Titre
La guerre des femmes
Année de publication
1849
Genre
Théâtre (drame en cinq actes, en dix tableaux : Théâtre-Historique,
1er octobre 1849)
Collaborateur(s)
Auguste Maquet
Epoque du récit
1650 (La Fronde)
Résumé
Près de Bordeaux, alors que s'affrontent les partisans de Condé
et ceux de la Reine, le duc d'Épernon apprend que sa maîtresse,
Nanon de Lartigues, a une liaison avec le baron de Canolles. Ce dernier
est sauvé du piège que lui tend son rival par la vicomtesse
Claire de Cambes, du parti des princes, qui voyage travestie en garçon.
Canolles s'éprend d'elle (Acte I). Devant d'Épernon soupçonneux,
Nanon fait passer Canolles pour son frère Cauvignac. En route pour
Paris, il est chargé d'une missive pour la Reine, et découvre
l'identité de la vicomtesse (Acte II). Au château de Chantilly
les princesses tiennent un conseil de guerre ; la vicomtesse les rejoint.
Mais l'arrivée de Canolles, aux ordres de la Reine, entraine leur
fuite. La vicomtesse, se faisant passer pour Madame de Condé, retient
Canolles. Ayant favorisé contre son gré le départ
des conspiratrices, il est arrêté et enfermé au Fort
Saint-Georges. Cependant, Nanon obtient de la Reine sa grâce ; Canolles
devient gouverneur du Fort. La place est assiégée. Attaché
malgré lui au parti de la Reine, il refuse les propositions que
vient lui faire la vicomtesse de la part des princes (Acte III). Le Fort
tombe, Canolles, prisonnier, est veillé de loin par la vicomtesse.
Le conflit s'enlise, avec son lot d'exactions. Pour répondre à
la pendaison infamante d'un partisan des Condé la princesse décide
de faire exécuter Canolles de la même façon (Acte
IV). Personne ne peut plus rien pour le baron. Mais, sous le gibet, le
coup de carabine de Cauvignac, prisonnier lui aussi et libéré
à la suite d'un dernier quiproquo, le sauve du déshonneur
: Canolles meurt en gentilhomme (Acte V).
Analyse
Cette longue pièce débute comme une comédie d'intrigue,
et finit en tragédie. Certes, le mélange des genres était
revendiqué par les fondateurs du théâtre romantique,
Dumas et Hugo en tête. Mais ici, le comique de situation, fille
travestie en garçon et vrais faux frères (Nanon de Lartigues
faisant passer Canolles pour son frère et découvrant que
son demi frère Cauvignac joue aussi sa partie dans l'action) traîne
un peu en longueur ; jusque dans les dernières scènes l'intensité
dramatique en pâtit, les personnages masculins en particulier ayant
du mal à endosser un rôle à la hauteur de leur destin.
Mais après tout il s'agit dans ce drame de la "guerre des
femmes". Elles occupent bien le premier plan, même si la Fronde
ne semble réduite ici qu'à une succession de places fortes
prises ou perdues, d'intrigues de cours, celle de la Reine et celle des
princes, et d'intérêts privés laissant loin du compte
les enjeux réels de ce qui fut bien une guerre civile, donc politique.
Des enjeux qui paraissent étrangers aux deux héros masculins,
encore une fois sur la touche : engagés par hasard du côté
de la Reine, le pur Canolles et et le roué Cauvignac échangent
leurs rôles encore à leur insu, au tout dernier moment, et
passent du comique devenu sérieux au tragique. Usant du travestissement
comme d'un ressort de l'intrigue, ni Dumas ni Maquet ne se montrent ici
à la hauteur d'un Shakespeare ou d'un Marivaux. Le trouble qui
les prend devant un trop joli garçon ne suscite en Canolles ou
Cauvignac aucun état d'âme, et les auteurs n'ont à
vrai dire pas le temps d'épiloguer ; le train auquel ils mènent
l'action leur interdisant toute analyse psychologique. Adaptation du roman
éponyme paru 3 ans auparavant, la pièce n'est qu'une
suite de tableaux plutôt que d'actes. Misant sur les coups de théâtre
et les scènes d'action - de l'embuscade au bac d'Ison sur la Dordogne,
au 1er tableau, à l'esplanade du 10ème où la scénographie
se déploie sur trois niveaux, la contrescarpe où s'avance
Ninon, le gibet auprès duquel s'affaire le bourreau, et enfin le
chemin couvert par où descendent Cauvignac et le geôlier
qui vient de le libérer, le tout de nuit - les auteurs usent habilement
de toutes les ressources du Théâtre-Historique. L'intérêt
majeur de la pièce réside sans doute dans ce côté
spectaculaire.
François Rahier
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