les attrayantes douceurs de ces friandises. Le café qu'il fonda rue de l'Ancienne-Comédie existe encore aujourd'hui.
Aujourd'hui les glaces sont très répandues, et on en voit l'été sur toutes les bonnes tables.
On appelle aussi glace, en termes de confiserie, le suc épaissi d'un fruit qu'on vient de confire et qu'on emploie comme gelée translucide pour glacer ce fruit voir Conserves. En terme d'office, la glace est la condensation d'un liquide sucré au moyen de la congélation.

Glace de veau.
Vous coupez un cuisseau de veau en quatre parties, vous le mettez dans la casserole et vous y ajoutez trois poules, une bonne quantité de légumes entiers, écumez-le de temps en temps, ajoutez dans la cuisson quelques couennes de lard dessalées à l'avance : la gélatine du porc aide beaucoup à la clarification et à la consistance de la gelée, et remplissez la casserole de consommé ; vous faites mijoter trois ou quatre heures sur un feu doux et vous passez votre glace à travers une serviette afin de la rendre bien claire.

Glace de cuisson.
Tamisez le mouillement d'un ragoût, faites-le réduire jusqu'à la glace et ajoutez au moment de servir un peu de beurre frais.
Les glaces de fruits ou glaces sucrées se font dans une sorbetière ou glacière ; c'est un cylindre d'environ huit à dix pouces de hauteur que l'on met dans un seau en bois, on garnit l'intervalle qui existe entre les parois du seau et le cylindre de glace pilée et de sel de salpêtrier plus pur et plus actif que celui dont on se sert pour assaisonner les aliments ; vous mettez dans la sorbetière, c'est-à-dire dans le cylindre, le liquide à glacer, vous le couvrez et vous le faites tourner tantôt dans un sens, tantôt dans un autre au moyen de la poignée qui doit se trouver sur le couvercle ; vous découvrez de temps en temps pour remuer le liquide glace en partie et ramener au centre ce qui se trouve près des parois du cylindre, puis votre glace bien ferme, vous la servez.

Glace de cerises.
Vous mettez dans un poêlon, et après les avoir dépouillées de leurs queues et de leurs noyaux, 1 kilogramme de cerises et 120 grammes de sucre, vous faites jeter un bouillon. Vous faites infuser une poignée de noyaux broyés avec du jus de citron et un peu d'eau, vous ajoutez cette infusion et 500 grammes de sirop clarifié à ce qui est passé des cerises, vous mêlez bien le tout et le versez dans la sorbetière où vous procédez comme il est dit ci dessus.
Les glaces de fraises, de framboises, de groseilles se font de la même manière, en remplaçant les cerises par celui de ces fruits que l'on veut mêler à la glace.

Glace à l'abricot
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Méthode de M. Cohier de Lompier, ancien chef d'office de la maison de Mesdames de France.
Prenez des abricots de plein vent bien mûrs, pulpez-les sur un tamis ; ajoutez pour chaque livre de sucre une livre de sirop cuit au lissé. Pulvérisez une douzaine d'amandes des noyaux, mettez-les infuser avec un peu d'eau et le jus de deux citrons, passez cette infusion et ajoutez-la à la pulpe, et procédez pour le reste comme à l'ordinaire.
La glace aux pêches se fait de la même manière.

Glace à l'ananas.
Coupez un ananas par tranches, couvrez-les de sucre en poudre et laissez macérer pendant deux heures ; versez alors sur le tout deux litres d'eau bouillante et le jus de deux citrons, laissez infuser pendant deux heures, passez au tamis et terminez comme ci-dessus.

Glace à la vanille.
Vous faites bouillir un litre de crème et vous la versez toute bouillante sur la vanille ; vous laissez infuser le tout pendant deux heures environ et vous tamisez.
Vous délayez huit jaunes d'oeufs dans cette crème et vous mettez le tout sur le feu au bain-marie, en ayant soin de toujours remuer jusqu'à ce que la crème ait pris une bonne consistance ; vous laissez refroidir et la terminez comme les autres glaces.

Glace à la fleur de cédrat. Formule du château de Bellevue.
Prenez crème, 1 pinte ; oeufs, 8 jaunes ; sucre, 3 quarterons ; fleurs de cédrat mises en poudre, 2 onces.
Mêlez le tout ensemble et faites cuire au bain-marie. Passez et laissez refroidir.
On peut aussi employer toute autre fleur en procédant comme il est prescrit.

Glace de crème aux pistaches.
Vous pilez le plus fin possible 250 grammes de pistaches et vous mêlez avec un peu de crème et de zeste d'un citron.
Votre pâte étant bien faite, vous la mêlez dans un poêlon avec huit jaunes d'oeufs et du sucre en poudre, vous y ajoutez petit à petit un litre de crème et vous faites cuire à l'étamine, puis vous passez, vous laissez refroidir, vous ajoutez trois cuillerées de suc d'épinards pour la colorer et vous versez dans la sorbetière.

Glace au chocolat à la crème.
Vous faites cuire au bain-marie une composition faite avec huit jaunes d'oeufs, un litre de crème et 250 grammes de sucre en poudre que vous aurez délayés, puis, vous mêlez à cette crème 250 grammes de chocolat fondu, vous passez à l'étamine et glacez comme à l'ordinaire.

Glace au café.
Vous avez fait avec du café un peu brûlé une forte infusion de café, vous le mêlez avec huit jaunes d'oeufs et un litre de crème, vous délayez le tout et vous faites cuire au bain-marie.

