Titre
Richard Darlington
Année de publication
1831
Genre
Théâtre
Collaborateur(s)
Goubaux et Beudin
Epoque du récit
1775- 1804
Résumé
Quand Richard Darlington se présente aux élections pour
être député, il apprend avec stupeur qu'il n'est pas
le fils du docteur Grey. Celui-ci, qui se trouve alors avec Mawbray son
meilleur ami, lui raconte comment il l'a adopté vingt-six ans auparavant
après avoir aidé sa mère à accoucher dans
des circonstances étranges. Bien qu'étant en fuite avec
un homme masqué sans lequel elle ne semblait pouvoir vivre, elle
est néanmoins repartie avec son père, un grand seigneur,
après que celui-ci lui ait dévoilé l'identité
de son amant, dont il avait levé le masque un instant.
D'abord anéanti, le jeune homme se lie avec Tompson, qui lui promet
de lui donner les moyens de son ambition. D'abord se faire une position
sociale: pour cela, Richard feint d'aimer passionnément Jenny,
la fille du couple Grey. Malgré la réticence de Mme Grey,
engagement est pris de se marier, ce qui, ajouté aux manigances
de Tompson, permet à Richard d'accéder à la députation.
Trois ans plus tard, les menées et l'éloquence de Richard
Darlington à la chambre des Communes menacent de faire tomber le
ministère en place. D'abord incorruptible, Richard se laisse cependant
tenter par une proposition on ne peut plus alléchante pour son
ambition et son amour propre: le roi lui-même lui propose un contrat
de mariage avec la petite-fille du célèbre banquier le marquis
Da Silva, ainsi que la pairie, un titre de comte et un ministère...
Richard se laisse séduire par ces promesses mais doit cependant
résoudre un problème de taille: il est marié à
Jenny qui depuis trois ans vit cachée à la campagne, loin
de Londres, afin que tout le monde ignore cette union. Il s'efforce d'abord
de la convaincre de divorcer par consentement mutuel, en douceur puis
par la force, mais devant son refus Tompson suggère de l'enlever
et de l'envoyer en France.
Parce que lady Wilmor, la belle-mère de sa promise, à des
scrupules concernant les droits de son fils qu'elle a dû abandonner
à sa naissance à Darlington, Richard apprend qu'elle est
sa mère et, sans se faire reconnaître, essaye de lui faire
dire le nom de son père. Cependant, au moment où elle va
le lui apprendre, Mawbray, venu pour raisonner Richard à l'égard
de Jenny, l'en empêche au grand dam de celui-ci, qui, furieux, le
chasse.
La signature du contrat de mariage est prévue dans la maison de
campagne de Richard qu'il croit vide. Or, il y trouve avec effroi Jenny
que Mawbray a tiré des griffes de Tompson. En entendant Da Silva
et sa fille arriver, Richard s'affole et pousse Jenny qui tombe du balcon.
C'est alors que Mawbray surgit et se fait reconnaître au marquis
de Da Silva comme étant le père de l'enfant abandonné
un certain soir à Darlington... Richard apprend donc avec horreur
qu'il est le fils... du bourreau!
Analyse
Richard Darlington est un drame en prose
en trois actes et huit tableaux, précédé d'un prologue.
Le prologue se passe à Darlington, petit village du Northumberland,
dans le cabinet du docteur Grey. Dans le premier acte, nous retrouvons
ce même cabinet vingt-six ans plus tard, puis la place de la ville
de Darlington où nous assistons aux élections anglaises.
L'acte II nous transporte à la chambre des Communes trois ans plus
tard, puis dans la chambre de Jenny et enfin dans la chambre du conseil.
Le troisième et dernier acte nous fait pénétrer dans
l'appartement de Richard à Londres, puis sur une route avant de
se conclure dans la chambre de Jenny .
Représentée pour la première fois au théâtre
de la porte Saint- Martin le 10 décembre 1831, cette pièce
fut un grand succès, en grande partie grâce à la prestation
éblouissante de l'acteur Frédérick Lemaitre dans
le rôle de Richard Darlington. Ce dernier est un jeune homme dont
l'arrivisme et l'ambition sont tels que quand il découvre qui est
sa mère, au lieu de se faire reconnaître d'elle et d'abréger
ce remord qui la ronge, il ne pense qu'à une chose: savoir qui
est son père, parce que «une fortune ne constitue qu'une
demi-position dans le monde et que c'est le nom du père qui la
complète...». Autre beau trait de caractère: quand
il avoue froidement à Jenny qu'il ne l'a jamais aimée, qu'il
avait «besoin d'une famille,d'une position sociale, vous étiez
là...».
Comme on le voit, Dumas a créé avec Richard Darlington un
personnage odieux dont on ne peut compatir à la déconvenue
quand il apprend qui est son père...
Les dirigeants du pays sont aussi peints sous un jour assez défavorable,
avec le laxisme et la corruption dont ils font preuve.
Avec le personnage de Mawbray nous est présentée la dure
condition du bourreau qui n'en est pas moins un homme avec ses sentiments,
ses douleurs, ses attentions, mais que le regard et la haine des autres
rejette de la société toute sa vie...
Dans ses Mémoires,
Dumas parle de cette pièce, notamment dans les chapitres CCIX,
CCX et CCXVII. Il relate l'origine de la collaboration avec Beudin et
Goubaux qui lui ont amené le sujet (le prologue est tiré
des Chroniques de la canongate de Walter
Scott), comment le canevas de la pièce était fait en moins
d'une heure alors qu'il a mis plus de quinze jours à trouver la
scène de la mort de Jenny (jusque là, personne n'avait osé
ce genre de scène au théâtre ) et pour finir le soir
de la première qui fut un triomphe pour ses collaborateurs puisqu'il
a refusé d'être cité...
Laissons le mot de la fin à notre cher Alexandre: «Richard
est un immense succès et ce fut justice. Richard est tout simplement
un excellent drame» (Mes
Mémoires)
Nicole Vougny
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