Misanthropie et Repentir Vous êtes ici : Accueil > Œuvre > Dictionnaire des œuvres
Page précédente | Imprimer

Titre Misanthropie et Repentir

Année de publication inédit (le premier acte a été publié en 1996 in Les Cahiers - Comédie-Française, n° 18, pp. 7-16, aux éditions P.O.L.)

Genre Théâtre (drame en cinq actes (Comédie-Française, 28 juillet 1855 ; version réduite à trois actes le 11 août suivant))

Collaborateur(s) Nerval, Kotzebue

Epoque du récit En Allemagne, au XVIIIe siècle

Résumé Un misanthrope fortuné retiré à la campagne, « l’Inconnu », donne à un vieux paysan la somme dont il a besoin pour racheter son fils parti à l’armée (Acte I). Au  château voisin, une surintendante elle aussi solitaire et ruminant un passé mystérieux, accueille ses maîtres de retour de la ville ; au cours d’une promenade le châtelain tombe à l’eau, l’Inconnu le sauve (Acte II). Venus remercier l’Inconnu, les hôtes du château essuient une fin de non recevoir. La surintendante, confie à la comtesse qu’elle a naguère abandonné son époux et ses enfants pour suivre un intrigant (Acte III). L’Inconnu se trouve être l’homme que la surintendante a abandonné. Le hasard des circonstances amène les anciens époux à se retrouver : elle s’évanouit, il s’enfuit (Acte IV). Cependant, devant le repentir sincère de celle qui fut sa femme, l’Inconnu accepte son retour au foyer, et l’un et l’autre retrouvent leurs enfants (Acte V).

Analyse Dernière collaboration Dumas-Nerval (si l’on excepte la citation amicale de fragments du Nicolas Flamel de Gérard dans La Tour Saint-Jacques), cette œuvre est adaptée du Menschenhass und Reue, de Kotzebue, joué en 1789 à Berlin. Dès 1853 l’idée était dans l’air ; on sait par une lettre de Dumas à Mme Porcher qu’il pensait aussi proposer à Desnoyers de collaborer à l’ouvrage, et prenait contact en même temps avec Holstein, alors directeur du Théâtre de la Gaîté (fonds Glinel R 8 169). Le Putnam’s Monthly Magazine de New York, dans son volume II de juillet-décembre 1853, révélait de son côté : “Alexander Dumas is at work on a translation of the dramas of Kotzebue. As he does not know a word of the original, he employs a German who puts it into French, after which our Alexander the Great comes in to polish and finish the job”. Mais c’est Nerval qui s’y attaque le premier, sans doute à la demande de la Comédie-Française. Sa traduction est ensuite confiée à Dumas pour un travail de « rabibochage » ; il est convenu avec Verteuil, secrétaire de la Comédie-Française, qu’on laissera l’entière paternité du drame à Nerval. Dumas traîne, tergiverse, demande à être nommé et payé pour la pièce, et avoue un jour à Houssaye qu’il vient de refaire le premier acte parce qu’il a perdu le manuscrit. Nerval, dans une lettre à Bell, s’inquiète du sort de l’œuvre. Mais c’est le moment où la folie l’entraîne. Son suicide, le 26 janvier 1855, ramène Dumas à ce qu’il pense être alors un dernier devoir envers l’ami. Il retravaille le manuscrit de février à juillet 1855, le 23 juillet une copie de la pièce est enregistrée par la censure, et la création a lieu le 28 ; l’œuvre est représentée 4 fois dans sa version en cinq actes, puis 6, à partir du 11 août, dans une réduction à trois. L’adaptation, qui resserre l’action autour de l’Inconnu, en délaissant les scènes anecdotiques, met bien en évidence l’intérêt de Nerval pour le caractère du mélancolique. Dumas avait publié l’emblématique « El Desdichado » de son ami dans Le Mousquetaire en 1853: depuis longtemps le « luth constellé » de Gérard « porte le soleil noir de la mélancolie »… La pièce avait auparavant été traduite par une certaine Madame Bursay, et « refaite » pour la scène par Julie Molé-Léger, comtesse de Vallivon (1789-1832). Une attribution douteuse… En décembre 1862, Misanthropie et Repentir fut repris à l’Odéon dans une autre traduction, due à Alphonse Pagès cette fois. Le critique Charles Monselet, ami de Nerval, note dans un article « Il y a tant de souvenirs attachés à cette pièce ! Il y a même plus, il y a comme une fatalité douloureuse. N’est-ce pas en effet, peu de temps après avoir traduit, lui aussi, le drame de Kotzebue pour la Comédie-Française, que Gérard de Nerval fut trouvé pendu, une nuit d’hiver ? » Le texte traduit par Nerval et revu par Dumas est resté inédit, à l’exception du  premier acte publié en 1996 dans Les Cahiers - Comédie-Française, n° 18, pp. 7-16, aux éditions P.O.L. La comparaison du manuscrit déposé à la Bibliothèque de la Comédie-Française avec celui qu’on trouve aux Archives nationales laisse apparaître un certain nombre de variantes.

François Rahier
(2012)

© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
Haut de page
Page précédente