Titre
Le bâtard de Mauléon
Année de publication
1846-1847
Genre
Roman
Collaborateur(s)
Auguste Maquet
Epoque du récit
1361 à 1369
Résumé
L'histoire du bâtard de Mauléon est tirée d'un manuscrit
rédigé par le chroniqueur Jehan Froissart, que Dumas dit
avoir eu la chance de retrouver. Jehan tient son récit de Mauléon
qui, devant sa curiosité admirative, a accepté de lui raconter
ses souvenirs.
L'histoire
débute alors qu'Agénor de Mauléon et son fidèle
écuyer Musaron se dirigent vers le Portugal, pour y rejoindre Frédéric,
Grand Maître de Saint-Jacques, frère de don Pedro, roi d'Espagne.
Agénor rencontre sur sa route un Maure et sa suite, dont une litière
aux rideaux fermés qui l'intrigue fort. Ce Maure, Mothril, vient
chercher Frédéric pour le conduire à Séville,
chez le roi. Agénor les accompagne; il perce alors le secret de
la litière: Aïssa, fille adoptive de Mothril, s'y trouve.
Lorsque leurs regards se croisent, c'est le coup de foudre. Les tentatives
des deux amoureux pour se retrouver serviront de trame de fond à
ce roman guerrier.
Le roi Pedro avait épousé autrefois Blanche de Bourbon,
sur de Charles V, roi de France; dès le lendemain de la noce,
il la fit enfermer. Il l'accuse d'avoir été la maîtresse
de son frère Frédéric. Dès l'arrivée
de celui-ci à Séville, le roi, conseillé par Mothril
et encouragé par Maria Padilla, sa maîtresse, le fait assassiner.
Agénor se rend vite auprès de la reine Blanche pour la mettre
à l'abri. Trop tard: Mothril l'a assassinée. Agénor
recueille son dernier vu: raconter sa fin au roi Charles.
En chemin, Agénor a l'occasion de sauver la vie d'Henri de Transtamare,
autre frère de don Pedro, qui revendique le trône d'Espagne.
Ils se rendent ensemble auprès de Charles. Le roi commande à
du Guesclin, Grand Connétable de France, de mener son armée
guerroyer en Espagne auprès d'Henri. À Bordeaux, Henri découvre
que le prince de Galles, fils du roi Édouard III, apportera l'aide
de l'armée anglaise à don Pedro.
On file alors de bataille en bataille. Henri est couronné d'un
côté, mais perd ensuite des alliés. Au cours d'une
bataille décisive, il s'échappe in extremis. Du Guesclin
et Agénor, par contre, sont faits prisonniers. Mothril veut les
tuer, mais le prince de Galles intervient. Il rançonne du Guesclin
et envoie Agénor en France pour réunir la somme. Lorsque
tout est payé, le connétable revient combattre auprès
d'Henri. On envoie Agénor comme parlementaire auprès de
don Pedro. Sur sa route, il fait la rencontre de Maria Padilla, qui elle
aussi veut retrouver le roi qui la néglige... C'est que Mothril
excite la convoitise du roi en lui faisant miroiter la jolie Aïssa,
qu'il dit fille de roi. Maria favorise les amours d'Agénor et d'Aïssa,
afin d'éloigner celle-ci du roi. Grâce à Maria, Agénor
se glisse un instant auprès de son aimée, mais doit vite
s'éloigner pour poursuivre son ambassade.
Plus tard, Maria envoie deux messagers auprès d'Agénor pour
lui dire que, dans un mois de là, elle favorisera l'évasion
d'Aïssa. Hélas, l'un des messagers est à la solde de
Mothril et trahit le secret. Lorsque Maria se rend au rendez-vous avec
Aïssa, le traître les mène vers don Pedro, lequel attend
Aïssa, promise par Mothril. Celui-ci, inquiet des révélations
de Maria, choisit de l'assassiner et de blesser Aïssa, laissant croire
que Maria s'est suicidée après avoir tenté de tuer
Aïssa.
Mothril conduit alors Aïssa dans la forteresse de Montiel, près
de Tolède, pour la soigner et aviver, pendant ce temps, le désir
du roi. Celui-ci se rend à Tolède, où la guerre reprend
de plus belle. Si don Pedro a la force du nombre, il ne dispose pas de
l'intelligence militaire de du Guesclin. Vaincu, il parvient à
fuir et se réfugie à Montiel. Mauléon convainc du
Guesclin et Henri d'assiéger ce château. Le roi et la garnison
se rendent. Mothril tente de s'enfuir par une fenêtre, forçant
Aïssa à l'accompagner. Agénor et Musaron poursuivent
Mothril qui s'enfuit à cheval avec Aïssa dans ses bras. Agénor
met la main sur Aïssa... mais Mothril lui coupe la main! Il tue ensuite
Aïssa en lui tranchant la tête puis il meurt, transpercé
d'une flèche de Musaron. Ainsi se termine l'histoire d'amour...
Après des années de deuil, Agénor et Musaron reprendront
la route à la suite de du Guesclin.
Analyse
Quel beau roman! Lorsque Dumas écrit des histoires qui se passent
à son époque, ou encore à des époques dont
il reste des témoins, on comprend qu'il parvienne à fournir
des milliers de petits détails. Mais comment fait-il lorsque l'histoire
se déroule 400 ans plus tôt? Il y parvient tout aussi bien...
ou alors il invente fort bien!
Comme il le fait souvent, Dumas réussit ici à entremêler
adroitement histoire d'amour et vie politique. Il passe de l'une à
l'autre avec aisance, referme la porte sur l'une pour mieux décrire
l'autre, y revenant par la suite pour s'assurer que l'on a rien manqué...
Lorsque des scènes ne concernent pas réellement l'histoire
en cours mais sont tout de même nécessaires à sa compréhension,
il s'en excuse et ouvre une parenthèse. Et l'on se prend, encore
une fois, à éprouver pour les divers personnages, historiques
ou inventés, les mêmes sentiments qu'éprouvent le
héros de cette histoire et son fidèle compère si
sympathique, Musaron.
On se surprend également, au détour de certaines pages,
à chercher des moulins à vent à l'horizon, tant,
par moments, ce drôle de Musaron rappelle ce héros espagnol
qu'est Sancho Panza. Agénor de Mauléon n'a pas la «folie»
de don Quichotte, bien sûr; il en a tout de même l'esprit
chevaleresque et le romantisme excessif. En fait, don Quichotte se serait
régalé de l'histoire de Mauléon et aurait sans doute
souhaité lui ressembler, s'il l'avait connu.
Le roman fait donc découvrir au lecteur les régions espagnoles
et les guerres intestines qui s'y déroulèrent au XIVe siècle.
Il nous fait connaître le monde des Maures, avec les caractéristiques
presque caricaturales que leur attribue l'auteur, et nous permet d'assister
aux confrontations entre les tenants de deux dieux, celui du Prophète
et celui des chrétiens.
C'est donc à la découverte ou à la redécouverte
d'un monde totalement disparu que nous invite Dumas dans cet excellent
roman qui se termine hélas, après une longue quête
et beaucoup de sang versé, par la mort d'Aïssa, assassinée
sous les yeux de son amoureux mais impuissant chevalier.
Marie Douville
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