Fromage glacé.
Après avoir confectionné une quantité de glace quelconque, vous en remplissez un moule que vous plongez dans un mélange de glace et de sel.
Puis au moment de servir, vous plongez vivement le moule dans de l'eau chaude afin que la glace s'en détache facilement.
Vous pouvez former ce fromage de glaces de différentes natures distinguées par leurs couleurs.
Pour diversifier les glaces, on n'a qu'à changer la substance qu'on mêle à la crème.
Voici les substances le plus avantageusement employées.

          Glace à la crème à la fraise des bois.
          Glace à la crème aux framboises blanches.
          Glace à la crème à l'abricot et aux merises.
          Glace à la crème aux pêches mignonnes.
          Glace à la crème au ratafia de noyaux.
          Glace à la crème au vin de Chypre.
          Glace à la crème à la malvoisie d'Alicante.
          Glace à la crème au melon suerin.
          Glace à la crème aux poires de rousselet.
          Glace à la crème aux liqueurs des îles.
          Glace à la crème à l'esprit d'angélique.
          Glace à la crème à l'essence de menthe.
          Glace à la crème aux jaunes d'oeufs de pinson.
          Glace à la crème cuite et au pain de seigle.
          Glace à la crème crue et au beurre frais.

On peut panacher ces différentes crèmes en les disposant par couches alternées, soit en hauteur ou en largeur.
Voici les meilleures combinaisons de panachure, telles que les donne le Préceptoral des menus royaux pour l'année 1822.

N 716. - On pourra panacher à volonté les glaces de crème blanche avec toutes celles au suc des fruits, à la réserve de celles au citron, à la bigarade et au verjus, non plus qu'avec les glaces à l'épine-vinette qu'on servira toujours sans mélange ou voisinage adhérents.
N 717. - On devra, pour opérer les panachures, avoir égard autant que possible au formulaire inscrit sur le tableau suivant, et s'il arrivait par accident qu'on ne puisse pas s'y conformer, on servira pour ce jour-là les fromages glacés en sorbetière et sans panachures. Cette règle est également pour les quatre premières tables et pour les trois secondes tables en cour de France.
N 718. - Tableau des glaces à la crème avec leurs adjonctions ou panachures les plus satisfaisantes.

          Crème blanche et abricot.
          Crème blanche et orange.
          Crème crue et fraises.
          Lait d'amandes et verjus muscat.
          Lait de chèvre et jus de mûres.
          Crème pistache et suc de pêches.
          Crème à la cannelle et melon cantaloup.
          Crème d'oeufs et vin de Schiraz.
          Crème mousseuse et vin de Sétubal.
          Crème d'avelines et liqueur de menthe.
          Crème vanille et framboises.
          Crème d'oeufs et poires de rousseselet.
          Crème au thé vert et jus de cédrat.
          Crème chocolat et ratafia de cassis.
          Ananas et noix fraîches.
          Crème de noisettes vertes et Rossolis.
          Crème de viry et mirobolan.
          Crème de Sotteville et eau de rhum.
          Crème double et purée de merises.
          Crème de pain bis et beurre frais.

Pour faire des biscuits glacés, vous leur faites absorber à chacun trois cuillerées de crème mêlées avec un peu de ratafia de noyaux ; glacez-les légèrement afin de ne pas les déformer, mettez-les entre deux grands plats se joignant bien, et entourez ces plats de glace et de salpêtre, ainsi qu'il est indiqué pour la préparation des autres glaces. Dès que vous les trouverez assez bien glacés, couvrez-les d'une légère couche de gelée de framboises ou de glace aux fruits rouges. Les tranches de melon et les pastèques se glacent de la même façon que les biscuits entre deux plats, on les fait seulement macérer dans le vin de Madère, on les sucre à blanc et on les fait congeler comme ci-dessus :

Sorbet au citron.
Vous préparez le suc du fruit comme il est indiqué plus haut, et vous le faites prendre dans une sorbetière sans attendre qu'il soit pris en masse ; vous détachez avec une houlette ce qui tient aux parois du cylindre et brouillez le tout jusqu'à ce que vous obteniez un mélange de glace solide qui doit être flottant dans un breuvage de glace fondue. Les sorbets à la fraise, à la merise, à la pêche, à l'ananas, aux quatre fruits rouges, au melon verreux et à l'épine- vinette, sont généralement les plus estimés. On peut également en faire avec des aromates exotiques et des fleurs indigènes dont on aura distillé les eaux ; les plus distingués sont ceux à l'eau d'héliotrope, à l'eau de violette et à l'eau de jasmin.

Sorbet au marasquin.
Faites une préparation de glace au jus de citron en en supprimant les zestes, glacez-la un peu plus ferme qu'à l'ordinaire et brouillez-la bien en y ajoutant un demi-verre de marasquin. On peut employer à la confection de ce même sorbet d'autres liqueurs étrangères ou françaises, ainsi que les vins sucrés et liquoreux de Frontignan, de Lunel et de Rivesaltes.

Sorbet au rhum.
Vous faites un sorbet au citron et vous y ajoutez un bon verre de sirop de rhum en le glaçant plus fortement qu'à l'ordinaire.

Boissons froides sans être glacées
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Préparez les divers sucs de fruits comme pour faire des glaces passez-les à travers une étamine serrée, clarifiez-les au blanc d'oeuf et mettez-les dans des carafes que vous ferez refroidir dans de l'eau de puits en les entourant de glace et sans leur laisser le temps de se trouver frappées, ce qui veut dire congelées aux parois, en terme d'office et de limonadier.
Emprunté à l'excellent livre de M. de Courchamps. Dictionnaire de la cuisine française.

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