Titre
La guerre des femmes
Année de publication
1845-1846
Genre
Roman
Collaborateur(s)
-
Epoque du récit
1650 à 1653, pendant la Fronde
Résumé
L'histoire politique racontée dans La
guerre des femmes paraît simple : en 1650, la reine
Anne d'Autriche et Mazarin font emprisonner le prince de Condé.
L'épouse de celui-ci, entourée de quelques fidèles,
se soulève; des affrontements ont lieu dans la région de
Bordeaux. Bien sûr, le parti du futur roi Louis XIV l'emporte. Guerre
des femmes, donc, puisque d'un côté on retrouve la figure
de la reine, qui compte également dans son parti la très
retorse Nanon de Lartigues, maîtresse influente du duc d'Épernon;
de l'autre côté, la princesse, soutenue par madame de Tourville,
figure caricaturale dont chacune des interventions permet à Dumas
d'exercer son sens de l'ironie, et par la douce vicomtesse Claire de Cambes.
Toutes ces femmes «jouent aux hommes» afin de tenter de prendre
ou de conserver le pouvoir.
Mais
tout cela est trop simple. Dumas greffe donc à l'histoire de France
une aventure amoureuse bien emberlificotée, où déguisements
et tractations sont à l'honneur. Car voilà : Nanon
a un deuxième amant, le baron de Canolles. Toutefois, le duc d'Épernon
a été averti secrètement de l'existence de ce dernier
et a l'intention de le faire assassiner. Hasard? La vicomtesse de Cambes,
déguisée en homme, arrêtée dans une auberge,
découvre le projet du duc et – hasard encore? – peut
en prévenir le baron.
Celui-ci, écoutant le «jeune homme», devine la femme
qui se dissimule et se sent aussitôt attiré par elle... Comme
il ne peut rejoindre Nanon, il se met plutôt à la poursuite
du vicomte. Hélas, le baron est au service du parti royaliste;
la vicomtesse est conseillère de la princesse. Ennemis politiques,
comment deviendront-ils amants? Et comment le baron de Canolles, véritable
héros de cette histoire, dont Dumas ne cesse de vanter la tenue
et la beauté, parviendra-t-il à choisir entre ses deux amours,
Nanon et Claire, qui toutes deux s'acharnent par tous les moyens à
sans cesse lui sauver la vie?
Hasard toujours? Après la défaite des princes et la mort
de Canolles, les deux amoureuses se réfugieront dans la même
abbaye, auprès de la tombe de leur amant...
Analyse
«...une des aspirations éternelles de la moitié
du genre humain destinée à séduire est d'ambitionner
l'exercice des droits de la partie destinée à commander. Ces
dames trouvaient [...] une occasion de se faire hommes pour un moment :
c'était une trop heureuse circonstance pour qu'elles n'en profitassent
point» (La guerre des femmes)
Récit «macho», La guerre
des femmes ? Ou précurseur du féminisme? Certains
y ont vu un clin d'œil à George Sand, d'autres se sont irrités
de toutes ces petites remarques qui foisonnent au fil des pages sur l'étrange
façon des femmes de vouloir «jouer aux hommes». Si
certaines de ces réflexions peuvent effectivement, à prime
abord, faire grincer des dents, il faut reculer dans le temps pour se
rappeler tout ce que la volonté de ces femmes de prendre leur place
et leur part de pouvoir, de jouer un rôle positif dans la défense
de leurs positions, pouvait avoir d'incongru et d'inusité à
cette époque. Et d'ailleurs, comment pourrait-on en vouloir à
Dumas? Toujours, on devine le sourire derrière ses commentaires
empreints de «masculinité»...
Tout au long du roman, Dumas joue à Marivaux : une vicomtesse
se déguise en homme, sans toutefois que le déguisement soit
réussi; Nanon trompe le duc en lui disant que le baron est son
frère; mais c'est elle qui se fait jouer lorsque son frère
réel, Cauvignac, arrive et qu'elle doit le faire passer pour le
baron; la vicomtesse joue le rôle de la princesse pour déjouer
l'envoyé du roi – mais cet envoyé étant le
baron, le tour est raté... Les déguisements, les quiproquos,
bien que divertissants, apparaissent parfois comme cousus de fil blanc
et atténuent l'impression de «véracité»
habituellement davantage présente dans les romans historiques de
Dumas.
La guerre des femmes est finalement un
récit où, malgré tous les revirements, les pages
s'écoulent lentement avant de parvenir réellement à
tenir le lecteur en haleine; cela se produit heureusement, enfin, dans
le dernier tiers du livre. Bref , il s'agit d'un roman que l'on lit pour
le bonheur de retrouver Dumas et l'histoire de France, mais qui n'est
pas de sa meilleure plume.
Signalons enfin qu'une version théâtrale
a été tirée du roman en 1849, écrite conjointement
par Dumas et Auguste Maquet.
Marie Douville
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