C'est le samedi 30 novembre qu'Alexandre Dumas est entré au Panthéon.
La Nation a ainsi rendu hommage à l'un de ses écrivains
préférés, à quelques jours de l'anniversaire
de sa mort (le 5 décembre) et à la fin de l'année
du bicentenaire de sa naissance. Cette journée, au programme
chargé, a marqué le couronnement d'une année consacrée
à la redécouverte d'un écrivain longtemps négligé.
Le
26 mars 2002, le Président de la République signait le décret
de transfert des cendres d'Alexandre Dumas au Panthéon. S'exprimant
à l'occasion de la cérémonie
de signature, Jacques Chirac avait notamment affirmé que « par
ce geste, la République donnera toute sa place à l'un de
ses enfants les plus turbulents et les plus talentueux, à l'un
de ses génies les plus féconds dont toute la vie fut au
service de notre idéal républicain ».
Cette décision, le chef de l'Etat en avait confirmé le principe
le 19 mars, à l'occasion de l'inauguration de l'exposition de la
Bibliothèque Nationale consacrée aux 200 ans de la naissance
de Victor Hugo. Rappelant la « forte amitié forgée
dans les batailles du romantisme » qui liait les deux grands
écrivains, le Président de la République avait lancé
: « Cette année est aussi celle du bicentenaire de la
naissance de Dumas. Il était le plus populaire des romantiques.
Il reste à ce jour le plus lu des écrivains français
dans le monde. Il était juste que notre pays lui manifeste sa reconnaissance.
Voilà pourquoi j'ai décidé le transfert de ses cendres
au Panthéon, où il retrouvera un ami » (lire
le discours du chef de l'Etat).
Tout avait commencé le 19 avril 2001, quand Jacques Chirac avait
reçu Didier Decoin, président de la Société
des Amis d'Alexandre Dumas. Ce dernier avait écrit au Président
pour lui demander officiellement d'accorder à Dumas le plus grand
honneur que puisse décerner notre pays : rejoindre au Panthéon
les grands hommes de notre histoire, comme Zola, Voltaire et surtout son
ami Victor Hugo. Arguments développés par le président
des Amis de Dumas dans sa lettre : « l'auteur
est immense, l'homme admirable et le Français exemplaire ! »
Dix-huit mois plus tard, les cérémonies ont été
l'occasion pour la nation de manifester son admiration et son affection
envers l'un des écrivains les plus populaires qui soient (la
presse a d'ailleurs accueilli avec enthousiasme cette « canonisation »
républicaine). Plus d'un siècle et demi après la
publication de ses principaux chefs d'uvre, les grands romans de
Dumas continuent à être lus à tous les âges,
en France et dans le monde entier : comme le montrent les multiples témoignages
recueillis sur notre livre d'or,
on ne compte pas les étrangers qui confessent avoir appris le français
en lisant les Trois
Mousquetaires. Ce qui fait de Dumas l'un des meilleurs ambassadeurs
de notre langue.
Devenu une source inépuisable d'inspiration pour le cinéma,
la télévision, la bande dessinée, l'écrivain
est aussi redécouvert pour les autres registres d'une uvre
que l'on avait trop longtemps cru cantonnée au seul roman d'aventures
: les Mémoires
de cet homme si engagé dans les bouleversements culturels et politiques
de son temps ; les récits de voyage de cet infatigable explorateur
; et même les recettes de cuisine de ce bon vivant à qui
aucun plaisir n'était étranger.
L'entrée au Panthéon constitue ainsi l'apothéose
des célébrations du bicentenaire. Elle devrait contribuer
puissamment à la redécouverte d'une uvre dont des
pans entiers - le théâtre, les romans « réalistes »,
etc. - sont encore négligés.
Patrick de Jacquelot
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