Titre
Bathilde
Année de publication
1839
Genre
Drame en trois actes (Théâtre de la Renaissance [Salle Ventadour],
14 janvier 1839
Collaborateur(s)
Auguste Maquet
Epoque du récit
Contemporaine (années 1830)
Résumé
Bathilde d'Illières, une riche veuve, s'est rapprochée de
Lucien Deworde, le cousin de son mari, à qui ce dernier l'avait
confiée avant sa mort. Deworde aime la jeune femme, et envisage
de l'épouser. Mais Bathilde a eu une aventure avec un autre homme,
Marcel, qui la poursuit de ses assiduités et exerce sur elle une
pression morale insupportable, la menaçant de révéler
sa faute (Acte I). Un soir de carnaval, son ancien amant la contraint
à abandonner celui qu'elle doit épouser, et à fuir
ensemble (Acte II). Partagée entre des sentiments contraires, une
tendresse presque filiale pour Deworde, et un amour mêlé
de haine pour son ravisseur, Bathilde choisit de rejoindre les religieuses
de la Visitation (Acte III).
Analyse
Première collaboration Dumas-Maquet,
cette pièce, intitulée à l'origine Un
soir de carnaval est l'uvre d'abord de Maquet seul. Désespérant
de trouver un théâtre pour la faire jouer il demande conseil
à Gérard de Nerval. Celui-ci, jugeant que la pièce
n'est qu'à moitié réussie ("Il y a un acte et
demi de très bon et un acte et demi à refaire"), et
accumule trop de noirceurs pour seulement trois actes, incite Maquet à
demander le concours d'un collaborateur. Lockroy est pressenti, il refuse
; c'est alors qu'intervient Dumas, à qui Nerval présentera
Maquet quelques jours plus tard, une rencontre qui changera le destin
des deux hommes. Mais, pour l'heure, c'est Dumas le "nègre"
! Il récrit la pièce en suivant le plan de Maquet, et ne
la signe pas. Ce sera l'occasion des débuts, au nouveau théâtre
de La Renaissance, de l'actrice Ida Ferrier, maîtresse de Dumas
qui l'épousera bientôt. Glinel a retrouvé, sur l'exemplaire
d'Ida, un sonnet autographe de la main de Maquet ; le voici :
Des roses qu'à Pstum effeuille chaque aurore
Quand la tige a fléchi sous son fardeau de fleurs,
Il reste après la grâce et les riches couleurs
Une goutte d'encens, relique douce encore.
À l'azur des beaux yeux que l'âge décolore
Un portrait rend l'éclat du sourire ou des pleurs ;
Le vélin recueillit ces hymnes de couleurs
Que soupirait Le Tasse aux pieds d'Éléonore.
Mais s'il sort du calice un parfum décevant,
De la beauté perdue un souvenir vivant,
De l'âme du poète, un vers, un chant, un livre,
Si de tout ce qui plut surnage quelque bien,
Pourquoi, de cette voix dont la foule s'enivre
Quand vous avez parlé, ne conservons-nous rien !
Ce drame "moderne", pour reprendre une catégorie dumasienne,
n'offre pas de caractères bien dessinés : Marcel passe un
peu vite du jeune premier romantique énamouré à l'homme
qu'endurcit sa passion et qui est prêt à toutes les vilenies,
son comparse Guillaumin, de comique vaguement troupier devient carrément
tragique, et Deworde reste bien transparent. Si on sort des pistolets
à la fin, le duel attendu n'aura pas lieu. Seule, Bathilde porte
la pièce, mais dans cette uvre qui évoque parfois
Angèle, on s'interroge
sur la "faute" que l'héroïne a bien pu commettre,
et par quoi Marcel la tient sous sa férule : il n'y a pas d'enfant
caché, et elle était veuve
Mais, bon, nous sommes
en 1839 ! Contrairement à ce qui est dit parfois, Bathilde n'a
en commun avec Le
Chevalier d'Harmental, autre uvre de Dumas tirée d'un
récit de Maquet, que le prénom de son héroïne.
Le texte n'a connu qu'une édition, en 1839, dans le Magasin
théâtral de Marchant.
François Rahier
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