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Titre Christine, ou Stockholm, Fontainebleau et Rome

Année de publication 1830

Genre Théâtre

Collaborateur(s) -

Epoque du récit 1650-1689

Résumé Stockholm, 1650: sous le regard d'un Descartes vieillissant, la reine Christine de Suède s'affiche avec son favori Monaldeschi. Une jeune fille travestie en page, Paula, couve des yeux le favori qu'elle aime également. Sentinelli, le rival éconduit, est présent lui aussi. Peu après, Christine abdique en faveur du prince Charles-Gustave, et part, avec Monaldeschi et d'autres seigneurs, en voyage.

Fontainebleau, 1654-1657: Christine s'entoure de savants et d'écrivains, et rencontre Corneille. Désœuvrée, elle conspire pour reprendre la couronne, et Monaldeschi conspire contre elle en la dénonçant à Charles-Gustave. Apprenant de Sentinelli la trahison de Monaldeschi, Christine décide sa mort. Monaldeschi est arrêté. Paula, toujours amoureuse, apporte à Monaldeschi une bague empoisonnée: s'il s'en sert, il devra la lui redonner pour qu'elle puisse mourir avec lui. Mais le jeune homme réussit à obtenir sa grâce, et renvoie lâchement la bague à Paula qui meurt dans les bras de Christine. Tout est dévoilé. Christine fait alors tuer Monaldeschi par Sentinelli.

Rome, 1689: trente ans ont passé; Christine, rongée de remords, meurt «Reine de Suède»; Sentinelli, devenu pénitent, l'assiste.

Analyse Conçue pour faire pièce aux classiques, et reçue «à corrections» à la Comédie-Française le 30 avril 1828, Christine ne fut pourtant pas au rendez-vous des grandes manœuvres de 1829. Cette année-là, en lever de rideau aux batailles romantiques de l'année suivante, Vigny et Hugo donnèrent au Français Le More de Venise et Marion Delorme, Mérimée publia Le carrosse du Saint-Sacrement et Musset les Contes d'Espagne et d'Italie qui contribuèrent également au débat en cours sur le renouveau du théâtre.

Destinée elle aussi au Français, mais arrêtée par la censure, la pièce ne fut créée à l'Odéon qu'en 1830; entre-temps, Dumas avait payé sa quote-part en faisant jouer Henri III et sa cour dès le 10 février sur l'illustre scène. Il devançait Vigny et Hugo, mais en prose.

Les nombreuses versions que nous connaissons de Christine témoignent de l'intérêt qu'y attachait Dumas. Une tragédie, d'abord, écrite en 1828, la pièce acceptée à la Comédie-Française, et dont le manuscrit est perdu; Dumas n'osait encore parler de «drame».

Le drame intitulé Christine à Fontainebleau, ensuite, révélé par les Cahiers Dumas en 2002. Puis les différentes versions de la «trilogie» (notons au passage l'emploi d'une terminologie évitant encore de parler de «drame»): l'une où Paula survit à Monaldeschi, et assiste à l'agonie de Christine à Rome; une autre, que reprennent toutes les éditions ensuite, et qui fait mourir Paula avec son amant; une troisième enfin, que Dumas avait amputée de l'épilogue «Rome», et qui, pour cause, ne s'appela plus «trilogie», mais «drame».

En même temps qu'une machine de guerre bien huilée dirigée contre les classiques, la pièce peut être considérée comme la première grande œuvre dramatique ambitieuse de Dumas. Il raconte dans ses Mémoires comment, le soir de la première, Hugo et Vigny avaient réécrit en partie le texte, l'allégeant en même temps de quelques centaines de vers. Que deux grands poètes, ses amis proches, se soient ainsi généreusement impliqués manifeste l'importance que l'œuvre avait aussi à leurs yeux.

Jouée après Hernani mais écrite avant, la pièce souffrit de la comparaison avec le chef d'œuvre de Hugo. Elle manquait d'unité peut-être, Dumas hésitant entre la reconstitution historique, l'aventure solitaire de Christine (avec un hommage appuyé aux deux Français qui la côtoyèrent, Descartes le philosophe, et Corneille le dramaturge), et le drame amoureux de Monaldeschi et Paula.

L'épilogue si décrié – et que Dumas finit par retirer - avait pourtant été l'occasion pour lui de méditer une première fois sur l'impossible rédemption du bourreau: on peut voir en effet dans le dernier dialogue de la reine agonisante et de son homme de main Sentinelli comme une esquisse de l'épisode de Vingt ans après consacré à la mort du bourreau de Béthune.

François Rahier
© Société des Amis d'Alexandre Dumas
1998-2010
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